Les Hurons étaient-ils freudiens
ou les psychanalystes sont-ils un peu hurons ?
L'accusation est grave. Nous savons tous
aujourd'hui que Christophe Colomb n'a pas découvert
l'Amérique et ne s'y est pas rendu par hasard. En
réalité, c'est le cubain Caniba Fidel Castro qui,
échoué en Castille, lui avait appris
secrètement
le trajet de l'Espagnola, autrement dite l'Amérique.
Or, nous découvrons avec stupeur que la
psychanalyse est huronne et que Freud tenait toute sa
théorie
de l'interprétation des rêves du jésuite Paul
Ragueneau, missionnaire des Hurons, dont nous reproduisons
ci-dessous
le début du chapitre 12 de sa Relation de 1648 (ou plus
précisément sa Relation de la Huronie en 1647-
1648, Paris, Cramoisy, 1649, p. 92-95).
La conclusion qui s'impose est simple :
ou
bien les Hurons de Nouvelle-France étaient freudiens ou bien
les psychanalystes du XXe siècle ont été un
peu
hurons. À bien y penser, les deux propositions ne
s'excluent
pas.
Guy Laflèche, avril 2004
Guy.lafleche@umontreal.ca
Des principales superstitions qu'aient les Hurons [...]
et premièrement leur sentiment touchant les songes
Outre les désirs que nous avons
communément, qui nous sont libres ou du moins volontaires,
qui
proviennent d'une connaissance précédente de quelque
bonté qu'on ait conçue être dans la chose
désirée, les Hurons croient que nos âmes ont
d'autres désirs, comme naturels et cachés, lesquels
ils
disent provenir du fond de l'âme, non pas par voie de
connaissance, mais par un certain transport aveugle de l'âme
à de certains objets, lesquels transports on appellerait en
termes de philosophie « desideria
innata »
[désirs innés, naturels, profonds, absolus], pour les
distinguer des premiers désirs [= désirs
précédents, dont il a été question plus
haut], qu'on appelle « desideria
elicita »
[désirs élus, choisis, réfléchis].
Or ils croient que notre âme donne
à
connaître ces désirs naturels par les songes comme par
sa parole, en sorte que ces désirs étant
effectués [= réalisés, satisfaits], elle
est contente; mais au contraire si on ne lui accorde pas ce
qu'elle
désire, elle s'indigne, non seulement ne procurant pas
à son corps le bien et le bonheur qu'elle voulait lui
procurer, mais souvent même se révoltant contre lui,
lui
causant diverses maladies et la mort même. [...]
En suite de ces opinions erronées, la
plupart des Hurons sont fort attentifs à remarquer leurs
songes et à fournir à leur âme ce qu'elle leur
a représenté durant le temps de leur sommeil. Si par
exemple ils ont vu une épée en songe, ils
tâchent
de l'avoir, s'ils ont songé qu'ils faisaient un festin, ils
en font un à leur réveil s'ils ont de quoi, et ainsi
des autres choses. Et ils appellent cela
« Ondinnonk », un désir secret de
l'âme déclaré par le songe.
Source : P. Ragueneau, Relation de 1648 reproduite dans R. G.
Thwaites, éditeur, the Jesuit Relations of the jesuit
missionaries in New-France, Cleveland, Burrows, 1896-1901,
73 vol., vol. 33, p. 188-190.
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