Les interventions du redoutable polémiste (nous le sommes tous) restent généralement sans réplique, malheureusement, ses victimes n'éprouvant pas le besoin qu'on mesure davantage la justesse de la critique et c'est bien dommage, cela nous permettrait de rire encore un peu, car si le polémiste est intervenu, c'est évidemment parce que ce n'était pas drôle du tout. La formule : polémique = réplique (pamphlétaire (sans réplique)).
L'éléphant de porcelaine L'arpenteuse du racisme La brouillonnologue de la CGMM Notre critique et sa poésie
Les fulminations de Dominique Deslandres, de René Latourelle et de Robert Toupin contre le « Mythe contemporain Laflèche »

Polémiques II

Guy Laflèche,
Université de Montréal

Les « éditeurs admissibles »
du Programme d'aide à l'édition savante :
aucune réplique possible au « publi-reportage »
déguisé du Devoir

      Il y a des situations pénibles pour les polémistes. Lorsqu'ils n'ont aucun droit de parole. Ou si leur liberté d'expression est soumise à un tiers. Ils sont prêts à tout, à toutes les compromissions, pour pouvoir polémiquer.

      Vraiment pathétique.

      Humiliant, aussi. Les tout-puissants ont forcément le pouvoir. Y compris celui de vous ignorer. Vraiment pathétique.


Lettres à la rédaction du Devoir,
a/s M. Jean-Robert Sansfaçon,

  1. Le 23 mai 2000
  2. Le 5 juin
  3. Le 13 juin
  4. Le 25 juin

Comme on le verra à ces lettres, j'ai fait deux versions de mon
texte d'opinion :


Lettres à la rédaction du Devoir

(1) Lettre au Devoir, 23 mai 2001

      redaction@ledevoir.com
      Pour monsieur Sansfaçon

      Mercredi, 23 mai 2001.

      Re : Texte d'opinion proposé à la page « Idées »
      redaction@ledevoir.com

Madame, monsieur,

      Je vous serais extrêmement reconnaissant de faire paraître dans vos pages le texte d'opinion qui suit.

      Avec mes coordonnées, recevez l'expression de mes meilleurs sentiments,

      __gl>-

      Guy Laflèche

(2) Lettre au Devoir, 5 juin 2001

      Jeudi, 5 juin 2001.

      Re : Texte d'opinion proposé à la page « Idées »
      redaction@ledevoir.com

      Madame, monsieur,

      Le 23 mai dernier, je vous ai fait parvenir le texte d'opinion dont je vous adresse une nouvelle version, le premier paragraphe ne s'appliquant plus maintenant [étant rédigé au futur : « le Devoir d'aujourd'hui, 19 mai, nous apprend que le PAES tiendra le 27 mai », etc.].

      Celui-ci renvoyait au colloque du Programme d'aide à l'édition savante auquel le Devoir consacrait UNE PAGE COMPLÈTE les 19-20 mai dernier. Il s'agissait d'un publi-reportage à peine déguisé (un article sous forme d'entrevue de Madeleine Leblanc et le reste de la page en publicité du congrès où se déroulait le colloque). Je ne parle pas de cela dans mon texte d'opinion, ayant assez d'un canard à viser.

      En revanche, je ne sais pas trop pourquoi mon texte n'a pas été retenu. Il est pourtant suscité par une page du Devoir et il est d'un lecteur du journal qui apporte un témoignage sur un programme dont vous publiez et faites la publicité. Si vous ne le publiez pas, je me demande bien quels sont vos critères pour retenir un texte, étant donné la page complète sur le « sujet » (p. F6 des 19-20 mai, encore une fois).

      Avec mes coordonnées, recevez encore l'expression de mes meilleurs sentiments,

      __gl>-

Guy Laflèche

(3) Lettre au Devoir, 13 juin 2001

      Mercredi, 13 juin 2001.

      Monsieur Jean-Robert Sansfaçon,
      Rédacteur en chef,
      Responsable de la page « Idées ».

      Cher monsieur,

      Si vous n'êtes pas responsable de la page « Idées », je vous serais reconnaissant de transmettre copie informatique du présent envoi au responsable.

      J'aimerais savoir, de manière évidemment succincte, voire laconique, pourquoi mon texte d'opinion n'est pas retenu dans la page « Idées », texte expédié le 23 mai, réexpédié le 5 juin, par courriel.

      Je sais bien qu'il peut y avoir bien des raisons de publier un texte d'opinion dans la page « Idées » et encore plus de ne pas le faire. Mais dans le cas présent, je vois plus de raisons de le voir paraître que l'inverse. D'ailleurs, je m'explique mal l'inverse en question.

      Voilà pourquoi j'aimerais avoir au moins une idée sommaire des raisons qui en empêchent la publication. En essayant de comprendre, je me perds en conjectures.

      Je vous remercie ou remercie le responsable de la page « Idées » de prendre de son temps pour m'expliquer ces raisons (que je ne discuterai pas bien entendu), soit par retour de courriel, soit de vive voix au téléphone (450-XXX-XXXX, à mon domicile), soit à l'aide d'un message sur ma boîte vocale si l'on ne pouvait me rejoindre à la maison (514-343-XXXX), voire par la poste.

      Je vous prie d'accepter l'expression de mes meilleurs sentiments,

      __gl>-

      Guy Laflèche

      P. S. Comme les électrons ne prennent pas beaucoup de place, je vous retranscris mon dernier envoi et mon texte d'opinion ci-dessous.

(4) Lettre au Devoir, 25 juin 2001

      Lundi, 25 juin 2001

      Monsieur Jean-Robert Sansfaçon,
      Rédacteur en chef,
      Responsable de la page « Idées ».

      Cher monsieur Sansfaçon,

      Sans réponse de votre part au sujet de mon texte sur le Programme d'aide à l'édition savante soumis à la page « Idées » le 23 mai, je me suis dit que, pour vous, les raisons de ne pas le retenir devaient être évidentes.

      En me mettant à votre place, il n'était pas trop difficile de comprendre que mon texte devait être trop long ! Je vous en propose donc une version deux fois plus courte. Ensuite, j'ai pensé que toute une part de mon analyse faisait la part trop belle à mon travail et que le tout était beaucoup trop autobiographique. C'est donc ce que j'ai soustrait.

      Est-ce que maintenant vous pourriez envisager de publier mon texte d'opinion ainsi refait ?

      Avec mes coordonnées, recevez encore l'expression de mes meilleurs sentiments,

      __gl>-

      Guy Laflèche


Première version - version trop longue

Les « éditeurs admissibles »
du Programme d'aide à l'édition savante

Guy Laflèche, éditeur

      Guy Laflèche est professeur au département des Études françaises de l'Université de Montréal. Cinq de ses livres, ses ouvrages sur les Saints Martyrs canadiens, ont été subventionnés par le PAES de la FCSHS et sont parus à la maison d'éditon qu'il a fondée, les Éditions du Singulier, dont il est à ce jour le seul auteur (à l'exception du professeur François-Marc Gagnon, auteur du premier chapitre du premier volume sur les saints martyrs canadiens).

      Le Devoir du 19 mai [2001] (p. F6) nous apprenait que le Programme d'aide à l'édition savante (PAES) tenait un colloque sur l'édition savante le 27 mai dernier, au cours du congrès de la Fédération canadienne des sciences humaines et sociales (FCSHS), qui gère le programme, elle-même subventionnée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH)

      À la suite de ces savants travaux sur l'édition savante, me permettra-t-on d'apporter une note aussi personnelle que discordante ?

      Je n'ai certainement pas l'objectif de dénigrer le Programme d'aide à l'édition savante. J'en ai plus que largement profité. Mais cela n'a pas été sans peine. On se doute que les cinq volumes de mon ouvrage sur les saints martyrs canadiens ont rencontré bien des oppositions et bien des critiques anonymes (dont un « lecteur fantôme » qui a réussi à lui seul le tour de force de retarder l'évaluation de mon premier manuscrit de plusieurs années, ce qui est tout de même assez extraordinaire !). Mais le résultat est simple, clair et net : si l'on m'a pratiquement refusé toutes mes subventions de recherche (pour des raisons que j'estime strictement idéologiques), il a bien fallu qu'on se rende compte, aux résultats, que j'avais fait un travail de recherche novateur et de qualité, exempt de tout fanatisme, mais non pas d'engagement intellectuel, moral et personnel, ce qui tranche avec le modèle aseptisé des travaux savants soi-disant « objectifs ».

      Les cinq volumes de mon ouvrage ont donc été subventionnés par le PAES, la subvention étant d'environ sept mille dollars par volume, pour des tirages de mille exemplaires. Sans ces subventions, je n'aurais sûrement jamais publié mon ouvrage moi-même et il est absolument certain qu'aucun éditeur de l'aurait fait comme je l'ai fait. Je viens de l'expliquer : il aurait fallu que je soumette mon travail de recherche aux impératifs éditoriaux traditionnels et conservateurs des presses universitaires. C'est à titre de chercheur et d'écrivain qu'il m'importe de contrôler la fabrication typographique de mes livres, comme leur publicité. Je voulais que l'édition soit au service de mon travail de recherche et non l'inverse. Et une chose est certaine, jamais aucun autre éditeur n'aurait eu le courage et la compétence de réaliser comme j'ai pu le faire l'édition de mon ouvrage qui fait apparaître, en négatif, l'importante force d'inertie, la puissance d'homogénéisation et le rôle idéologique (politique, social et moral) considérable de l'édition savante universitaire.

      C'est le second chapitre de mon histoire. Le plus important. Après environ dix ans de travail, j'ai présenté le manuscrit du premier volume de mon ouvrage sur les saints martyrs canadiens au Programme d'aide à l'édition savante. C'était en 1983. En même temps, j'ai demandé l'autorisation de publier mon ouvrage à ma propre maison d'édition, celle que j'allais fonder. La réponse a été positive : rien ne s'y opposait. J'ai aussitôt fondé les Éditions du Singulier et (question de me faire la main) fait paraître Vues d'Argentine, un petit essai sous forme de relation de voyage.

      J'ai édité ensuite les cinq volumes de mon ouvrage sur les saints martyrs canadiens de 1988 à 1995, grâce aux subventions du PAES. Maintenant que les cinq volumes sont parus et bien en place en bibliothèque ou en librairie, tout paraît facile, mais il y a dix ans, surtout au début, cette liberté coûtait sept mille piastres par livre ! Or voilà que ce n'est plus et ne sera plus possible !

      La raison en est que le PAES s'est donné de nouvelles règles qui interdisent maintenant non seulement qu'un autre universitaire puisse profiter comme moi des subventions de la Fédération pour fonder sa propre maison d'édition, mais les Éditions du Singulier ne peuvent même plus avoir accès au programme de subvention pour faire paraître mon prochain ouvrage.

      C'est le 16 décembre dernier que je comptais adresser au PAES le manuscrit du prochain ouvrage savant des Éditions du Singulier. Le manuscrit était au point, après cinq ans de recherche. Il s'agit d'un travail réalisé en collaboration avec mon collègue Serge Trudel. Le livre s'intitule Un janséniste en Nouvelle-France. Il s'agira, vraisemblablement, d'un événement littéraire, puisque nous y faisons la preuve d'une chose toute simple, mais proprement incroyable : le supérieur des récollets de Nouvelle-France (vers 1680), Valentin Leroux, avait développé une puissante idéologie janséniste (inspirée des oeuvres de Pascal) qu'il appliquait à l'apostolat missionnaire auprès des Amérindiens. Il en a même fait tout un livre pamphlétaire contre les missionnaires jésuites qu'il a publié sous le nom d'un de ses subalternes, le père Chrestien Leclercq. Eh oui ! nous faisons la preuve que l'ouvrage intitulé Premier Établissement de la foi dans la Nouvelle-France n'est pas l'oeuvre de Leclercq, mais de Leroux, notamment à cause de sa pensée et de ses thèses jansénistes. Bref, lorsque l'on fait de la recherche, en sciences humaines, il arrive qu'on fasse aussi des découvertes !

      Or, à titre d'auteur ou de co-auteur, il m'est interdit d'avoir une subvention pour faire paraître un ouvrage savant à ma propre maison d'édition. Pour être plus précis, il faut dire que les subventions du PAES doivent être gérées par des éditeurs « admissibles » qui sont choisis par le Programme sur la base d'une dizaine de critères. La plupart de ces exigences se comprennent facilement : l'éditeur doit être une entreprise canadienne, par exemple, et l'entreprise doit démontrer qu'elle peut produire, gérer et distribuer efficacement ses livres.

      Mais l'un de ces critères me paraît inutile, injuste, immoral et très certainement illégal. C'est le septième, qui se lit comme suit : « Les subventions du PAES ne sont pas destinées aux ouvrages rédigés par ou sous la direction des propriétaires ou employés de l'entreprise produisant l'ouvrage en question à moins que la majeure partie du programme de l'entreprise pour l'année soit constitué d'ouvrages d'auteurs ne possédant aucun lien social avec la maison d'édition » (http://www.hssfc.ca).

      Pourquoi ? Qui le PAES veut-il protéger ? Les Presses universitaires ? Je ne suis certainement pas le chercheur le plus prestigieux subventionné par le PAES, mais j'imagine que nous ne devons pas être très nombreux à avoir fondé notre propre maison d'édition pour publier nos propres ouvrages savants. Depuis quinze ans, je pourrais bien être le seul. Je pense donc que le PAES aurait eu avantage à me consulter avant d'adopter un règlement qui m'a toujours paru discriminatoire partout ailleurs (c'est le même règlement qui interdit en effet à ma maison d'édition de profiter des programmes d'édition du Gouvernement du Canada ou d'obtenir l'agrégation du Gouvernement du Québec).

      Impertinent, discriminatoire et illégal. Le fait qu'un livre soit écrit par un éditeur, l'un de ses employés, l'un de ses parents ou l'un de ses amis ne décrit pas une catégorie de livres. Dans le cas d'un ouvrage savant, c'est même un critère tout bonnement ridicule, étant donné que la publication savante est évaluée par ailleurs. La discrimination est assez évidente : on voit bien que le règlement permet aux éditeurs (et surtout aux gros éditeurs qui doivent avoir beaucoup de temps pour se livrer à la recherche !) d'être des auteurs et de publier leurs livres, tandis qu'elle interdit aux auteurs d'être leur éditeur. Discriminatoire et illégal : ce règlement crée deux catégories de citoyens canadiens, un tout petit groupe d'éditeurs qui ont droit de publier les ouvrages dont ils sont les auteurs, mais interdit à une vaste majorité d'auteurs d'avoir le droit de faire la même chose.

      Bien entendu, il est assez normal que les éditeurs se protègent et inventent la règle inique selon laquelle un éditeur, un véritable éditeur, un éditeur agréé, un éditeur subventionné ne peut se consacrer à l'édition de ses ouvrages. Ce règlement a été imposé aux fonctionnaires par ceux qui font le commerce du livre littéraire. Qu'il soit maintenant adopté par le PAES, sans aucune raison valable puisque j'en ai profité avantageusement pour des raisons scientifiques, intellectuelles et idéologiques me paraît vraiment scandaleux.

      En tout cas, le 16 décembre 2000, je me suis présenté sur le site du Programme d'aide à l'édition savante sur Internet, pour savoir comment j'aillais soumettre le manuscrit de mon prochain livre, celui que j'allais éditer au Singulier. Moi qui étais si fier et orgueilleux d'avoir obtenu jusqu'ici l'aide du PAES, je ne sais trop comment traduire le sentiment que j'ai ressenti à ce moment. Je n'étais pas vraiment fâché, ou seulement désolé pour ma toute petite maison d'édition, j'étais plutôt triste, d'une tristesse proche de la honte, celle qu'on ressent en se mettant à la place des fonctionnaires qui ont rédigé et adopté ce « critère ».

      C'est à titre de chercheur et d'auteur que je présente cette analyse, mais à titre d'éditeur que je signe la présente protestation.


Seconde version - version trop courte

Les « éditeurs admissibles »
du Programme d'aide à l'édition savante

Guy Laflèche, éditeur

      Le mois dernier, par sa publicité dans les journaux (le Devoir du 19 mai, p. F6), le Programme d'aide à l'édition savante (PAES) nous apprenait qu'il tenait un colloque sur l'édition savante le 27 mai, à Québec, au cours du congrès de la Fédération canadienne des sciences humaines et sociales (FCSHS), qui gère le programme, elle-même subventionnée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH)

      À la suite de ces savants travaux, me permettra-t-on d'apporter une note aussi personnelle que discordante ?

      Je n'ai certainement pas l'objectif de dénigrer le Programme d'aide à l'édition savante, car j'en ai plus que largement profité.

      Les cinq volumes de mon ouvrage sur les saints martyrs canadiens ont en effet été subventionnés par le PAES, la subvention étant d'environ sept mille dollars par volume, pour des tirages de mille exemplaires. Sans ces subventions, je n'aurais sûrement jamais publié mon ouvrage moi-même et il est absolument certain qu'aucun éditeur de l'aurait fait comme moi. Au contraire, il aurait fallu que je soumette mon travail de recherche aux impératifs éditoriaux traditionnels et conservateurs des presses universitaires. Il ne fait pas de doute que j'aurais dû me conformer au modèle aseptisé des travaux savants soi-disant « objectifs ». Et je n'aurais pas pu, évidemment, contrôler comme je l'ai fait la fabrication typographique de mes livres, leur présentation matérielle et leur publicité. Bref, je voulais que l'édition soit au service de mon travail de recherche et non l'inverse. En tout cas, il me semble que mon ouvrage fait apparaître, en négatif, l'importante force d'inertie, la puissance d'homogénéisation et le rôle idéologique (politique, social et moral) considérable de l'édition des travaux savants universitaires.

      En 1983, lorsque j'ai présenté le manuscrit du premier volume de mon ouvrage sur les saints martyrs canadiens au Programme d'aide à l'édition savante, j'ai demandé l'autorisation de publier mon ouvrage à ma propre maison d'édition, celle que j'allais fonder. La réponse a été positive : rien ne s'y opposait. Maintenant que les cinq volumes sont parus et bien en place en bibliothèque ou en librairie, tout paraît facile, mais cela n'aurait pas été possible sans le PAES. Or, voilà que ce n'est plus et ne sera plus possible.

      Le programme a en effet adopté de nouveaux règlements. Pour être plus précis, il faut dire que les subventions du PAES doivent être gérées par des éditeurs « admissibles » qui sont choisis par le Programme sur la base d'une dizaine de critères. La plupart de ces exigences se comprennent facilement : l'éditeur doit être une entreprise canadienne, par exemple, et l'entreprise doit démontrer qu'elle peut produire, gérer et distribuer efficacement ses livres.

      Mais l'un de ces critères me paraît inutile, injuste, immoral et illégal. C'est le septième, qui se lit comme suit : « Les subventions du PAES ne sont pas destinées aux ouvrages rédigés par ou sous la direction des propriétaires ou employés de l'entreprise produisant l'ouvrage en question à moins que la majeure partie du programme de l'entreprise pour l'année soit constitué d'ouvrages d'auteurs ne possédant aucun lien social avec la maison d'édition » (http://www.hssfc.ca).

      Pourquoi ? À quoi sert un tel règlement dans le cas d'ouvrages savants et comment justifier la restriction (« à moins que... ») qu'il contient ? Ce règlement m'a toujours paru discriminatoire : c'est le même règlement qui interdit en effet à ma maison d'édition de profiter des programmes d'édition du Gouvernement du Canada ou d'obtenir l'agrégation du Gouvernement du Québec.

      Impertinent. Le fait qu'un livre soit écrit par un éditeur, l'un de ses employés, l'un de ses parents ou l'un de ses amis ne décrit pas une catégorie de livres. Dans le cas d'un ouvrage savant, c'est même un critère tout bonnement ridicule, étant donné que la publication savante est évaluée par ailleurs. Discriminatoire. La discrimination est assez évidente : on voit bien que le règlement permet aux éditeurs d'être des auteurs et de publier leurs livres, tandis qu'il interdit aux auteurs d'être leur éditeur. Illégal. Ce règlement crée deux catégories de citoyens, un tout petit groupe d'éditeurs qui ont droit de publier les ouvrages dont ils sont les auteurs, mais interdit à une vaste majorité d'auteurs d'avoir le droit de faire la même chose.

      Bien entendu, il est assez normal que les éditeurs se protègent et inventent la règle inique selon laquelle un éditeur, un véritable éditeur, un éditeur agréé, un éditeur subventionné ne peut jamais être celui qui se consacre à l'édition de ses ouvrages. Ce règlement a été imposé aux fonctionnaires par ceux qui font le commerce du livre littéraire, pour interdire leurs programmes de subvention aux diverses formes de la publication à compte d'auteur. Qu'il soit maintenant adopté par le PAES, sans aucune raison valable — puisque j'en ai profité avantageusement pour des raisons scientifiques, intellectuelles et idéologiques — est scandaleux.


TdMTGdM