Historique
J'ai conçu le projet de recherche
intitulé « Étude du récit de
rêve en littérature : structure narrative,
grilles
d'interprétation et codage objectif » en 1998. Ce
titre a en fait été fabulé par Christian
Vandendorpe, pour plaire aux fonctionnaires du CRSH. Mon titre
était simplement : « Etude de la structure
narrative du rêve et de ses interprétations dans les
littératures d'expression française ».
Titre simple, net, clair et précis. Pas de flafla pour
fonctionnaires.
J'ai mis en place mon séminaire sur l'étude narrative
du récit de rêve en 1998-1999. J'ai publié
l'analyse narrative qui sert de point de départ à ce
travail dans mes Matériaux pour une grammaire
narrative en 1999 (réédité en 2007). J'ai
mis en place l'équipe de recherche constituée avec
moi d'Antonio Zadra de l'Université de Montréal et de
Christian Vanderdorpe de l'Université d'Ottawa. C'est ce
dernier qui devait présenter le projet que j'avais
conçu, comme « responsable »,
car il était le seul à pouvoir le diriger, Antonio
Zadra et moi ayant d'autres champs de
recherche principaux. Le 12 juillet 1999, Christian Vandendorpe se
retirait inopinément du projet, pour nous revenir en
septembre, tout disposé à diriger
« notre » travail. J'en ai donc
entièrement rédigé le projet, tandis que
Christian Vandendorpe en organisait le budget (ce qui explique
qu'il allait être le seul à avoir droit à
d'importants dégrèvements de cours). Mon seul
objectif à ce moment, c'était d'obtenir du
financement de recherche pour mes étudiants du Conseil de
Recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) où nous
présentions notre demande de subvention.
Nous n'avons pas obtenu la subvention la
première année où nous l'avons
demandée. Contre l'avis formel des deux autres membres de
l'équipe, Antonio Zadra et moi, Christian Vandendorpe a
décidé d'office de présenter le projet au CRSH
comme recherche « interdisciplinaire », ce qui
était franchement surréaliste pour un projet
concernant les études littéraires auquel collaborait
un
psychologue. Évidemment, nous avons obtenu la subvention.
Subvention de trois ans, 2001-2004.
J'ai travaillé durant tout
l'été avec mes étudiants au projet. C'est
après plus d'un an, en juin 2002, que j'ai compris que nous
ne nous comprenions vraiment pas. À ce moment, Christian
Vandendorpe avait mis en place ce qu'il appelait sans rire une
« base de données » où il
enfournait sans aucune analyse tout ce que ses étudiants
pouvaient trouver de textes où se rencontraient les mots
« rêve » ou « songe »
dans les données de FRANTEXT. C'était et c'est
toujours d'ailleurs du copié-collé ! Il s'agit
de « Reves.ca ».
Avec mes étudiants, dans mon
séminaire de recherche, j'ai alors consacré quelques
semaines passionnantes à faire l'analyse critique du
fouillis que constitue ce non-corpus (mars-avril 2003) — on
trouve aujourd'hui les résultats de cette recherche dans
l'article ci-contre : « Les
effilochures de rêve ». Je pensais que les
résultats de ce travail allaient convaincre mon
collègue d'Ottawa qu'il faisait fausse route. Ce fut peine
perdue. J'ai eu beau lui expliquer cent fois ce qu'on lit ici et
qu'on trouve développé ci-contre, jamais je n'ai pu
taper un neurone sensible de sa compétence scientifique.
Pourtant, ne s'agit-il pas d'une question méthodologique
assez élémentaire ? Ce n'est vraiment pas
très difficile à comprendre. Pour un scientifique,
c'est une toute simple question préliminaire. On le voit
dans mon exposé du projet de recherche initial, où
les critères de sélection des récits de
rêve font naturellement partie de la délimitation du
corpus. On le voit, à plus fortes raisons, dans RRR
où tous les critères sont explicitement
exposés. Bref, du point de vue scientifique la question se
formule ainsi : où trouve-t-on sur
« Reves.ca » les critères
définissant les récits de rêve retenus ?
Où trouve-t-on définis les diverses données de
la prétendue « base de
données » ? C'est simple et la moindre des
choses : qu'est-ce qu'un « cauchemar »
pour « Reves.ca » ? Question
élémentaire entre toutes ! On veut savoir qui
tape sur la touche « cauchemar » et à
partir de quels critères. Alors imaginez le psychodrame
lorsque la question porte sur la définition du
rêve dans une base de rêves ! Trois
ans à répéter inlassablement la question sans
jamais obtenir la moindre réponse, c'est long. Mais c'est
surtout loufoque, lorsque sa participation à un tel travail
implique sa propre crédibilité.
Entre-temps, nous avions lancé un
projet de colloque qui allait finalement se dérouler
à Montréal au printemps 2004. Alors que
j'étais responsable du colloque de Montréal,
Christian Vandendorpe considérait que c'était sa
propriété. Plus que cela, comme c'est lui qui
contrôlait à Ottawa la subvention pour en publier les
actes, il en a vite pris la direction et en a fait sa chose.
Il faut dire que nous avions mis en place un
divorce à l'amiable pour demander une nouvelle subvention.
Il était convenu que je demanderais une subvention en
études littéraires afin de poursuivre l'étude
narrative du récit de rêve, tandis que Christian
Vandendorpe (avec l'équipe que j'avais
constituée !) et moi, demanderions le
renouvellement de la subvention. Je devais rester l'un des trois
co-directeurs de l'équipe « Reves.ca »;
Christian Vandendorpe a décidé seul et d'office que
je ne serais que collaborateur. Soit.
En réalité, ni moi ni personne
ne savait qu'il soumettait la demande, avec son épouse
Annette Hayward de l'Université Queen, en m'écartant
d'office du projet.
Résultat, je n'ai pas obtenu ma
subvention de recherche — tandis que lui a obtenu la sienne
(encore une fois pour travail
« interdisciplinaire » !) — ce qui
est assez normal puisque je prétendais dans ma demande faire
partie d'une équipe où j'avais été
écarté, comme le voyaient bien les fonctionnaires et
les responsables du CRSH qui examinaient ma demande où je
vantais la réciprocité de RRR et de
« Reves.ca » !...
Il n'y a pas de raison que ces faits ne soient
pas connus. D'autant que je n'ai pas ni ne porterai jamais plainte
auprès du CRSH. En revanche, j'y gagne le droit de dire
publiquement ce que je pense de « Reves.ca » et
du travail de Christian Vandendorpe. Finalement, je m'estime
gagnant, aussi bien du point de vue moral qu'intellectuel.
Après tout, au lieu que ce soit RRR et
« Reves.ca », c'est la vérité,
l'un contre l'autre.
Heureusement, je ne suis pas nul en traitement
informatique, de sorte que j'ai pu récupérer mon
travail et les collaborations de mes étudiants pour en
mettre en place le présent site — RRR — qui
continue à se développer de manière
scientifique. Il faudrait je pense que tous les textes qui ont
été édités par mon équipe
à Montréal (et qui sont aujourd'hui publiés
dans RRR) soient soustraits du site
« Reves.ca », car il n'y a plus d'entente de
réciprocité depuis que j'ai été
écarté de l'équipe du projet que j'avais mis
en place. Le contraire est d'autant plus aberrant que plusieurs
des textes que j'ai édités avec mes étudiants
ne sont pas du domaine public et ne se trouvent donc pas ici, mais
se retrouvent illégalement sur
« Reves.ca ».
Analyse critique
La critique sera plus cruelle que
l'historique, puisqu'il s'agira non plus de bienveillance ou de
malveillance, mais de compétence et en particulier du
caractère scientifique ou non des travaux.
Le point de départ de la critique est
fort simple (et je le connais bien, car je n'ai pas cessé
durant trois ans de l'expliquer en long et en large à
Christian Vandendorpe) : il ne suffit pas d'utiliser un logiciel
php gérant (en principe) des bases de données pour en
créer une. Encore faut-il avoir des données à
mettre dedans. Et les données sur un corpus, un
échantillon ou une population, cela découle
nécessairement de son analyse. On n'allait tout de
même pas mettre en place une base de données sans
avoir d'abord des données à mettre en banque. Eh
bien oui ! Pendant que j'éditais à
Montréal des récits de rêve à
étudier, on inventait à Ottawa rien de moins qu'une
« base de données » tout bonnement
constitué d'un corpus, rien de plus. Un recueil, une
collection ou une compilation de textes devient comme par
enchantement une base de données du seul fait d'être
géré par le logiciel php. Il suffisait d'y
penser.
Prenons, par exemple, le nombre de mots. Dans
mon esprit, au début de notre travail, je
pensais qu'on allait découper dans nos textes le nombre de
mots consacrés au récit de rêve (pour le
distinguer du méta-récit qui l'encadre et, souvent,
des interprétations qui le suivent). Non. Pour Christian
Vandendorpe, c'était là beaucoup trop de travail.
S'il fallait se mettre à étudier nos textes pour en
tirer des données, on n'en sortirait jamais ! Alors,
magiquement, le « nombre de mots », c'est celui
des textes de chaque entrée, que le rêve y compte pour
dix ou dix milles mots, 10% ou 90% de l'entrée. On appelle
cela inventer des données, des données
évidemment insignifiantes.
Même chose, à plus fortes
raisons, de ce qui est improvisé au fil du clavier par
Christian Vandendorpe, sans aucune analyse préalable, ni
même les moindres critères explicites à
l'appui : il s'agit de l'affectation des entrées selon
les « genres » (littéraire, religieux
(sic), témoignage, psycho-médical, ethnologique,
philosophique (sic) et historique !) — rien de plus
niais, s'agissant de répartir les textes correspondant
à des rêves littéraires. Or, la
désignation des textes sur les fiches n'a aucun impact sur
le « menu déroulant » en question, mais
n'en est pas moins loufoque. Cela donne, par exemple :
« prose », « prose,
roman », « prose, récit »,
etc. Rubrique « Type de récit ». Alors
là, l'« étude narrative » est
impressionniste : « sommaire »,
« images statiques », « plusieurs
épisodes », « scène
brève » (sic), « plusieurs
actions » (sic), et autres approximations... Parlons
enfin de la rubrique « thème »
(heureusement sortie de la banque si je ne me trompe pas). Alors,
là, il n'y avait que Christian Vandendorpe qui pouvait
remplir
cette rubrique pour donner : « Métamorphose
du rêveur ou d'un personnage »,
« rencontre avec une forme maléfique ou un
démon » et même, alors là vraiment
cochon, « expériences sexuelles ».
N'importe quoi.
Or, évidemment, des «
données », cela se justifie doublement. Un corpus doit
être rigoureusement délimité et proprement
discriminé; et les catégories qui l'analysent
doivent être aussi rigoureusement définies. On ne
saurait employer à la sauvette la notion de
« cauchemar » et encore moins divers
éléments de « mots clés »
improvisés sur le vif. La matière
d'une banque doit être homogène et les
catégories qui l'analysent univoques. C'est le principe
bien connu du classeur et de son classement. C'est de l'ordre
élémentaire de l'épistémologie
scientifique. Autrement, il va sans dire que vous n'avez qu'un
pupitre d'enfant d'école. Et c'est bien le fouillis que
constitue « Reves.ca » dès qu'on
soulève le beau présentoir.
Une partie de ces clés viennent d'une
adaptation de la grille de C. S. Hall et R. L. Van de Castle par
Antonio Zadra. Je n'ai jamais été appelé
à participer à l'analyse critique de ce
prétendu « codage objectif », que j'ai
souvent contesté abstraitement avant d'en voir le
résultat publié en 2005. Je n'en dirai donc rien
ici. En revanche, je trouve fabuleux l'utilisation de ce
« codage » dans la banque de Christian
Vandendorpe. Je veux bien qu'un psychologue adepte de la
méthode Hall & Van de Castle s'interroge sur les
« émotions » positives ou
négatives (sic) exprimées sur un corpus donnés
(ici 60% d'effilochures de rêve), mais le bon sens dit qu'on
ne saurait inverser la grille d'analyse pour en faire... des
données ! Un instant !
Réfléchissons !
« Reves.ca » vous permet d'obtenir la liste des
effilochures d'une période donnée qui expriment la
frustration. Ou la tristesse, la joie, la colère, la
curiosité, la peur, le calme, le désespoir,
l'excitation, etc. Et vous pouvez choisir entre cinq
personnages : ange, Dieu, diable, spectre et créature
mythique. Mettons que l'analyse actantielle a fait quelque
progrès depuis la mise au point de la grille de Hall & Van
de Castle, s'ils sont pour quelque chose dans l'affaire. Le plus
problématique, on le comprendra facilement, est la
discrimination arbitraire des « types » de
rêve (cauchemar, lucide, prémonitoire et
récurrent), types qui ne sont pas
hétérogènes, qui n'ont aucune commune mesure
entre eux et dont on ne donne aucune définition, ni
objective (et pour cause !), ni même
littéraire : quand et comment un rêve est-il
déclaré comme un cauchemar ? selon quels
critères un lecteur le percevra-t-il comme tel ?
quelle est la frontière entre le mauvais rêve et le
cauchemar ? — Et comme la très grande
majorité des rêves littéraires
s'achèvent sur le réveil (tiens ! voilà
par exemple une bonne « donnée » qui
n'est pas dans la banque de rêves...), le psychologue ne
pourrait utiliser ce critère pour les discriminer.
D'ailleurs, ce ne sont pas des
« mots clés » qui peuvent servir
à organiser scientifiquement des éléments d'un
corpus, même si ces étiquettes n'étaient pas
à ce point ridicules qu'elles ne résistent pas
elles-mêmes à l'analyse — alors qu'on
prétend les appliquer à l'analyse du corpus...
Reprenons tout cela à partir de RRR
qui, lui, réalise le corpus d'un projet de recherche
scientifique.
D'abord, évidemment, les récits
de rêve littéraires retenus dans RRR sont
définis de trois points de vue, avec les critères
rigoureux que l'on connaît, sur la base du corpus de Canovas.
Ensuite, avec mon projet de recherche, j'ai mis en place un
formulaire raisonné qui comprend les rubriques qu'on trouve
dans chacune des fiches de la présente édition
(identification, texte, références, éditions
critiques, notes, variantes et bibliographie). C'est logique.
Aucun singe savant ne peut taper dans ce
« formulaire ». Il s'agit de mettre en place
un corpus déterminé et établi
scientifiquement. Les règles de saisie en sont donc
explicites. Les règles de traitement aussi.
Voyez maintenant le corpus de Christian
Vandendorpe à « Reves.ca » où mes
propres éditions sont affublées de diverses
étiquettes complètement loufoques. Quel choc, pour
le chercheur responsable que je suis et pour mes
étudiants ! Et c'est sans compter les titres et
surtitres. Tout le contraire de RRR où les titres sont
strictement descriptifs. Sur « Reves.ca »,
Christian Vandendorpe s'amuse beaucoup en affublant les textes de
jugements de valeur qui, d'eux mêmes, défigurent les
textes, en changent le sens et très souvent le biaisent.
Et ce n'est pas tout. Le résultat est
de piètre qualité. L'édition des textes n'est
tout bonnement pas menée de manière
compétente. Par exemple, un auxiliaire de recherche a
trouvé par hasard un rêve rapporté par Gilbert
de Nogent, le
fameux rêve de sa mère, dans le Secret de nos
rêves,
une vieille affaire du « bibliophile Jacob »
(bon, d'accord, je ne connais pas l'ouvrage, mais LES rêves
de Nogent, oui !). Il suit qu'on trouve
enfourné sur « Reves.ca » le texte
estropié et défiguré d'un malheureux fragment
du rêve de la maman de Nogent, sans
aucune recherche bibliographique, de sorte que la fameuse
base de données ignore et l'édition critique
d'Edmond-René Labande et l'analyse de Jean-Claude Schmitt.
On nous donne une version atrophiée du grand songe de
Jean-Paul « Discours du Christ mort », sans
expliquer qu'il a connu deux versions antérieures (ni non
plus évidemment les produire), sous des titres
différents, avant de se trouver jumelé, au centre de
Siebenkäs, avec « Le songe dans le
songe » (c'est le songe de Marie, l'inverse du premier).
Etc. Manifestement, les auxiliaires n'ont pas été
correctement dirigés, de sorte que le simple
dépouillement bibliographique n'a pas été
réalisé, avant l'établissement des
textes sur des versions non justifiées. Bref, on enfourne
du rêve... Tout le contraire de RRR.
Et n'importe qui peut constater que
« Reves.ca » n'est pas propre à la
recherche. Les fameux menus déroulant, c'est bien
beau, mais pas très pratique pour le chercheur qui veut
simplement imprimer la liste des auteurs répertoriés
dans la banque. Et c'est le cas de la moindre fiche, d'autant
qu'il est tout simplement impossible de l'imprimer et qu'on ne peut
en saisir les textes qu'au prix d'une série
d'opérations qui consistent à les retrouver dans le
code source de la fiche pour les recopier un à un dans un
tiers fichier. Même chose pour l'affichage qui est
programmé en valeur absolue, et non en pourcentage de
l'écran de réception. Bref,
« Reves.ca » n'est pas au service des
chercheurs et des étudiants, mais plutôt conçu
pour amuser le grand public et pour le prestige de son concepteur.
Tout le contraire de RRR.
À mon avis, la prétendue
« base de données » de Christian
Vandendorpe n'a absolument aucune crédibilité, aucune
valeur scientifique.