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Deux entrées pour les lecteurs pressés
Maldoror
Lautréamont
Les plus grandes découvertes du Bozo
L'hispanisme lexical, grammatical,
syntaxique et culturel de l'oeuvre d'Isidoro Ducasse
Citation littérale de Dante
à l'incipit des Chants (traduction de Jacques-André
Mesnard)
Citation littérale de Milton au
Chant 6, troisième strophe (traduction de
Chateaubriand)
El Matadero
d'Esteban Echevarría, source de l'épisode des
bouchers, strophe 6.9
Une strophe inédite du Chant
premier, réécrite au Chant 2
L'état original du
« 2e Chant », soit le fascicule II des
Chants de Maldoror en 1868
— Et par conséquent
la « recomposition » du Chant 2.
La source de la strophe 3.2 dans
une petite ballade de la Jeunesse
<
Éditorial >
« L'étude des hispanismes. — Il [Guy
Laflèche] a été
l'un des premiers à en souligner l'importance dans le texte
de Lautréamont. L'accord s'est fait aujourd'hui pour
reconnaître leur présence. Est-elle aussi constante
que le dit M. Laflèche ? Les Chants de Maldoror
sont-ils un « texte entièrement pensé en
espagnol AVANT d'avoir été ensuite
rédigé en français » comme il
l'écrit ? Seul son travail achevé permettra de
répondre à ces questions. Il nous demande d'accepter
l'idée que nous n'avons à peu près rien
compris au texte jusqu'à présent, ce qui
naturellement est difficile à concevoir a priori. L'enjeu
est donc de taille, et radical, puisque c'est plus d'un
siècle de recherche critique qui se verrait anéanti,
si M. Laflèche a raison ! Je ne saisis pas s'il mesure
exactement la violence de sa proposition ».
—— Ducassologue anonyme,
automne 2003.
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Édition de la strophe 4.4
— L'occasion de faire le point
Leyla
Perrone-Moisés,
l'héroïne des études sur l'hispanisme
d'Isidoro Doucass(é)
Dans la dernière strophe
éditée, on a relu la fameuse phrase qui demande,
« Est-ce possible que tu sois
encore respirant ? ». L'hispanisme a
été désigné comme tel en 1983 et se
trouve, par conséquent, consigné ici, au fichier des
tournures syntaxiques de structure espagnole, depuis au moins le 15
juillet 1996. 1983 ? C'est quinze avant le début de
mon édition critique.
Leyla Perrone-Moisés a prolongé
et publié les travaux qu'elle avait entrepris vers 1980 avec
Emir Rodríguez Monegal (1921-1985). Le travail d'analyse
s'est poursuivi au-delà du décès de son
collaborateur, à sa mémoire, comme en
témoigne la traduction française du
Lautréamont austral (Brecha, Uruguay, 1995) :
Lautréamont, l'identité culturelle : double
culture et bilinguisme chez Isirore Ducasse (Paris,
L'Harmattan, 2002). Leur coup d'envoi est constitué d'un
article paru simultanément, en 1983, dans les revues
Poétique, à Paris, et Vuelta à
Mexico.
Les Chants de Maldoror, de 1869, étaient devenus, en
moins d'un petit siècle, un classique de la
littérature française. Mais il a fallu attendre
1983, avant qu'on apprenne enfin qu'Isodore Ducasse, originaire de
l'Uruguay, où il avait passé toute son enfance (ce
qu'on savait pourtant depuis toujours), n'avait pas écrit
son oeuvre comme, disons, Jules Laforgue, un Français,
né, lui aussi, à Montévidéo. La
comparaison est intéressante. Laforgue a vécu sa
petite enfance (1860-1866) dans sa famille française
nombreuse d'Uruguay, avant de venir en France pour le reste de ses
jours. Isidore Ducasse a passé toute son enfance
à Montévidéo, orphelin de mère. Sa
langue « maternelle » est celle de ses
niñeras, le castillan de la vie quotidienne, tandis que le
français est sa langue « paternelle ».
Et justement, c'est à l'âge de treize ans (treize ans,
c'est très vieux, en regard de l'apprentissage
linguistique), en 1859, que son père l'envoie en France
faire ses études collégiales. Sorti des
lycées en 1867 (alors que huit ans, c'est peu pour bien
maîtriser son français, si ce n'est
pas sa langue depuis la petite enfance), voilà
qu'après un bref retour à Montévidéo,
notre bilingue s'installe poète à Paris, à
l'automne 1867. Il suit que les Chants de Maldoror, Chant
premier, août 1868, puis l'ensemble des six chants qui
paraissent l'année suivante, ne seront pas tout à
fait de la langue et du style des oeuvres de Jules Laforgue,
toujours par exemple, ni d'aucun autre écrivain
français. Cette esquisse biographique représente ce
que l'on a complètement ignoré durant très
longtemps. En 1983, donc, Emir Rodríguez Monegal et Leyla
Perrone-Moisés ont été les premiers à
tirer les conséquences de ce parcours atypique et à
faire comprendre que les Chants de Maldoror étaient
parsemés de tournures espagnoles dues à un auteur
« montévidéen ». Avec Emir
Rodríguez Monegal, Leyla Perrone-Moisés, qui aura
poursuivi ses intuitions et son travail, peut à bon droit
être considérée comme la fondatrice des
études sur l'hispanisme d'Isidore Ducasse. C'est notre
héroïne, dans le présent travail.
Mais l'analyse des fondateurs de
l'étude de l'hispanisme dans l'oeuvre de Ducasse comporte
deux erreurs. La première est apparemment sans
conséquence. Elle a consisté à
présenter les résultats de leur travail inaugural
comme une réaction à la critique française des
Chants qui aurait malencontreusement dénoncé des
« fautes », de nombreuses
« fautes », dans l'oeuvre. Et d'en produire
deux et deux seuls exemples, Robert Faurisson et Michel Charles
(Lautréamont austral, p. 75). Or, ni l'un ni
l'autre n'a jamais relevé de fautes de langue de
manière le moindrement systématique. Robert
Faurisson n'en signale jamais aucune, tandis que Michel Charles
s'amuse de quelques vétilles (1971, p. 84-85), avant de
les glisser sous un épais tapis de commentaires assommants.
Il s'étonne qu'il n'y ait pas de main à un bras
recourbé, tandis que « l'autre main »
est contre la poitrine (srophe 2.7,
p. 81: 18). Oublions cela, puisque c'est de l'ordre des
remarques de Robert Faurisson, sans aucun rapport avec la grammaire
ou la linguistique. Tout de suite après cette
« négligence », il voit un
« archaïsme » dans « n'ouvre pas
tes yeux » (2.7,
p. 86: 11, un tout simple hispanisme). Ah ! il ajoute
deux « incorrections »,
« causer la crainte », hispanisme pour causer
de la crainte (strophe 2.2,
p. 63: 3), et « dans le commencement de cet
ouvrage », nouvel hispanisme morphologique (cf. strophe
1.2, n. (a) pour une analyse critique
de l'« interprétation » de Michel
Charles). Mais ce n'est pas tout : le critique signale
encore deux « fautes » :
« prendre de plus en plus de la
consistance » (strophe 1.12, p. 50: 12) et
« laisser des ineffaçables
traces », pour d'ineffaçables (strophe 1.9, p. 23: 25), qui pourrait
être une mise en relief de l'adjectif (d'après
« Grevisse » !). Et partout on a droit
à des « voir Grevisse », sans
désignation du paragraphe concerné. Cinq, c-i-n-q,
petites incorrections, alors que l'analyse grammaticale de la
présente édition en compte près d'un millier
à ce jour. Mais après le relevé de ces cinq
fautes, ce commentaire : « si l'on parle ou si l'on
parlait de pathologie [sic] ou de faute, il y a ou il y aurait tout
simplement démission » (p. 85).
— Or, avec ses cinq fautes très
précautionneusement balayées sous le tapis, Michel
Charles aura été certainement le plus terrible
censeur de Ducasse en matière grammaticale. Admettons que
le critique littéraire n'a pas été très
sévère...
Le problème est justement là.
Comment se fait-il donc que parmi des centaines de critiques
littéraires de l'oeuvre d'Isidore Ducasse, durant plus de
cinquante ans, aucun n'a jamais vu qu'elle n'était pas
rédigée en français ? Qu'elle fourmille
d'incorrections et de fautes de langue à tous les niveaux,
d'approximations et d'expressions manifestement inadéquates,
parfois incompréhensibles. Et il ne s'agit pas de traits
dispersés dans l'ensemble de l'oeuvre : les Chants
comptent de cinq à dix de ces perles à chaque page,
de sorte que ce texte n'est pas le produit d'une rédaction
et d'une correction adéquates ou soignée en
français. On remarquera que je ne parle pas ici
d'hispanisme, mais tout bonnement de la langue française.
On ne demande pas à un francophone de connaître
l'espagnol, mais de maîtriser le français. Et ce ne
sont pas les lecteurs de Ducasse qui sont en cause, bien entendu,
mais ses critiques. Ont-il tous été aveugles ou
aveuglés par la langue pétillante, flamboyante et
étincellante des Chants ?
La seconde erreur des initiateurs de nos
travaux ne tient plus à l'origine supposée ou
à la mise en scène des résultats de leur
découverte, mais, au contraire, au prolongement de ces
résultats. Cela consiste à supposer une culture
littéraire hispanique à Ducasse et cela commence par
l'idée que le manuel de rhétorique de José
Gómez de Hermosilla (qu'on peut très bien supposer
acheté par hasard sur les quais de Paris) puisse avoir eu de
l'influence sur son oeuvre. Bien au contraire, l'étude des
sources menée jusqu'ici dans le présent travail
prouve hors de tout doute que les Chants de Maldoror ne
manifestent aucune culture littéraire hispanique. Ni
même ibérique. J'ai épluché (quel
plaisir) toute la littérature d'Uruguay contemporaine des
Ducasse, père et fils, et je n'ai, bien entendu, rien
trouvé qui puisse avoir le moindrement influencé les
Chants, en dehors de la culture populaire, l'image du gaucho ou la
petite nouvelle d'Echeverría,
« L'abattoir ». Rien de plus normal. Ducasse
a treize ans lorsqu'il quitte Montévidéo, c'est en
France qu'il fera ses études collégiales et c'est
à Paris qu'il entreprend son oeuvre. Sur cette fausse
piste, quelques critiques vont se lancer dans la recherche
d'éventuelles fréquentations de notre auteur avec le
« milieu » sud-américain de Paris. Ils
finiront tous par en venir à la conclusion du non-lieu,
évidemment, puisqu'il n'y a qu'un seul et insignifiant
indice d'une aussi invraisemblable possibilité, un nom
propre, celui de « Dolorès Veintemilla »
(Poésies, I, p. 10). Invraisemblable du strict point
de vue psychologique : après huit ans d'un difficile
apprentissage au lycée français (il ne faut
pas beaucoup de sensibilité pour se mettre à la place
d'un parfait bilingue, dont la première langue parlée
n'est pas le français), le voilà qu'il s'installe
à Paris, poète français.
Certes, en effet, « la fin du dix-neuvième
siècle verra son poète », un
poète français, même s'il ne peut
commencer par un chef-d'oeuvre, étant né sur les
rives américaines de La Plata. Relisez l'autocritique qui
termine le Chant premier (la strophe 1.14)
et vous verrez bien que ce n'est pas de difficultés
littéraires et poétiques dont il est question : en
quoi un Montévidéen aurait-il plus de peine qu'un
autre sur ce point ? Non, c'est de langue, de langue
française, qu'il est question, évidemment plus
difficile à maîtriser pour un
Montévidéen que pour un Parisien.
Voici d'ailleurs le témoignage de
Georges Dazet, transmis par Paul Lespès. Un
témoignage de seconde main, bien enendu, mais qu'il n'y a
aucune raison de laisser dans l'ombre. Il est probable que c'est
par discrétion que François Alicot a tenu à
respecter le voeu de Paul Lespès, jusqu'à ignorer
complètement la huitième des dix lettres de son
correspondant. La censure et l'autocensure s'expliquent
évidemment d'elles-mêmes. Qu'on en juge
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