Comme on le voit, il s'agit bien d'un
accusé de
réception en réponse à une lettre qui
présente
succinctement un petit mémoire protestant contre l'attitude
du FNC. J'ai
aussi accusé réception de l'accusé de
réception, en
espérant que les choses n'en restent pas là. Comme
j'étais
conciliant et diplomate, je pouvais espérer une
réaction de la
direction, peut-être en ces termes: « Bonjour
monsieur le
professeur, — Jacques Méthé nous transmet
l'avis de notre
Conseil d'administration. Après avoir pris connaissance de
votre lettre du
16 novembre 2019 et de votre mémoire intitulé
« Montréal », j'ai l'honneur de vous
dire qu'en effet,
l'évaluation des Reconnaissances adoptées par
la ville de
Montréal ne relèvent pas de notre mission, comme vous
l'a
déjà écrit monsieur Méthé le 19
novembre
dernier. En conséquence, bien entendu, ces
Acknoledgements ne seront plus
jamais lus au FNC. Je tiens à vous remercier
chaleureusement, monsieur le
professeur, d'avoir pris la peine d'intervenir sur cette question
qui relève
manifestement de votre compétence et je le fais en mon nom
personnel et au
nom de tous les membres du CA de notre festival (qui, je vous le
précise,
ignoraient tous la directive que j'avais donnée
intempestivement, je le
reconnais, à mon équipe). Avec l'expression de mes
meilleurs
sentiments, — Signé, NNGGDD ».
Évidemment, près de deux ans
plus tard, à
la suite de deux interventions, la situation n'est plus du tout la
même. Mes
interventions de novembre 2018 et de janvier 2019 s'adressaient,
je le répète, à des organismes, des
autorités et des
personnes qui
avaient la possibilité d'intervenir, notamment, excellent
exemple, au
FNC, pour que la politique inadéquate change. Il suit que
la
polémique, c'est-à-dire les répliques aux
insanités,
doit passer en mode pamphlétaire. Bien entendu, toute
personne le
moindrement intelligente pouvait comprendre le fond (muet) de mes
répliques
polémiques, telles qu'on les lira ci-dessous. Maintenant,
ce sera
explicite.
En effet, la question qui s'est toujours
posée concerne
les causes, oui, les « pourquoi ». Pourquoi
donc la ville de
Montréal et les Universités du Québec
ont-elles adopté
ces stupides Acknowledgements ? Pourquoi ?
Très simple :
cela leur a été imposé par des maudits
Sauvages. Mais
pourquoi donc le Festival du nouveau cinéma insulte-t-il les
Montréalais et tous les Québécois avec ces
grossiers et
obséquieux Acknowledgements ? Pourquoi ?
Très
simple : cela est l'oeuvre incontestable de péteux de
broue de maudits
Français, très fiers de servir les
« Indiens (du
Canada ou des U.S.A) » tels qu'ils les ont toujours
connus
sans en avoir
jamais rencontré un seul (dessinés par Morris dans
ses Lucky
Luke).
Les maudits Français
Des maudits Français ? Mais on n'en
voit plus au
Québec. C'était dans les années 1965 et 1975.
Généralement des
« coopérants » qui
venaient ici faire l'équivalent de leur service militaire,
dans les
universités et les ministères. Avec de nombreux
autres qui
s'engageaient alors dans la restauration. Et tout le monde
connaît le
comportement d'un garçon de café parisien... Ils
débarquaient
ici exactement comme les Français se rendaient aux colonies,
cinq ou dix ans
auparavant, en Tunisie, surtout en Algérie, où l'on
sait ce que cela
a produit. Bref, c'est simple, un maudit Français,
c'était un
Français qui se comportait au Québec exactement comme
s'il
était dans une colonie française. Et tous
méritaient bien
leur surnom. Sauf que cela ne se trouve plus aujourd'hui. On peut
certes s'amuser
à taquiner quelques personnes françaises ou d'origine
française, mais c'est un plaisir gratuit, car il est
évident qu'ils
sont chez nous, au Québec, exactement comme nous sommes chez
eux, en
France.
Pourtant, Zoé Protat ne
déclare-t-elle pas, dans
une grande salle de cinéma de Montréal, remplie de
Montréalais, que le cinéma où on se trouve,
elle s'en excuse,
se trouve sur un territoire qui a été volé aux
Indiens ?
Pourquoi ? Certes, elle est Montréalaise, elle a fait
toutes ses
études à Montréal et détient un
mémoire de
maîtrise de l'Université de Montréal dont j'ai
pris
connaissance et que je me promets de lire (il porte sur les hommes
de fer et de
marbre d'Andrej Wajda, 2017). Oui, mais son père, lui,
était
français. Y aurait-il là un atavisme inconscient qui
ferait de
Zoé Protat un renouvellement de l'ancien comportement de la
race
française maudite ? Cela me paraît bien peu
probable, car
François Protat (1945-2019) a bien fait ses études
à
l'École de photographie de Paris, mais il n'a pas seulement
choisi le
Québec en 1969, car le Québec l'a choisi pour en
faire l'un de ses
deux plus grands « cameramen »
(c'est-à-dire directeurs
de la photographie cinématographique), à la suite de
Michel Brault.
Par ailleurs, il faut ajouter que « maudit
Français »,
c'est masculin. On peut tout de même imaginer que la fille
d'un
Français d'origine puisse se plier facilement aux diktats
d'un patron
français. Car elle n'est pas la seule, à la
dernière
édition du FNC, à nous avoir seriné le bel
Acknowledgement,
puisque je l'ai entendu lire avant elle par une jeune
présentatrice (sans
me donner la peine de protester, tellement il était
évident que la
pauvre fille obéissait aux directives de la direction, avec
un petit papier
tremblotant qu'elle lisait difficilement).
Car pour être un maudit Français, le bon
sens le dit,
il faut d'abord être un Français. Et tel est bien le
cas de Nicolas
Girard Deltruc. Il est né en 1976 dans la ville d'Algrange,
au nord-est de
la France (disons en Alsace, près du Luxembourg). C'est
là qu'il a
fait son lycée (1992-1995) au très chic et catholique
lycée
Saint-Vincent-de-Paul. Il a fait ensuite ses études
supérieures
à l'École nationale des Beaux-Arts de Nancy
(1995-1999). Il commence
sa carrière... aux colonies. À Libreville au Gabon.
Il est
assistant des producteurs de Dix d'Abbas Kiarostami (Iran,
2002). Il fera des
bouts d'études en cinéma et en gestion
(« managment ») à Québec (1998 et
2004). C'est
à partir d'une expérience au Festival des films de
Toronto qu'il
arrive au Festival du nouveau cinéma de Montréal en
2005 et il en
devient le directeur à la toute fin de l'année
suivante. En
pratique, il dirige le festival depuis 2007. Peu nous importe ici
ses aventures
très médiatisées et donc fort connues (et
pourtant assez
nébuleuses) au cours des dix ou quinze ans qui suivent. Le
résultat
est simple, clair et net : en 2018, puis en 2019, nous avons
un maudit
Français à la tête du FNC, capable de dire et
de faire dire aux
Montréalais que son festival se déroule sur une terre
qu'ils ont
volée. C'était d'abord un territoire ancestral
volé aux
Iroquois (2018), ensuite (2019) un « territoire
autochtone non
cédé ».
La ville de Montréal et les
universités du
Québec ont évidemment subi des pressions pour adopter
les fameux
Acknowledgements. Cela n'est évidemment pas le cas
d'un festiveau !
Alors pourquoi et comment cela s'est-il fait ? Il n'y a pas
d'autres
explications possibles : c'est le fait de maudits
Français, d'un
Nicolas Girard Deltruc qui se croit ici aux colonies et demande
à ses
troupes de bien vouloir faire la leçon aux autochtones (tous
les
Québécois) au profit de ses gentils Indiens, pour
cause de
« réconciliation » (sic). La
vérité, c'est
que le maudit Français est la marionnette de maudits
Sauvages, des
ventriloques qui n'en espéraient pas tant.
Les maudits Sauvages
Il ne fait aucun doute que
l'Acknowledgement a
été imposé à l'administration de la
ville de
Montréal et, plus largement, aux universités, par les
Iroquois de la
région de Montréal, des activistes de Kahnawake et de
Kanesetake,
avec leurs nombreux sympathisants ignorants et irresponsables. On
en trouvera
quelques-uns identifiés plus bas. Certes, l'administration
de la mairesse
Valérie Plante a dû reculer un petit peu, devant
l'Acknowledgement
« iroquois » du maire Denis Coderre, qui
n'avait manifestement
aucun sens ni bon sens, faisant des Iroquois des anciens occupants
de l'île,
qu'ils n'ont jamais, absolument jamais habitée. On aura
remplacé les
Iroquois par... des autochtones. On verra combien ce compromis est
ridicule, les
Hochelagois, avec lesquels Cartier avaient fait alliance, ayant
été
massacrés par les Iroquois, comme tous les Iroquoiens du
Saint-Laurent.
L'île de Montréal n'aura été
occupée par aucune
nation autochtone avant la fondation de Ville-Marie.
Comment expliquer que les Iroquois de la
région de
Montréal aient pensé nous imposer ces
Acknowledgements ? Il
n'y a qu'une explication et on en subit continuellement les ravages
dans tout le
Québec. Les Iroquois sont des Indiens du Canada. Tous les
Autochtones,
tous les Amérindiens du Québec sont tout
naturellement
québécois. Et comme tous les
Québécois, ils peuvent
bien être indépendantistes ou
fédéralistes, mais ce ne
sont pas des « Indiens du Canada ». Les Cris
de l'Est, les
Innus, les Naskapis, les Wendats, les Attikameks, les Algonquins,
etc., ne
prendront jamais leurs concitoyens du Québec en otage pour
régler des
problèmes canadiens. Pas même pour régler
leurs
problèmes au Québec ! La terrible
« guerre du
saumon » (1981-1982), que les Micmac (Restigouche) et
surtout les Innus
ont finalement gagnée, n'a jamais paralysé le
Québec.
Les Acknowledgements sont significatifs
de ce comportement
qu'on doit qualifier de sauvage, s'agissant du mépris
manifesté
systématiquement à l'égard des citoyens du
Québec. Et,
bien entendu, je ne parle pas des Iroquois absolument, car il faut
garder le sens
des proportions. Mais je ne parle pas non plus seulement des
activistes iroquois
fanatiques improvisés. Dès la moindre crise, on ne
trouve plus de
responsables à Kahnawake et à Kanesetake, mais
beaucoup
d'irresponsables qu'on ne peut qualifier autrement que de
« maudits
Sauvages », qui refusent de répondre de leurs
actes devant les
journalistes, la presse étant pourtant le nerf de l'action
responsable.
Jamais les dirigeants iroquois n'ont étudié
sérieusement cette
question qui peut toujours finir par
dégénérer, comme dans le
cas de la crise d'Oka, en criminalité (Iroquois
armés, masqués
et, bien entendu, anonymes). Le Québec doit prendre le
contrôle de
ces villages iroquois, comme c'est le cas de toutes les
municipalités du
Québec, car le gouvernement du Canada est manifestement
incapable d'agir de
manière responsable avec sa fameuse « Loi sur les
Indiens ».
Tout cela est patent de la crise d'Oka (1990)
à la
crise ferroviaire (2020). Dans ce dernier cas, le
phénomène est
d'autant plus évident que les Iroquois eux-mêmes (avec
les Micmacs de
la Gaspésie) ont été bernés par de
petits groupes
d'activistes de l'ouest du Canada, dans le cadre d'une situation
complexe où
ni eux ni personne ne pouvaient rien comprendre. Tout cela se
passait en
Colombie-Britannique (bien loin de Montréal !)
où s'opposaient
six chefs de villages (élus) du territoire Wet'suwet'en et
un groupe
indéterminé de « chefs
héréditaires ». Les élus des
réserves
avaient négocié une entente avec la compagnie Coastal
Gazlink dont
le gazoduc traversera leur territoire (puits et aqueducs,
réaménagement d'écoles, infrastructures
diverses,
investissement sociaux, notamment auprès des adolescents).
La contestation
des chefs responsables du territoire (et non des villages) durait
depuis de
nombreuses années et, manifestement, il s'agissait
d'empêcher la
construction du gazoduc. Et c'est ce que tout le monde et les
Iroquois avaient
compris. Erreur ! Les chefs héréditaires se
livraient tout
bonnement à une guéguerre de pouvoir qui se
terminera, après
un mois de perturbation, par une entente de deux pages et demie
(voyez le texte de
l'accord du 29 février 2020, à la suite de l'entente
et du
communiqué de presse du 27 février, sur le site du
gouvernement
fédéral) entre le Canada, la Colombie-Britannique
et... un groupe
d'autochtones de Wet'suwet'en à déterminer !
Les
« négociations » se poursuivront au
cours des six ou
douze prochains mois. Voyons donc ! La désignation
des porte-paroles
de Wet'suwet'en ne se réalisera pas avant une
décennie, bien
entendu.
Vous verrez que
l'arrêt de la
construction du gazoduc, le fameux pipeline de la Costal Gaslink,
ne fait pas
partie de l'entente. Au contraire. Sa construction se poursuit.
D'ailleurs, le
13 mai 2020 la compagnie a obtenu un prêt de 500 millions de
dollars
afin de poursuivre ses travaux dans le contexte de
l'épidémie
du CoronaVirus.
Au Québec, les Iroquois de
Montréal et de
Tyendinaga (à Belleville en Ontario), comme les Micmacs de
la
Gaspésie, ont paralysé pour rien, sans aucun profit
pour personne,
toutes les liaisons ferroviaires, bloquant le trajet
Ottawa-Montréal, les
trains de banlieue de Montréal et la circulation jusqu'en
Gaspésie.
Les dommages ont été considérables, des
situations d'urgence
ont été crées et des familles ont perdu leurs
sources de
revenus. Durant un mois.
Et cela n'a qu'une explication : les Iroquois
ne sont pas
québécois, ce sont des Indiens du Canada, qui ont le
plus parfait
mépris pour leurs concitoyens. Cela se voit dans leur
tactique de blocage
systématique des voies de communication pour régler
leur
problème. Cela se voit aussi dans le tout simple fait
d'insulter les
Montréalais et tous les Québécois avec ces
insipides
acknowledgements on ne peut plus canadian.
II — « Territorial
acknowledgement
»
Considérons d'abord les
déclarations symboliques
de trois universités sur l'île de Montréal qui
ont
adopté de telles « Reconnaissances ».
On oubliera donc
Bishop's University de Sherbrooke et l'Université Laval de
Québec,
celle-là se déclarant en territoire abénaki et
wabénaki
(sic), et celle-ci, évidemment en territoire ancestral innu,
se
déclarant en territoire huron ! Dans ce dernier cas, on
assiste
à une amusante inversion du titre de l'ouvrage
célèbre, le
Pays renversé, puisque c'est Québec qui
accueillera sur son
territoire, en 1650, une importante communauté de Hurons
chrétiens,
ce qui forme aujourd'hui la ville de Lorette (Loretteville qui est
maintenant un
quartier de la ville de Québec). Ces aberrations, comme
celles qu'on lira
tout au long du présent exposé, s'expliquent du
simple fait que ces
Reconnaissances sont, dans leur esprit comme dans la leurs
formulations, de
conception exclusivement anglo-saxonne. C'est la Canadian
Association of
University Teachers qui en fait la promotion au Canada. Le
résultat, on va
le voir, est non seulement totalement étranger à la
culture
québécoise, mais insultant pour tous les
Québécois, et
particulièrement humiliant pour nos communautés
autochtones.
À Montréal, on a d'abord la
déclaration
de l'Université Concordia qui doit être située,
en fait,
à « Montreal », au Canada, et celle
édulcorée, et d'autant plus comique, de
l'Université de
Montréal, au Québec. Celle de l'Université
McGill
apparaît finalement comme un tout petit fion. Comme on va le
voir, ces
déclarations intempestives manifestent une totale ignorance
de l'histoire
et de la culture du Québec, qui se sont
édifiées depuis la
Nouvelle-France. La colonie française s'est mise en place
grâce
à nos alliés, qui ont été, dans
l'ordre, les Micmacs,
les Innus, les Algonquins, les Outaouais, les Népissings,
avec ensuite une
très longue chaîne d'alliances, dont le maillon le
plus important aura
été, jusqu'en 1650, les Iroquoiens des Grands Lacs,
d'abord et avant
tout les Hurons.
Les notables universitaires qui ont
rédigé et
fait adopter ces déclarations ne sauront jamais en
répondre,
tellement elles sont inqualifiables. Non seulement elles
manifestent une grave
méconnaissance de l'histoire et de l'ethno-anthropologie des
Amérindiens nomades du nord-est de l'Amérique, comme
de l'histoire
du Québec, de la Nouvelle-France à nos jours, mais
elles sont
également un grave symptôme de mépris à
l'égard
des Québécois, les Amérindiens et les
Canadiens de Nouvelle-France,
puis du Canada français du nord-est de
l'Amérique. Tout cela
frise le racisme. D'abord à l'égard des
Montréalais, et donc
de tous les Québécois, dont on dénigre ainsi
haineusement
l'histoire vivante et prestigieuse de leur métropole, pour
en faire
stupidement, faussement et anachroniquement un
« territoire autochtone
non cédé », car nous devons être
« conscients des injustices dont est parsemée
l'histoire coloniale
de ce lieu » (sottise textuelle); ensuite, surtout,
profond
mépris à l'égard de tous les
Amérindiens du
Québec qu'on infantilise, méprise et ridiculise avec
ces
« Reconnaissances ».
Mais voici les textes incriminés.
Territorial acknowledgement, Concordia University, Montreal,
Canada
I/We would like to begin by acknowledging
that Concordia
University is located on unceded Indigenous lands. The
Kanien'kehá:ka Nation
is recognized as the custodians of the lands and waters on which we
gather today.
Tiohtiá:ke/Montreal is historically known as a gathering
place for many
First Nations. Today, it is home to a diverse population of
Indigenous and other
peoples. We respect the continued connections with the past,
present and future in
our ongoing relationships with Indigenous and other peoples within
the Montreal
community.
—— Traduction de l'Université :
J'aimerais / Nous aimerions commencer par
reconnaître
que l'Université Concordia est située en territoire
autochtone,
lequel n'a jamais été cédé. Je
reconnais/Nous
reconnaissons la nation Kanien'kehá:ka comme gardienne des
terres et des
eaux sur lesquelles nous nous réunissons aujourd'hui.
Tiohtiá:ke /
Montréal est historiquement connu comme un lieu de
rassemblement pour de
nombreuses Premières Nations, et aujourd'hui, une population
autochtone
diversifiée, ainsi que d'autres peuples, y résident.
C'est dans le
respect des liens avec le passé, le présent et
l'avenir que nous
reconnaissons les relations continues entre les Peuples Autochtones
et autres
personnes de la communauté montréalaise.
Ce texte a été composé
par Shiann
Wahéhshon Whitebean, Iroquoise de la ville de Kanawake,
étudiante au
doctorat à l'Université Concordia, pour le compte du
Groupe directeur
sur les devenirs autochtones. Il est daté du 16
février 2017. Cette
Déclaration est accompagnée, sur le site internet de
l'Université, d'un « Énoncé de
reconnaissance
territoriale de l'Université Concordia, située
à
Tiohtiá:ke (Montréal) », du Groupe
directeur sur les
devenirs autochtones. Ce salmigondis de niaises faussetés
est donc une
publication officielle par l'Université.
Déclaration de reconnaissance des territoires
autochtones,
Université de Montréal, Québec
L'Université de Montréal est
située
là où, bien avant l'établissement des
Français,
différents peuples autochtones ont interagi les uns avec les
autres. Nous
souhaitons rendre hommage à ces peuples autochtones,
à leurs
descendants, ainsi qu'à l'esprit de fraternité qui a
présidé à la signature en 1701 de la Grande
Paix de
Montréal, traité de paix fondateur de rapports
pacifiques durables
entre la France, ses alliés autochtones et la
Confédération
haudenosauni (prononciation: o-di-no-sho-ni). L'esprit de
fraternité
à l'origine de ce traité est un modèle pour
notre
communauté universitaire.
Ce texte, sous la supervision des professeurs
Jean Leclair et
Michel Martin, Faculté de droit, est de Marie-Pierre
Bousquet, du
Département d'anthropologie. Il a été
adopté par le
Conseil de l'Université le 28 mars 2018. J'imagine mal mes
collègues
Rémi Savard ou Normand Clermont rédiger une telle
déclaration
pour remplacer celle de Concordia, qui devait au contraire
être
dénoncée, surtout d'un point de vue juridique.
Montréal, un
territoire « non cédé » ?
L'édulcoration de déclarations totalement fausses est
gravement
incriminante de la part d'universitaires.
Traditional Territories
McGill University is located on land which
has long served
as a site of meeting and exchange amongst Indigenous peoples,
including the
Haudenosaunee [les Iroquois] and Anishinabeg [des Algonquins qui se
donnent
aujourd'hui ce nom] nations. McGill honours, recognizes and
respects these nations
as the traditional stewards of the lands and waters on which we
meet today.
Les Iroquois, ni aucun Algonquin n'ont jamais
sympathisés sur l'île de Montréal. Une telle
affirmation est
ridicule. Déclarer qu'on se rencontre aujourd'hui, à
McGill
University, sur la terre bénie où ces ennemis de
toujours se seraient
embrassés est d'une rare stupidité, d'un
inqualifiable
infantilisme.
Ce texte de l'Université McGill n'est
ni signé
ni daté. En code source html, son copyright est de 2019.
Je cite :
« For many Indigenous peoples in Canada [je souligne et
répète, in Canada], and increasingly in
broader Canadian society,
traditional territory acnowledgements are an important cultural
protocol practiced
at ceremonial events as a way to acnowledge and honour Indegenous
peoples'connections to their ancestral lands ». Pour un
Montréalais, pour un Québécois, ce commentaire
parle de lui-même.
Il s'agit d'un exposé anglo-saxon, canadian.
À
remarquer que le site qui a servi de rencontre (sic),
Montréal, a
été, en fait, un lieu de passage dont les
données
archéologiques datent de plus d'un millénaire,
à ce que je
sache. On n'a jamais pu localiser le site d'Hochelaga, tellement
il a si bien
été rasé par les Iroquois (s'agissant pourtant
d'un important
village fortifié d'Iroquoiens sédentaires).
Revenons à la Déclaration de
l'Université
de Montréal. Bien qu'il s'agisse encore d'une
édulcoration du texte
adopté par l'Université Concordia, cette
Déclaration n'en est
pas moins totalement fausse. La Paix de Montréal n'a jamais
été un événement
« fondateur » de
« rapports pacifiques durables » entre les
Iroquois
(prononciation : [irþkwa]). Et il n'y a aucune
« fraternité » là-dedans,
s'agissant du texte
juridique d'un traité de paix entre la colonie
française et ses
alliés des Grands Lacs, avec les Iroquois.
Remarquons d'abord que la Nouvelle-France,
puis le
Québec, a connu des dizaines, des centaines de
traités avec les
nations amérindiennes. Or, il y a quelque chose d'un peu
ridicule à
ériger la Grande Paix de 1701 en modèle de
fraternité... avec
les Iroquois. D'abord, si dans un formidable traité les
alliés de
la Nouvelle-France forcent leurs ennemis à enterrer la hache
de guerre,
c'est que guerres il y avait depuis longtemps; ensuite, la Grande
Paix n'est qu'un
épisode dans la diplomatie des alliés de la
Nouvelle-France, puisque
tous se retrouvent l'année suivante, 1702, dans une nouvelle
situation
diplomatique, à l'occasion de la seconde guerre
intercoloniale en
Amérique du nord. Les relations avec l'Iroquoisie vont se
développer
dès lors dans un tout autre contexte. Mais nos notables
universitaires ont
retenu ce « symbole », emprunté au
document de
Concordia, simplement à cause du nom de lieu de ce
traité, la Paix
de Montréal. Avec l'idée de paix, de pacifisme, bien
entendu. Une
façon toute simple d'effacer l'histoire et d'en inventer une
autre, avec un
angélisme sans aucun rapport avec la réalité
historique et
totalement décroché de notre situation historique
actuelle.
Dans le cas de la Reconnaissance de Concordia,
la
déclaration est appuyée par un exposé qu'on
n'accepterait pas,
au niveau secondaire d'un collège du Québec, sans
renvoyer
l'élève à ses cours d'histoire du Canada.
Tout le texte est
pensé dans la perspective du colonialisme anglo-saxon en
Amérique du
Nord, sans aucun rapport avec l'histoire du Québec. Certes,
l'histoire de
la colonie française, dans ses relations avec les nomades du
nord-est du
continent, n'aura pas été de tout repos, c'est le
moins que l'on
puisse dire. Mais est-ce qu'on ne pourrait pas se concentrer sur
ces faits-là
et s'en contenter, sans y ajouter des problèmes
créés, ailleurs, par la colonisation
anglo-saxonne ? Un exemple
simple s'impose ici. En Nouvelle-Angleterre, puis dans tous les
États-Unis,
comme au Canada, le principal rapport avec les Amérindiens
est le
ségrégationnisme radical. On achète aux
Indiens le territoire
sur lequel on s'établit; les Indiens vivent de leur
côté, le
plus loin possible (sauf pour les visites très
surveillées aux
magasins de traite). Les relations s'arrêtent là,
à
l'exception de l'engagement des Amérindiens comme
mercenaires (car on ne
parle pas ici d'alliés). Bref, les territoires anglo-saxons
sont
réputés avoir été cédés,
puisqu'ils ont
été achetés; si tel n'est pas le cas, le
territoire en
question entre dans la nombreuse et triste catégorie des
territoires
« non cédés ». Au Québec,
cela n'a aucun
sens. Tout le monde sait, depuis la Nouvelle-France, qu'avec les
Amérindiens, on doit négocier, qu'on a toujours
négocié
et que ce sera toujours le cas avec les communautés
autochtones.
Une autre caractéristique du document
d'appui de
Concordia à sa Reconnaissance, c'est son angélisme.
Et sa vision
folklorique de la culture amérindienne. Faire des
déclarations
très officielles où les autochtones sont
présentés
comme des « gardiens du savoir », des
« gardiens des
terres et des eaux », avec « fumigation de
tabac »,
tout cela est amusant. On parle amérindien à peu
près comme
les petites filles parlent bébé lorsqu'elles jouent
à la
poupée. Non, même à Montréal les deux
communautés d'origine iroquoise ne sont pas de cette
trempette. Ils ont
certes moins de revendications que les Amérindiens du Nord
et du Grand Nord,
mais ils ont des demandes très précises que nos
notables
universitaires édulcorent avec des affirmations symboliques
totalement
fausses. Voire des parades de collation des grades. À
Kahnawake, le
Conseil de bande demande en vain de reconstituer sa police
municipale; à
Kahnasetake, ce que le Conseil demande, c'est que le territoire de
la
communauté soit réorganisé et
étendu.
Cela dit, on trouvera dénoncé
ci-dessous les
absurdités qui découlent du document d'accompagnement
de Concordia.
Ce sont en effet ces sornettes et courbettes qui sont reprises, le
plus
sérieusement du monde, par nos notables. Où ?
Après nos
universités et l'Hôtel de ville de Montréal, on
remet ça
dans nos salles de cinéma ! On ne le croira pas, mais
c'est bien en
ouverture de projections de film au Festival du nouveau
cinéma qu'on nous
serine que Montréal se trouve sur une terre usurpée.
Alors passons
à ces notables cinématographiques.
III — La pastorale des notables du
Festival
du nouveau
cinéma
C'est l'année dernière, le 11
octobre 2018,
à la Cinémathèque, que j'ai entendu pour la
première
fois le président du Festival du nouveau cinéma (FNC)
nous lire un
texte affirmant que le festival se déroulait sur une terre
iroquoise (qu'il
désignait sous le nom de Haudenosaunee, mot qu'il
s'appropriait pour
l'occasion) qui n'avait pas été
cédée.
C'était avant la projection des films Québec,
créateur de
mouvement, sur la danse québécoise au
cinéma, et le reportage
de Raymond St-Jean sur Louise Lecavalier, deux films qui n'ont
aucun rapport avec
les Amérindiens. Je suis alors intervenu pour demander
à Nicolas
Girard Deltruc qui était l'auteur de ce texte et d'où
il venait. Il
n'en savait rien. J'ai alors expliqué en quelque mots que
ces affirmations
étaient totalement fausses, l'île de Montréal
n'ayant jamais
été une terre iroquoise, ni agniée ou mohawk
(Kahnawake,
Kanien'kehaka). Il a répondu qu'il allait se renseigner.
Je l'ai moi-même
renseigné par courrier électronique, le
lendemain 12
octobre; il m'a répondu de manière lénifiante
(comme on le
verra ci-dessous) cinq jours plus tard; ce à quoi j'ai
immédiatement
répliqué, réplique restée sans
réponse. J'avais
en effet découvert l'origine du texte : un torchon lu
à
l'hôtel de ville de Montréal sous l'administration de
Denis Coderre.
L'administration de Valérie Plante a depuis
généralisé le texte, Montréal
devenant un
« territoire autochtone non
cédé ». Et c'est
bien la formule que vient d'utiliser la vice-présidente du
FNC, Zoé
Protat, directrice de la programmation, avant la projection de
Blood Quantum de
Jeff Barnaby, présenté au Quartier Latin, jeudi 17
octobre 2019
(l'histoire est censée se passer au village de Red Crow,
chez les Micmacs
de Gaspésie, bien loin de Montréal). Bref, la
déclaration est
passée des notables de la ville à ceux du FNC.
Il s'agit d'une prière, d'un Acte de
contrition, que
l'on fait au nom des Montréalais. On s'excuse très
officiellement : « Le FNC reconnaît que son
festival se
déroule à Montréal sur une terre
amérindienne qui n'a
pas été cédée ». Cette
déclaration
manifeste une méconnaissance des faits historiques et
ethno-anthropologiques.
Du simple et élémentaire point
de vue de
l'histoire événementielle, jamais l'île de
Montréal n'a
été un territoire iroquois. Jacques Cartier s'est
rendu à
Hochelaga en 1535 et a fait alliance avec les Iroquoiens qui
habitaient au pied de
la montagne. Ces Amérindiens, nos alliés, seront par
la suite
attaqués, décimés par les Iroquois, qui en
traîneront
un grand nombre en captivité (où quelques-uns seront
suppliciés, avant que les autres ne soient adoptés);
ceux qui ont
réussi à s'enfuir ont trouvé refuge chez les
Iroquoiens des
Grands Lacs, leurs alliés et bientôt les nôtres,
notamment chez
les Hurons. En effet, le vocabulaire iroquoien enregistré
par Cartier dans
ses relations se retrouve chez les Hurons, jamais chez les Iroquois
où les
captifs d'Hochelaga et de la vallée du Saint-Laurent ont
dû adopter
la langue de leurs maîtres. Dès ce moment,
l'île de
Montréal est interdite de séjour sous la pression des
Iroquois, qui
ne l'habiteront jamais. Ce sont des sédentaires, bien
installés sur
leur terre, à Ossernonon, et tout au sud du lac Ontario,
où leurs
captifs viennent renforcer leur situation
socio-économique.
En effet, la dévastation d'Hochelaga
correspond
à une très vaste opération militaire qui s'est
déroulée sur plusieurs décennies. Au moment
où les
Français reprennent pied dans la vallée du
Saint-Laurent, en 1603,
1608 et 1632, tous les Iroquoiens ont disparu. Les historiens, qui
ont peur des
Iroquois encore aujourd'hui, s'amusent à « se
perdre en
conjoncture » à ce sujet. Ces Iroquoiens auraient
été victimes d'épidémies ?
Impossible, car les
épidémies viennent des Européens et aucun
n'habite la
vallée du Saint-Laurent durant un siècle; en
revanche, les Iroquois
fréquentent les Hollandais, puis les Anglais, d'où de
très
nombreuses épidémies, et par conséquent les
razzias de
captifs, comme ceux d'Hochelaga. Les Iroquoiens auraient
quitté leur terre
pour des raisons climatiques, soit un refroidissement qui aurait
raccourci la
période propre à la culture de la terre ? Non,
puisque encore
aujourd'hui on cultive la même chose à Québec
et à
Montréal que ce que les Iroquoiens y produisaient. La cause
est toute
simple et Champlain l'a tout de suite désignée :
les Iroquois.
Ce sont des guerriers redoutables qui agissent alors, comme ils le
feront toujours,
selon la méthode classique d'une pierre deux coups, soit en
renouvelant et
en augmentant constamment leur population avec des captifs
iroquoiens qu'ils
peuvent intégrer facilement et, du même coup, en
contrôlant tout
le commerce des marchandises européennes du nord-est de
l'Amérique.
Il faudra la grande alliance des Algonquins, des Hurons et des
Français pour
briser ce monopole absolu, sans jamais pouvoir
l'éliminer.
Et c'est ainsi qu'on en vient aux affirmations
saugrenues d'un
Nicolas Girard Deltruc, qui s'improvise historien (message
électronique du
17 octobre 2018). « Aucun traité n'atteste la
cession du
territoire de Montréal à la France. Il s'agit donc
en effet d'un
territoire non-cédé ». Textuel.
« Que
l'île ait été inoccupée [durant un
siècle !]
par les populations autochtones quand Maisonneuve vient y fonder
une colonie ne
créée pas pour autant une situation de "terra nulla",
concepts
colonial aujourd'hui en désuétude » !
D'abord, nous ne
sommes pas « aujourd'hui », mais en
Nouvelle-France en 1642.
Ensuite, a-t-on jamais lu un argument aussi peu... ?
Fonder Montréal
sur une île inoccupée durant un siècle à
cause de la
guérilla iroquoise, cette fondation est une
usurpation ? Ah ! bon.
« Sur le plan historique, il est indéniable que le
territoire
montréalais a été séculairement
habité et
cultivé par des peuples de la Maison longue ».
Une telle
affirmation évalue d'elle-même, évidemment, les
connaissances
historiques de son auteur, car il faut un notable pour donner dans
ces affirmations
inqualifiables : « Sur le plan historique, il est
indéniable
que... ». Le notable devrait retourner à la
petite école,
à son cours d'histoire du Canada. « Les
communautés
mohawks de proximité [Kahnawake] sont un lien vivant avec
cette grande
tradition haudenosaunee à laquelle Montréal est
intimement
lié » ! Sortez les violons. Tu
parles ! Tu causes, tu
causes, c'est tout ce que tu sais faire (le perroquet Laverdure,
Queneau, Zazie).
« C'est donc un geste de diplomatie [sic] et de
réconciliation
[re-sic] qui est posé en reconnaissant cet état de
fait ».
Le FNC doit poser des « gestes » ? Et quel
« état de fait » ? Sans compter
l'inversion du
raisonnement : c'est pour cause de diplomatie et de
réconciliation
qu'on justifie la proclamation de telles sottises.
« Qu'il y ait
débat entre tradition orale autochtone et histoire
officielle, cela concerne
les spécialistes ». Ah ! bon. Mais quel
débat ?
Il n'y a pas d'histoire « officielle » de la
Nouvelle-France
en ce qui concerne l'occupation des territoires au Québec.
L'historiographie de la Nouvelle-France connaît au moins
trois strates
documentaires. (1) Les sources écrites, narratives et
administratives; (2)
les sources orales, très peu nombreuses, qu'on trouve dans
les sources
narratives, les relations de voyage; par exemple, j'y tiens
beaucoup, la tradition
amérindienne enregistre l'arrivée des Blancs, avec
leurs fabuleux
« canots de bois » (plusieurs récits
oraux en ont
été enregistrés); aussi nous nomment-ils
encore aujourd'hui
mishtikushu, soit à peu près
« champions à
travailler le bois »; fils d'ébéniste,
petit-fils de
menuisier, toujours habile avec ma tronçonneuse, mon
égoïne et
ma varlope, pour ne pas dire mon « couteau
croche », je suis
très honoré d'être ainsi désigné
par des
spécialistes depuis toujours dans le travail du bois; notre
nom nous vient
de la tradition orale et se trouve enregistré au lexique
innu; (3) et les
sources orales sont suivies des données
archéologiques.
Ici, attention. L'archéologie montre
que les
Iroquoiens du Saint-Laurent occupent le territoire depuis plusieurs
siècles
avant le séjour de Jacques Cartier. Les Iroquois n'ont rien
à faire
ici, les poteries de nos Iroquoiens n'ayant aucun rapport avec les
leurs. Mais
notre notable, lui, trouve sur l'internet une toute autre histoire,
une
légende urbaine qu'il présente comme une
« tradition
orale » ! Il s'agit d'une rumeur de Kahnawake,
où quelques
dirigeants propagandistes de leur bonne cause confondent depuis
vingt ou trente ans
les Iroquoiens du Saint-Laurent avec... leurs ancêtres.
Justement, c'est ainsi qu'on en vient à
l'affaire de
la non-cession de Montréal, qui est une absurdité
ethno-anthropologique.
Personne ne pourra jamais nommer une seule terre,
un seul
territoire, qui aura été
« cédé »
par des Amérindiens de Nouvelle-France. Il faut rappeler
d'abord que la
formule nous vient du Canada et des États-Unis où, en
effet, on
achète les terres des Amérindiens. En
Nouvelle-France, les
Canadiens vivent avec (oui, « avec ») des
nomades et en
intelligence avec eux, en bonne intelligence, par la force des
choses. Tout a
toujours été négocié, accords et
traités qui ne
sont pas sur papier, mais qui n'en sont pas moins effectifs. Dans
le grand Conseil
de Tadoussac, en 1603, à la demande des Innus, Champlain
promet d'ouvrir une
Habitation à Québec, ce qu'il fera en 1608 et ce qui
deviendra la
« fondation » de Québec.
Évidemment, Innus et
Français y trouvent leur compte, en particulier sur un plan
essentiel,
l'ordre militaire. Tous ont avantage à s'organiser ensemble
pour se
prémunir contre les redoutables guerriers iroquois. Et
c'est ainsi que les
Habitations successives se feront à la demande et avec
l'accord des
Amérindiens : Tadoussac, Québec,
Trois-Rivières et
Sorel, puis... Montréal !
Lorsque Montréal est fondée en
1642, Maisonneuve
et Jeanne Mance ont évidemment l'accord de tous les
alliés de la
colonie. Mais ce sont surtout les Algonquins, les Outaouais, les
Népissings, les Hurons et les Pétuns qui demandent
aux
Français de sécuriser la longue et essentielle route
de traite qui
conduit de la Huronie, avec ses Algonquins supérieurs,
à Midland,
jusqu'à Trois-Rivières, où se déroule
annuellement la
grande foire commerciale. Montréal se présente alors
comme un
rempart, mais surtout un refuge, correspondant au Fort
Sainte-Marie, respectivement
le point de départ et le point d'arrivée, avant
Trois-Rivières,
de la dangereuse route de traite,
sécurisée
également par des envois périodiques de soldats
canadiens.
Montréal est une terre qui n'a pas été
« cédée » ? Vous voulez
rire ? Non
seulement l'île de Montréal a été un
lieu interdit de
séjour, par les Iroquois, durant plus d'un siècle,
mais dès
sa création, en 1642, le grand chef des Algonquins de
l'Île
(Kichesipirinis), « Paul » Tessouat, vient
vivre à
Montréal, avec toute sa familles et plusieurs de sa nation.
Il s'installe
sur la terre des Montréalistes, sécurisée
militairement par
Maisonneuve, sanitairement par l'Hôpital de Jeanne Mance et
religieusement
par les jésuites d'abord, puis les sulpiciens. Il se fait
même
baptiser (prenant le prénom du gouverneur). Plus
encore : ce sont les
Montréalistes qui céderont les terres de deux
villages aux Iroquois
chrétiens qu'ils accueillent sur leur territoire dans la
seconde
moitié du XVIIe siècle, aujourd'hui Kahnawake
à
Montréal, puis Kahnasetake sur l'Outaouais. Bref, tout est
faux dans la
pieuse déclaration de pastorale. Pire que tout, elle
noircit outrageusement
la réalité, car la colonie française du
nord-est de
l'Amérique aura été une réussite
remarquable dont le
Québec tire profit encore aujourd'hui. Certes, le
développement
socio-économique du Québec, aux XIXe et XXe
siècles, aura
été extrêmement dommageable pour les nations
autochtones, sous
la responsabilité du gouvernement fédéral du
Canada, avec sa
Loi sur les Indiens, mais en dépit d'atrocités et de
comportements
indignes, dont les Québécois d'origine
européenne portent une
grande responsabilité (l'affaire des pensionnats, les femmes
autochtones et
tous les autochtones victimes d'abus systémiques, et plus
insidieusement le
racisme des Blancs à la source de tous ces méfaits),
bref, en
dépit du pire, tous les ingrédients de bonne entente
restent en
place. La « Paix des braves », l'entente avec
les Cris de la
Baie James, en est une évidente illustration. Qui donc peut
avoir
intérêt à transformer les Amérindiens en
victimes et les
Montréalais, et l'ensemble des Québécois, en
criminels ?
C'est pourtant ce que fait l'invocation en
mode d'Acte de
contrition. Les notables se rendent-ils compte qu'ils insultent
les
Montréalais avec leur prière ? Que celle-ci
soit totalement
fausse et absurde, cela ne change rien à l'insulte. Et en
plus, elle
édulcore les revendications des communautés
autochtones reposant,
elles, sur des droits réels et précis.
À qui donc, en effet, s'adressent les
prières
et Actes de contrition de ces notables ? Aux
Amérindiens ? Oui,
certains d'entre eux peuvent bien être comblés de ces
courbettes, les
Autochtones ne comptant pas moins de sous-doués que les
autres. Mais en
réalité, les notables s'adressent aux bien-pensants,
pour se faire
du capital symbolique. Et, bien entendu, les meilleurs, les
excellents et les plus
grands bien-pensants, en l'occurrence, ce sont eux-mêmes, les
notables.
Pourquoi donc des blancs-becs insulteraient-ils ainsi tous les
Montréalais,
tous les Québécois, y compris ceux des
communautés
autochtones, s'il ne s'agissait d'en tirer profit ?
N'y a-t-il pas quelque chose d'hallucinant
à voir des
notables du FNC jouer les shérifs pour départager les
bons droits des
Indiens et des cow-boys, comme si notre histoire se
déroulait au
cinéma ?
—— Voir l'excellente analyse de François Lemieux
et de Robert
Comeau, Montréal n'est pas un territoire mohawk non
cédé,
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, 23
juillet 2018,
< ssjb.com >.
10 novembre 2019
Revu le 13 janvier 2020
Introduction du 27 mai 2020
En effet, depuis deux ans, le délire
n'a pas cessé et s'est tout naturellement amplifié.
Je vais me contenter d'en donner deux exemples, un très
spectaculaire, le « Territorial
acknowledgement » (car on sait maintenant qu'il s'agit
d'un phénomène anglo-saxon d'Amérique du nord
importé anachroniquement au Québec) du club de hockey
des Canadiens de Montréal, et un exemple des plus
significatifs puisqu'il est le (mé)fait d'une
intellectuelle, la signature institutionnelle de la professeure
Marie Martel de l'École de bibliothéconomie de
l'Université de Montréal.
Les Canadiens de Montréal
Le samedi, 16 octobre 2021, un
« énoncé de reconnaissance
territoriale » sera lue en ouverture du premier match de
la saison au Centre Bell, comme il le sera dorénavant chaque
fois que la partie de déroulera à son
amphithéâtre de Montréal.
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