Étude narrative du récit de rêve
Bibliographie de travail
On ne trouvera pas ici une bibliographie
générale sur
le rêve, mais bien un état présent sur
l'étude narrative du récit de rêve. La
bibliographie présente d'abord les manuels, les ouvrages
généraux et quelques ouvrages fondamentaux (ceux qui
ont été utilisés jusqu'ici dans le travail en
cours) permettant de
situer l'analyse narrative parmi les autres approches scientifiques
du rêve.
Sont exclues de cette bibliographie les
études
littéraires, généralement des études
thématiques ou herméneutiques, qui ont
caractérisé jusqu'à tout récemment
l'analyse du rêve en littérature. Les ouvrages de
Gaston Bachelard ou d'Albert Béguin sont aujourd'hui des
classiques des études littéraires.
En revanche, on classe ici les travaux ou les
panoramas sur les diverses formes ou périodes des
rêves littéraires, en attendant qu'ils prennent place
dans les sections spécialisées correspondantes.
Suit enfin l'objet principal, soit la
chrono-bibliographie
des études narratives du récit de
rêve, ou plus précisément de l'histoire
rêvée. Contrairement aux autres, cette section tente
d'être exhaustive. Et, on le voit, elle est également
descriptive, esquissant ainsi une histoire des études
narratives en domaine onirique.
Stephen Brook, the Oxford Book of dreams, Oxford University
Press, 1992.
Pierre Magnin, le Sommeil et le rêve, Paris, P.U.F.
(coll. « Que sais-je ? »), 1990,
127 p.
Françoise Parot, l'Homme qui rêve : de
l'anthropologie du rêve à la neurophysiologie du
sommeil paradoxal, Paris, P.U.F. (coll. « Premier
Cycle »), 1995, 171 p.
Sophie Jama, Anthropologie du rêve, Paris, P.U.F.
(coll. « Que sais-je ? »), 1997,
128 p.
—, rééd., Rêve et cultures,
Montréal, Liber (coll. « Petite collection
Liber »), 2009, 136 p.
Il s'agit plus souvent d'ouvrages
spécialisés, mais en réalité,
disons-le,
il s'agit d'un répertoire hétéroclite qui
rassemble simplement les travaux utilisés jusqu'ici dans le
travail en cours. Inutile d'y chercher une autre logique que
celle, peu logique, des travaux de recherche ! Si l'on savait
d'avance ce qu'il faudrait lire pour mener un travail de recherche,
ce serait évidemment merveilleux. Malheureusement, une
bibliographie de travail n'est que ce qu'elle est, toujours en
constructon.
CAILLOIS, R., et G. E. von Grunebaum, éditeurs, le
Rêve et les sociétés humaines, Paris,
Gallimard (coll. « Bibliothèque des sciences
humaines »), 1967. Recueil d'articles
spécialisés dans des perspectives très
diverses sur le rêve. Notamment William C. Dement,
« La psychophysiologie du rêve », p.
64-91;
et Carl Alfred Meier, « Le rêve et l'incubation
dans l'ancienne Grèce », p. 290-305.
CAISSY, André, « Le songe est la règle
de nos vies » : le Rêve chez les
Iroquoïens des XVIIe et XVIIIe siècles,
mémoire de maîtrise en histoire, Québec,
Université Laval, 1995, 115 p. On peut encore se
reporter avec profit à l'article d'Anthony F. C.
Wallace, « Dreams and the wishes of the soul : a
type of psychoanalytic theory among the seventeenth century
Iroquois », American Anthropologist, no 60
(1958), p. 234-248. Donald Patrick St-John, the
Dream-vision of the Iroquois :
its religious meaning, Ph. D.,
New York, Fordham University, 1981, 320 p. Même si dans
les trois cas les sources sont bien connues et bien
analysées, les auteurs sont victimes de la nature même
de leurs sources qui sont missionnaires, religieuses, comme on le
voit d'ailleurs au simple titre du dernier travail.
DE JAUCOURT, Louis, article « Songe »,
Encyclopédie, éd. de Denis Diderot, 1765,
vol. 15, p. 354-359.
DEMENT, W. C., Dormir, rêver, trad. O. De
Lalène, Paris, Seuil, 1981.
DUVIGNAUD, Jean et Françoise, et Jean-Pierre Corbeau, la
Banque des rêves : essai d'anthropologie du rêveur
contemporain, Paris, Payot, 1979, 259 p.
—— Cf. « Rêve et
société », Bastidiana (cahiers
d'études bastidiennes), numéro sous la direction de
Jean-Pierre Corbeau, nos 41-42, 2003, et d'abord : J.-C.
Corbeau, « Mise en perspective de "la banque des
rêves », p. 53-58. Le numéro regroupe
quatre textes de Roger Bastide sur le rêve et propose six
contributions qui mettent l'accent sur l'étude
ethno-sociologique
du rêve (Parick Legros, Jeanine Solotareff,
Sophie Jama, Séverin-Céline Abega, Jean Macaire
Muzele Munzimi et Anita Bednarz.
HOBSON, J. Allan, the Dreaming Brain, New York, Basic Books,
1988, 319 p.; le Cerveau rêvant, trad. de Rose
Saint-James, Paris, Gallimard (coll.
« Bibliothèque des sciences humaines »),
1992, 402 p.
JOUVET, Michel, le Sommeil et le rêve, édition
augmentée, Paris, Odile Jacob, 1992, 1998, 245 p.
MONTANGERO, Jacques, Rêve et cognition, Liège,
Mardaga, 1999, 268 p.
SCHWARTZ, Sophie, Matière à rêver :
exploration, statistique et neuropsychologie des
phénomènes oniriques au travers des textes et des
images de rêve, Université de Lausanne,
thèse
de doctorat inédite, 1999, 375 p.
Pour notre analyse narrative, comme on le voit
au chapitre sur
La psychologie et l'analyse narrative du
rêve,
nous avons pour l'essentiel retenu les trois ouvrages fondateurs
suivants :
Marcel Foucault, le Rêve : études et
observations, Paris,
Alcan, 1901, 1906, 304 p. — L'ouvrage fondamental de
Foucault tient
compte de la « thèse » de Freud parue en
« 1900 », mais l'inverse n'est pas vrai, de
sorte que
malheureusement l'auteur figure « avant » le
psychanalyse qui
l'ignorera toujours.
Marie-Jean-Léon d'Hervey de Saint-Denys, les Rêves
et les moyens
de les diriger, Paris, Amyot, 1867 — publication
anonyme : non
seulement le savant orientaliste ne s'identifie pas, mais on ne
retrouvera jamais
ses cahiers d'adolescent sur lesquels son essai populaire et
fantaisiste est
construit.
Alfred Maury, le Sommeil et les rêves, Paris, Didier,
1861, 1862,
1865, puis 4e édition refaite et augmentée en 1878,
476 p.
Sigmund Freud, l'Interprétation des rêves,
1899, trad. I. Meyerson revue par Denise Berget, Paris,
P.U.F., 1926, 1971.
—, Sur le rêve, 1901, trad. de Cornélius
Heim,
Paris, Gallimard, 1988.
—, Délire et rêve dans « la
Gravida » de W. Jensen, 1906, trad. de Marie
Bonaparte, Paris, Gallimard, 1949, rééd. coll.
« Folio », 1971.
—, Introduction à la psychanalyse, 1916 (la
seconde
des trois parties est consacrée au rêve), trad. S.
Jankélévitch, Paris, Payot (coll. « Petite
Bibliothèque Payot »), 1963.
La pensée de Freud sur le rêve
est passionnante
précisément parce qu'elle est liée à la
Naissance de la psychanalyse (voir sa correspondance avec
Fliess, 1887-1902, parue sous ce titre, Paris, P.U.F., 1973).
À y
revenir (cf. le « Que sais-je ? » de R. et
R. Quilliot, les Critiques de la psychanalyse, P.U.F.,
1991), on peut croire que les débats qu'elle a
suscités vont bien au-delà de ses prétentions
qui, dans le cas de « l'interprétation des
rêves » du moins, sont d'une remarquable
sobriété.
Mais c'est l'envers de l'analyse
psychanalytique qui nous
intéresse : non pas l'interprétation du
rêve dans son contenu latent, mais la conception freudienne
« implicite » du rêve, du rêve dans
son contenu manifeste. Systématisés et mis en ordre,
ces caractères sont très nombreux, nuancés et
paraissent bien observés... notamment du point de vue
narratif ! Par ailleurs, le corpus de ces rêves
(autobiographiques) est vraiment novateur, comme
l'illustre le rêve de « L'injection faite à
Irma ».
C. G. Jung, Dreams, trad. R. F. C. Hull, Princeton
University Press, 1974, réimp. ARK Paperbacks, London
(U.K.), 1993.
Recueil sans équivalent en
français des principaux
articles de Jung sur le rêve, de 1909 à 1948, dont le
premier est d'ailleurs paru originellement en
français : « L'analyse des
rêves », Année psychologique (Paris),
vol. 15 (1909), p. 160-167. Autrement, les divers
écrits de Jung sur le rêve se trouvent au fil et dans
le cadre de ses nombreux ouvrages que l'on peut représenter
par les suivants.
C. G. Jung, Dialectique du moi et de l'inconscient, 1933,
Paris, Gallimard (coll. « Folio »), 1964,
260 p.
—, l'Homme à la découverte de son
âme,
1942, traduction et adaptation par Roland Cahen, Paris, Payot,
1962, 347 p.
—, Métamorphoses de l'âme et ses
symboles,
1953, Paris, Librairie générale française
(coll. « Poche références »),
1993, 770 p.
—, Psychologie et alchimie, Paris, Buchet et Chastel,
1970.
Généralement, la méthode
de
l'« amplification » du rêve, avec l'aide
du thérapeute, conduit à un développement,
à une organisation ou même une réorganisation
narrative du contenu onirique. On en trouve une illustration dans
l'essai suivant, largement inspiré de la pratique
jungienne.
George W. Baylor et Daniel Deslauriers, le Rêve, sa
nature, sa fonction, et une méthode d'analyse, Les
Presses de l'Université du Québec, 1991,
90 p.
Cette section doit être
considérée comme un simple aide-mémoire
où sont consignés des éléments de
nombreuses bibliographies en cours.
—— Le songe biblique
HUSSER, Jean-Marie, le Songe et la parole : étude
sur le rêve et sa fonction dans l'Ancien Israël,
Berlin, Walter de Gruger, 1994, XII-302 p.
—— Le songe en France au Moyen Âge
La bibliographie s'en trouve en tête du
chapitre
« Le songe en France au Moyen
Âge ».
—— Le songe à la Renaissance
CHARPENTIER, Françoise, le Songe à la
Renaissance, actes du colloque de Cannes, 29-31 mai 1987,
Nice, Université de Saint-Étienne, Institut
d'études de la Renaissance et de l'Âge classique,
1987.
Remarquable bibliographie sur les songes au
Moyen Âge
et à la Renaissance. L'ensemble du recueil illustre combien
le songe est alors encore très éloigné du
rêve,
l'histoire rêvée, sauf exception, dont celle notable
des songes de Descartes (puis de Jeanne-Marie Guyon, dont il n'est
pas question
ici, car on sera alors à la fin du XVIIe siècle).
Dans l'ensemble,
le songe n'est pas
souvent une histoire, et lorsque cela se trouve, l'histoire est
trop belle pour avoir été rêvée !
A-t-elle
été « songé » ?
« Par tout ce système de conventions, le Songe
prend l'allure d'une construction poétique artificieuse, et
qui est à l'opposé même de la dérive
caractéristique du rêve authentique »
(Claude Faisant, « L'imaginaire du songe chez
Ronsard », p. 179-189, p. 181).
—— Le songe classique
DUMORA, Florence, l'OEuvre nocturne : songe et
représentation au XVIIe siècle, Paris, Champion
(coll. « Lumière classique »,
no 60), 2005, 585 p.
MOREL, Jacques, Agréables songes : essai sur le
théâtre français du XVIIe siècle,
Paris, Klincksieck, 1991, 460 p.
—— Le songe et le rêve romantiques
Les travaux classiques de Jacques Bousquet et
d'Albert Béguin, comme la récente étude de
John E. Jackson, servent à montrer que le songe/rêve
romantique est d'abord et avant tout
« poétique », qu'il ne se donne pas
comme une narration. En réalité, l'étude
narrative n'a pas de peine à montrer que le songe y trouve
son apothéose (Jean-Paul), sa dérive délirante
(Nerval, Aurélia) et, surtout, son
déclin (Nerval encore, les Nuits d'octobre,
puis le premier Balzac, le premier Flaubert, etc.).
—— Le rêve fantastique du
réalisme
Voir les éléments
bibliographiques des rêves littéraires
édités ici, sur RRR. C'est le récit de
rêve littéraire qui se développe de 1850
à 1950, surtout dans le roman populaire.
—— Le rêve des surréalistes
ALEXANDRIAN, Saran, le Surréalisme et le rêve,
Paris, Gallimard, 1974.
BOUCHER, Marie-Ève, le récit de rêve
surréaliste ou la Révolution d'un genre,
Université de Montréal, mémoire de
maîtrise inédit, 2006, 128 p.
On trouve ci-contre un sommaire des
résultats de cette étude narrative, en introduction
au recueil de la Révolution surréaliste de RRR
NEGRI, Rivka, la question du rêve et le récit
autobiographique surréaliste, Université de Nice,
thèse de doctorat inédite, 1991, 258 p.
SCHMID-COMBAL, Mary, la Révolution surréaliste :
dreams and poetry, New York, Fordham University, thèse
de doctorat inédite, 1983, 265 p.
—— Le rêve de la littérature
moderne
Le corpus se développe de René
de Obaldia (Tamerlam des coeurs) aux romanciers de l'Oulipo
(Queneau et Perec), comme avec de nombreux réalisateurs
dans le sillage de Buñuel, mais nullement des nouveaux
romanciers ni des réalisateurs de la Nouvelle Vague.
WOLKENSTEIN, Julie, les Récits de rêve dans la
fiction, Paris, Klincksieck (coll. « 50
questions »), 2006, 171 p.
Préliminaires : l'essai littéraire, le rêve
des littéraires
Au seuil de l'étude narrative on trouve
l'essai littéraire sur le rêve. On peut le
représenter sous deux formes complémentaires, l'essai
d'un auteur (P. Pachet) et un essai sur les auteurs (celui de F.
Déchanet-Platz). Ce ne sont pas là des études
narratives, mais ce ne sont pas non plus des études
thématiques. Ce sont plutôt des présentations
(brutes) du rêve littéraire, du rêve de la
littérature.
Pierre Pachet, Nuits étroitement
surveillées (études psychologiques), Paris,
Gallimard (coll. « Le chemin »), 1980,
221 p.
—, la Force de dormir, Paris, Gallimard,
1988.
—, Aux aguets, Paris, Nadeau, 2002.
La réflexion de l'essayiste est
dynamique : son objectif n'est pas de rappeler les rêves,
mais bien de les revivre, voire d'y vivre. Nourris d'essais (et
non
de travaux) sur le rêve, ces essais se lisent dans une
perspective manifestement autobiographique. Et le moins qu'on
puisse dire est que les rêves de l'essayiste y sont, du point
de vue de l'étude narrative, fort vraisemblablement bien
« rendus ». Voir, par exemple,
« À deux doigts du réel »
(Nuits..., p. 112-116).
Fanny Déchanet-Platz, l'Écrivain, le
sommeil et les rêves (1800-1945), Paris, Gallimard (coll.
« Biblothèque des idées »), 2008,
384 p.
À partir de l'oeuvre exemplaire de
Proust, voici une géographie du sommeil et de ses
rêves chez les écrivains français modernes.
L'ouvrage est intéressant parce qu'il montre comment les
écrivains se représentent la situation du rêve
dans le sommeil et comment ils le situent en fonction de
l'endormissement et du réveil, sans oublier l'insomnie,
voire la rêverie (même si celle-ci est exclue de
l'étude), le tout rapproché ou opposé aux
développements scientifiques sur ces sujets dans le
même temps. La conclusion ne fait pas de doute : oui,
les écrivains ont été de bons observateurs
dans la mise en scène de ces phénomènes. Pour
donner un exemple simple de cette géographie
littéraire, voici une des questions auxquelles répond
l'ouvrage : chez quels auteurs trouve-t-on le rêve
« prémonitoire » ? (réponse
p. 225). En revanche, jamais l'ouvrage n'aborde de quelque
manière que ce soit l'étude narrative du récit
de rêve, l'étude des scénarios étant
explicitement laissée aux travaux de J.-D. Gollut et N.
Cabassu (p. 287).
1978, David Foulkes, A grammar of dreams, New York,
Basic Books.
L'auteur met en place une méthode
d'analyse des contenus
narratifs et l'applique du même coup aux récits de
rêve. Il s'agit d'une étude sémiotique sous la
forme d'une grammaire générative, dans le
prolongement des travaux des formalistes français. En
dépit de ses conclusions suggestives (notamment sur le
rôle du rêveur comme personnage de l'histoire et autres
« règles » du récit onirique), la
formalisation de Foulkes intéresse beaucoup plus
l'étude narrative que l'étude narrative du
rêve.
1988, Bert O. States, the Rhetoric of dreams, Ithaca
and London, Cornell University Presse.
—, Dreaming and Storytelling, Ithaca and London,
Cornell
University Press, 1993, XII-219 p.
Le point de départ du travail de States
consiste à
poser que le « travail du rêve »
décrit par Freud correspond en fait aux grandes figures de
la rhétorique et son résultat aux images
poétiques (métonymie, synecdoque, métaphore et
ironie, par exemple). Son second ouvrage, au titre merveilleux, ne
consacre que quelques pages à l'étude narrative de
l'histoire rêvée, mais très éclairantes,
notamment son chapitre « Beginnings, Middles, and
Eddings » (p. 46-82). Malheureusement,
contrairement à Canovas et à Gollut,
« fiction » est pris ici dans le sens trop
général de littérature et d'oeuvre
littéraire, comme le laissait présager l'origine du
travail dans le premier livre.
1989, Harry T. Hunt, the Multiplicity of dreams :
memory, imagination, and conciousness, New Haven, Yale
University Press, XII-272 p., notamment « Narrative
structures : story grammar versus imagistics »
(chap. 11, p. 159-179).
L'auteur développe
(particulièrement au
chapitre 12) une théorie qui tente de concilier deux
conceptions sur le contenu des rêves, image et histoire,
vision et narration, correspondant respectivement pour lui aux
hémisphères droit et gauche du cerveau (mais il faut
alors ajouter que Hunt identifie la narration des histoires au
langage et particulièrement à la langue). En
faisant le point sur les « story grammars »
appliquées au contenu narratif des rêves, Harry Hunt
en présente de nombreux traits caractéristiques, dont
la « discontinuité narrative »
considérée comme une production du rêve.
1991, Nicole Cabassu, le Récit de rêve dans
la littérature française moderne (XIXe et XXe
siècles) : étude thématique et
stlystique, thèse de doctorat inédite, Paris,
Université de Paris IV/ Sorbonne, 1991, 2 vol.,
366 p.
L'ouvrage inaugure le renouvellement des
études _littéraire_ (dorénavant _narratives_)
du récit de rêve littéraire
(Frédéric Canovas et Jean-Daniel
Gollut). Le corpus, rigoureusement établi, rassemble
environ trois
cents « rêves authentiques »,
c'est-à-dire des rêves qui ont été
déclarés comme tels par des écrivains —
malheureusement,
comme ce sera le cas de celle de F. Canovas l'année
suivante, la
bibliographie (p. 348-351) ne situe pas le ou les rêves dans
les
oeuvres du corpus. Le corpus est constitué des diverses
formes
autobiographiques en prose (correspondance, journaux intimes,
carnets, mémoires, essais) ou de rêves publiés
comme
autobiographiques dans les revues, recueils, mélanges, etc.
Alors
même que la part de l'analyse stylistique est beaucoup plus
importante que l'étude thématique, les deux approches
se tournent
en fait vers l'étude narrative pour produire un
modèle global
rassemblant les particularités des rêves des
écrivains (c'est toute
la première partie de la thèse), modèle qui se
trouve ensuite
confronté à ses réalisations selon les
époques et ses mouvements
littéraires (romantique et surréaliste en
particulier), puis selon
les styles des auteurs (les styles de Flaubert, Char et Verlaine,
plus particulièrement). Enfin, la description est
confrontée aux
genres dit oniriques (fantastique, romantique, poétique),
pour en
arriver à la conclusion que seul le récit du souvenir
d'enfance et
particulièrement de la petite enfance est comparable : car
la
caractéristique la plus spectaculaire du récit de
rêve littéraire
authentique est, justement, d'être fort peu littéraire
! Du point
de vue de la structure événementielle, c'est
l'absence de « composition » qui frappe le plus
: ouverture abrupte sur une
localisation, pas de développement structuré.
« Ni davantage de
dénouement ou d'apothéose, de chute ou de
leçon. Tout au plus un
point final. Quand il n'est pas de suspension » (p.
63).
1991, Jacques Montangero, « How can we define the
sequential organisation of dreams ? »,
Pewrceptual and Motor Skills, no 73, p. 1059-1073.
"José Reis, Jacques Montangero et Francisco Pons,
« L'organisation séquentielle des
rêves : narration, script ou simulation
d'épisodes vécus ? », Bulletin de
psychologie, vol. 42, no 442, juillet-août
1999, p. 399-408. J. Montangero,
« L'élaboration d'un résumé et d'un
schéma séquentiel » (p. 78-87) et
« L'organisation séquentielle des
rêves » (p. 108-118) — et plus
généralement les chapitres 3 et 4 de l'ouvrage
—, Rêve et cognition, Liège, Mardaga,
1999, 268 p.
Mise en place d'une méthode très
efficace de formalisation (découpage et analyse) des
histoires racontée dans les rêves (méthode qui
accompagne et complète une procédure rigoureuse des
rappels de rêve obtenus en laboratoire au cours du sommeil
paradoxal). L'histoire est analysée comme une suite de
situations découpées en activités,
elles-même
analysées possiblement en divers temps de
l'activité. L'opération produit un découpage
en « unités narratives » et interroge
principalement les connexions entre elles. Cela dit, ces
connexions, comme les situations, les activités et les temps
des activités, sont prédéfinies (liaisons
« causales »,
« plausibles » (sic),
« narratives », etc.), avec des
définitions peu rigoureuses de concepts
hétérogènes. Il suit que le modèle
d'analyse est lui-même une représentation de
l'histoire rêvée, dont le concept le plus important
est la notion de « rupture » (qui
caractérise par définition la
« situation » dans le modèle) de sorte
que les propriétés du récit de rêve
finissent par échapper à l'analyse, les
discontinuités (correspondant aux ruptures et aux lacunes)
n'étant prises en compte qu'à la fin, accessoirement,
comme si elles n'étaient pas sous nos yeux depuis le
début (présupposées par le modèle
d'analyse). Cela dit, si l'on prend en compte le
« modèle » lui-même, avant (puis
avec) son application, on y trouve une remarquable description
narrative de l'histoire rêvée.
1992, Frédéric Canovas, Narratologie du
récit de rêve dans la prose française de
Charles Nodier à Julien Gracq, Ph. D., U. of Oregon,
Department of Romance languages, IX-271 p.
—, l'Écriture rêvée, Paris,
L'Harmattan, 2000, 328 p.
Ce second ouvrage représente la version
revue et
développée de la thèse de doctorat. Mais
c'est la thèse qui nous intéresse pour ses deux
premiers chapitres, ses courts appendices et sa bibliographie.
Ceux-ci, appendices et bibliographie présentent le corpus
des récits de rêve étudiés; tandis que
les deux premiers chapitres tirent les conclusion de l'analyse
narrative menée non pas sur les histoires, mais les
récits, dans la perspective des travaux de Gérard
Genette. Le rêve est ici un récit
intradiégétique (un récit dans le
récit) dont F. Canovas étudie les diverses figures de
narration (narration autodiégétique, seuils,
clausules, pactes oniriques; longueurs des récits, nombres
et positions dans les oeuvres narratives, etc.). Mais le premier
mérite de l'ouvrage est de prendre pour la première
fois en considération de manière rigoureuse le
contenu narratif du récit de rêve; pour cela,
il fallait avoir au moins l'intuition sûre de ce qu'est un
récit, un discours narratif, une histoire. Le revers de
cette première analyse narrative du récit de
rêve littéraire se trouve dans le fait que tous les
récits retenus doivent nécessairement être
déclarés par l'oeuvre comme des rêves et...
quel que soit le récit en question.
1993, Jean-Daniel Gollut, Conter les rêves :
la narration de l'expérience onirique dans les oeuvres de la
modernité, Paris, José Corti, 480 p.
L'ouvrage apparaît
rétrospectivement comme le
complément logique et la suite des travaux de Nicole Cabasu
et de
Frédéric Canovas : il s'agit de la mise en
place d'une analyse systématique du récit de
rêve moderne à titre de genre littéraire
particulier, aussi bien du style des récits (au sens strict
et
grammatical du mot), que de leurs différents modes
narratifs. Mais il faut dire que l'analyse du « genre
littéraire » conduit peu à peu à
l'analyse des caractéristiques de l'histoire
rêvée, notamment dans le chapitre sur
« La structure du texte » (p. 347-447) et
particulièrement dans la section
« Récits ? » (402-418), ce qui
constitue en quelque sorte l'aboutissement du travail.
1993, Laurence M. Porter, « Real Dreams, literary
dreams, and the fantastic in literature », the Dream
and the Text : essays on literature and language, ed.
Carol Schreier Rupprecht, State University Press of New York,
p. 32-47.
L. M. Porter a publié plusieurs
ouvrages sur le rêve
et le rêve littéraire (une étude
psychanalytique des rêves et des oeuvres de trois auteurs
romantiques — Nerval, Nodier, Ducasse — en 1979 et une
réévaluation de l'interprétation
psychanalytique du rêve en 1984). Mais cet article, à
la faveur du genre (du compte rendu de rêve) et du genre
littéraire (du récit de rêve),
rapprochés du récit fantastique, constitue une
véritable introduction à l'étude narrative de
l'histoire rêvée. Comme si Laurence M. Porter posait
la question à laquelle la même année
Jean-Daniel Gollut répondait.
1999, Guy Laflèche, « Le
rêve », Matériaux pour une grammaire
narrative, Laval, Singulier (coll. « Les cahiers
universitaires du Singulier »), p. 119-124,
deuxième édition, 2007, p. 134-140. L'ouvrage
se consulte sur Recherche de livres de Google.
Propose un modèle théorique de
l'histoire
rêvée, avec cinq propriétés
caractérisant les histoires racontées dans les
« récits de rêve ».
L'histoire
rêvée est (1) une histoire radicalement
incomplète (comme la phrase incomplète en
linguistique), sans début ni fin, sans dynamique
linéaire, sans suspense; (2) elle est constituée
d'une suite aléatoire de séquences elles-mêmes
formées de suites aléatoires
d'événements; non seulement ces séquences
sont souvent actantielles, mais (3) l'histoire rêvée
comprend plusieurs configurations actantielles (contrairement
à toute autre formes d'histoires simples ou brèves,
ne comprenant par définition qu'une configuration de
personnages). Enfin, l'histoire rêvée présente
deux propriétés complémentaires : (4)
d'abord la rétroaction, c'est-à-dire que le
« récit de rêve » constitue et
reconstitue l'histoire rêvée à partir de la
« fin » ou plutôt du dernier
événement, de la dernière séquence;
ensuite, mais c'est la cause de la rétroaction, (5)
l'histoire rêvée est une histoire « en
acte », c'est-à-dire que l'apparition de chaque
nouvel événement, de chaque nouvelle séquence
réorganise l'histoire racontée jusque-là, de
telle sorte qu'on se trouve chaque fois avec une nouvelle histoire,
ce qui est net avec les apparitions, disparitions et
métamorphoses de personnages.
2000, Patricia Kilroe, « The Dream as text, the
dream as narrative », Dreaming, vol. 10,
no 3.
L'essentiel de l'article porte sur des
questions de vocabulaire et
en particulier sur les mots « texte » et
« narration », évoquant sommairement les
travaux d'études narratives, essentiellement pour
définir ce qu'est une histoire, et non pas pour savoir si
l'histoire rêvée en est une forme et une forme
particulière.
2004 Guy Laflèche, l'Étude narrative du
récit de
rêve, sur RRR : Recueils de récits de
rêve
(Singulier.info/RRR), inauguré cette année-là
(« Prolégomène à la genèse de
l'histoire
rêvée »). Mais c'est entre 2010 et
2013 que sont
publiés ses chapitres les plus importants, « Les
effilochures de
rêve » (2010), « La psychologie et
l'analyse narrative
du rêve » (2011) et « Le songe en France
au Moyen
Âge » (2013). Ces études développent
un chapitre de
la grammaire narrative de l'auteur : « Le
modèle narratif
de l'histoire rêvée » (1999, 2007).
On trouvera quelques suggestions pour
décrire le
récit de rêve du point de vue narratif dans les
ouvrages suivants.
Jean-Yves Tadié, « Rêves et
récits de rêves », laconique section du
chapitre 5, « Mythe et récit
poétique », de son livre sur le Récit
poétique, Paris, P.U.F. (coll.
« Ecriture »), 1978, 208 p.,
p. 168-178.
L'analyse narrative proprement dite tient toutefois en dix
lignes.
Jean Pierrot, le Rêve, de Milton aux
surréalistes, Paris, Bordas (coll. « Univers
des lettres », « Série
thématique »), 1972, 176 p. Ce petit ouvrage
scolaire contient quelques pages proches de l'étude
narrative, du moins dans son contenu sinon dans sa formulation,
notamment : « Le scénario du
rêve » puis « Le décor du
rêve » (p. 20-25).
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