Les interventions du redoutable polémiste (nous le sommes tous) restent généralement sans réplique, malheureusement, ses victimes n'éprouvant pas le besoin qu'on mesure davantage la justesse de la critique et c'est bien dommage, cela nous permettrait de rire encore un peu, car si le polémiste est intervenu, c'est évidemment parce que ce n'était pas drôle du tout. La formule : polémique = réplique (pamphlétaire (sans réplique)).
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Polémiques II

Guy Laflèche,
Université de Montréal

Introduction

      « Je suis polémiste de métier ». Ainsi s'ouvre mon premier recueil d'articles, intitulé Polémiques. En voici un second volume : Polémiques II.

      Je pense, en effet, que la première fonction de l'universitaire est la critique et, malheureusement, qu'il n'y a pas de « critique constructive ».

      L'esprit critique, lorsqu'il lance un débat ou y prend part, met toute sa sensibilité et son intelligence, sa compétence, au service de la vérité, dans le respect des personnes, de leurs sentiments et de leurs idées, certes, mais sans aucun respect des susceptibilités des personnages. Comme cela arrive forcément à tout le monde, il faut bien que des universitaires, des professeurs, des chercheurs, des rédacteurs, des critiques et bien d'autres personnes en autorité aient tort et assument alors leurs décisions et leurs écrits. Ce sont des personnages, comme nous le sommes tous dans nos diverses fonctions d'autorité. Si l'enjeu est important, s'il relève de ma compétence et s'il me touche, on peut toujours compter sur moi pour la polémique.

      Pour l'autocritique aussi. Comme je l'ai toujours dit, il n'y a rien que je ne sois prêt à remettre en cause dans ce que j'enseigne et ce que j'écris, tout simplement parce que je suis capable de défendre avec la dernière énergie mon enseignement et mes écrits. Je ne suis pas de ceux qui ont raison d'avance. Si l'on a des questions et des objections, on me fait toujours plaisir de les formuler et je suis forcément heureux d'y répondre, de préciser ma pensée ou, au contraire, de me corriger. N'est-ce pas le plus simple que de reconnaître ses erreurs ou de mieux s'expliquer ? N'est-ce pas un plaisir de développer sa pensée ? De s'améliorer et de se corriger encore ? Je suis même de ceux que l'on peut convertir le plus facilement à ses raisons ou à des sentiments justes, correctement exprimés. Mais je ne suis pas naïf, de sorte qu'on fera bien d'avoir de bonnes raisons pour m'opposer ses « opinions ».

      Il faut au contraire dénoncer les « opinions » de tous ceux qui expriment leurs « idées » avec cette conviction qui tient à leur personne. Ce sont les « idées de x », les siennes, les leurs. « Conviction » est ici le mot juste. Car ce ne sont jamais des idées, des idées qui leur viendraient d'une autre personne, d'une autre époque ou d'une autre civilisation. Non. Peu importe où ils trouvent leurs « idées », elles ne sont pas non plus destinées à devenir celles des autres, des idées que nous adopterions parce qu'elles nous paraîtraient justes, sans plus. Le cogito, ici, est totalement intransitif, en effet. On trouve partout de ces professeurs dont j'ai horreur et on les reconnaît facilement, car ils ont des opinions et des disciples qui les partagent, alors que personne ne peut en discuter, soit qu'elles sont confidentielles, soit qu'elles ne sont jamais développées ou même simplement exposées nulle part ailleurs que devant les disciples, ce qui est la caractéristique la plus répandue de l'opinion, celle dont on fait les propos de salon.

      Au contraire, l'esprit critique ne cultive pas l'art du fragment, de la pensée ou de l'aphorisme. Il s'interroge, lorsqu'il interroge. Et il propose des réponses. De même, le critique, le polémiste n'a jamais de disciples pour la bonne raison qu'il n'a rien à partager avec des initiés. Bien plus, l'esprit critique ne comprend pas que ses contemporains ne partagent pas tout de suite les sentiments et les idées qui, espère-t-il, seront demain ceux du plus grand nombre. Un universitaire n'est pas seulement un savant : précisément parce qu'il travaille à renouveler les connaissances tout autant qu'à en acquérir de nouvelles, il peut, il doit être choqué de l'erreur, de l'ignorance et de l'imposture.

      Polémique : défense, explication, débat et protestation. C'est le fondement de la recherche et de l'enseignement. Vous aimez la polémique ? Vous aimez la critique et vous porter parfois à la défense du bon sens ? La controverse, la contestation ? Figurez-vous que c'est mon métier : universitaire.


TdM -- TGdM