TdM RRR / Le Recueil des Récits de Rêve - édition de Guy Laflèche TGdM

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Le rêve d'Emily Fletcher
Situation Localisation Notes Variantes Références Bibliographie

Julien Green, Mont-Cinère, roman, 1926

      Elle (1) dut monter se coucher avant la fin du repas. Sa mère n'osa la retenir; elle offrit même de l'aider, car le tremblement dont la jeune fille était agitée lui faisait peur.

      « Tu iras bien demain, lui dit-elle en l'accompagnant, n'est-ce pas ? N'est-ce pas ? ».

      Emily se coucha aussitôt. Elle avait étalé ses vêtements sur le lit pour avoir plus chaud et s'endormit assez vite, mais des rêves pénibles l'éveillèrent en sursaut plusieurs fois dans le courant de la nuit.

      Une vision plus effrayante que les autres lui fit pousser des gémissements. [...]

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Cette oeuvre n'est pas du domaine public et ce récit de rêve est trop long pour être reproduit comme une citation partielle de l'oeuvre dans le cadre d'une utilisation équitable pour fin d'analyse, de critique ou de recherche. Les premières et les dernières lignes du texte vous serviront à le localiser dans l'ouvrage : voyez les rubriques Références et Situation matérielle.

[...]       Emily s'éveilla en nage; d'une main tremblante de terreur elle chercha la bougie et les allumettes et ne put se calmer que lorsque la lumière brilla sur la table. Elle s'assit alors dans son lit et se tint longtemps immobile, le visage contre les genoux, repassant dans sa mémoire les hideuses circonstances de son cauchemar. Au petit jour seulement, elle se décida à éteindre la bougie et à se rendormir.


Notes

(1) Emily Fletcher, que sa mère va implicitement reconduire à sa chambre.

(2) Emily est descendue au village de Rockly au cours de l'après midi, à la demande de sa mère. Elle a été reçue par Frank Stevens dans la cuisine, une pièce de terre battue où la cheminée fume et où ne se trouve pas beaucoup d'ordre, plusieurs instruments agricoles traînant ici et là. Tout cela contraste avec l'ordre et la propreté que Mme Fletscher fait régner chez elle.

(3) Tout indique que la pluie se poursuit au cours du rêve.

(4) Frank lui a dit, pour tenter de briser la dispute qui dure depuis longtemps entre sa femme et la mère d'Emily : « Mais oui, mademoiselle; c'est à cause de cette serpe, vous savez. Mrs. Fletcher n'était pas contente. C'est ma femme qui la lui a réclamée ». Et il a ajouté : « Mrs. Fletcher peut la garder, cette serpe, du reste » (p. 122).

(5) Les rôles sont inversés : l'après-midi, lorsque « la porte s'ouvrit brusquement », c'est Frank qui recevait Émily, légèrement trempée, ayant marché sous une pluie fine.


Références

Julien Green, OEuvres complètes, éd. Jacques Petit, vol. 1, Paris, Gallimard (coll. « Bibliothèque de la pléiade »), 1972, « Mont-Cinère », p. 67-270, p. 125-126.

Édition originale

Julien Green, Mont-Cinère, Paris, Plon (coll. « L'Aubier »), 1926. Édition incomplète de plusieurs chapitres.

—, Mont-Cinère, Paris, Plon (coll. « L'Abeille garance »), 1928. Édition complète.

Édition critique

Julien Green, OEuvres complètes, éd. Jacques Petit, vol. 1, Paris, Gallimard (coll. « Bibliothèque de la pléiade »), 1972, « Mont-Cinère », p. 67-270, p. 125-126.


Situation matérielle

      Fin du chapitre 12 (le roman en compte 42 dans l'édition définitive).


Situation narrative

      Emily a une quinzaine d'années. Elle vit avec sa mère, Mme Fletcher, une femme autoritaire, avare et hypocrite, sur une petite propriété au sud de Washington que son père avait nommée Mont-Cinère. À la mort de son mari, il y a cinq ans, Mme Fletcher avait saisi le premier prétexte pour se débarrasser de Frank Stevens qui faisait chez eux de menus travaux de jardinage. Elle avait cessé également d'acheter les légumes que le cultivateur venait parfois lui offir. En revanche, elle ne manquait pas de continuer à lui emprunter des outils ou de lui prendre gratuitement des légumes lorsqu'elle passait sur sa petite terre, à Rockly.

      Précisément, Mme Fletcher a besoin que Stevens lui prête sa cariole le mardi qui vient et envoie sa fille la lui demander. Celle-ci est bien certaine qu'il refusera, puisque sa mère est en froid avec Mme Stevens, qui lui réclame la serpe empruntée il y a longtemps déjà. Or, justement, il ne refusera pas ! Au contraire, il explique humblement à Emily qu'en dépit du fait que mardi est jour de marché, il accepte de venir lui-même prendre sa mère pour la conduire à Wilmington et lui demande d'annoncer à sa mère que sa femme est enceinte. Emily revient sous la pluie, complètement dégoûtée que Frank Stevens s'humilie ainsi au service de sa mère (comme elle-même en venant lui faire cette demande); elle est aussi vaguement troublée par le physique du bel homme et le fait de savoir sa femme enceinte.

      Au retour, trempée, énervée, épuisée, elle n'arrive pas à se reposer, elle ne peut achever le repas et doit prendre le lit.


Bibliographie

Canovas : ce rêve ne fait pas partie de son corpus.

FIELD, Trevor, « The litterary significance of dreams in the novels of Julien Green », Modern Language Review, Cambridge, 1980, no 75, p. 291-300, notamment p. 291.



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