Notes
(1) Ydre (Ydain) est la fille d'Élias
(Elyas) et de
Bréatrice (Beatrix), qui vient de naître. Elle sera
la mère
de Godefroy, le héros de la chanson de geste suivante du
cycle des
croisades, la Chanson de Godefroy.
(2) Boulogne-sur-mer, dans le Pas-de-Calais, sur
la Manche.
(3) Les vautres sont des chiens de chasse, comme
les
lévriers, et viennent aussi en meutes. Les deux races de
chiens chassent
respectivement les gros et les petits gibiers, notamment, toujours
respectivement,
l'ours et le lièvre.
(4) Le besant est une pièce de monnaie de
l'Empire
byzantin.
(5) Cent chevaliers dans une armée de mille
hommes, ce
n'est pas contradictoire; en revanche, dans le récit
hétérodiégétique
précédent, cette
armée était de trente milles hommes. En fait ces
nombres
« entiers » n'ont pas de signification
mathématique,
mais bien symbolique.
(6) Raisnier, père de Raisnier, tué
par le chevalier
au cygne (chant XXVII), lors de la délivrance du
royaume qui
était aux mains des Saxons.
(7) L'interprétation du songe. Il ne
s'agit pas d'un songe
prémonitoire puisque le chevalier au cygne n'y voit qu'un
cauchemar et son
épouse, une appréhension, l'intuition que les Saxons
seront
bientôt de retour.
L'« interprétation » du narrateur
est simplement la confirmtion de cette appréhension. C'est
la
désignation des Saxons qui se préparent à
envahir à
nouveau le royaume de Bouillon. Mais il faudrait un
spécialiste de l'oeuvre
(un lecteur qui la relit) pour comprendre précisément
cette
énumération. Autrement, on additionne sept
comtes : Garnier,
Malpriant, Espaulars, Morant, Rainier, Miraviax de Tabor et son
fils.
« Sept » : quatre lions et trois ours.
Voilà pour l'interprétation ou
l'annonce du
narrateur. C'est le lecteur qui sera chargé
d'« interpréter » lui-même le
songe dans les
chapitres suivants de la chanson. L'armée saxonne qui
envahit le royaume
est incomparablement supérieure aux forces que peut lui
opposer le chevalier
au cygne pour sa défense; il livrera toutefois
courageusement combat et,
dans une de ses sorties, il tuera Malpriant (c'est donc l'un des
quatre lions).
Mais tout serait perdu sans le secours de l'armée de
l'empereur.
Variantes
(a) En ancien français, « songer
un
songe » est un syntagme explétif courant, tandis
que la syntaxe
admet facilement les propositions complétives de substantif
(« un
songe, que... »).
(b) « Dressé com
aversier » est
impossible, je crois, à traduire littéralement en
français
moderne parce que les deux syntagmes ont des sens très
larges,
polysémiques : « dessés
comme » (qui
s'emploie encore aujourd'hui), c'est
« habillés »,
« parés »,
« équipés », etc.;
« aversiers » sent encore son sens
étymologique, soit
adversarium, absolument « ennemi du genre
humain », qu'on
applique au diable et, par suite, de manière injurieuse, aux
ennemis.
(c) C'est le cas contraire de la note
précédente :
les « dragons volants » sont d'un sens trop
précis pour
être rendu correctement en deux mots. Ce serait, par
exemple, un
« oiseau volant » ou un « oiseau
ailé », puisque le dragon désigne un
« serpent
ailé ou volant ».
(d) Eschillier vient d'esclïer
d'où l'anglais
split, « fendre ».
(e) Repairier, c'est
« revenir ». Le lapsus
de l'auteur anonyme est évidemment significatif, puisqu'il
implique le
« retour » des Saxons qu'Élias a
déjà
chassé une fois du royame, mais c'est évidemment une
faute, un
lapsus !, dans la narration du songe où ces animaux
symboliques ne
reviennent pas, mais parviennent à Boullion.
(f) Angoisser, « serrer de
près »
comprend aussi l'idée de « tourmenter »,
de plonger
dans l'« angoisse ».
Références
La Chanson du chevalier au cygne et de Godefroid de
Bouillon, édition de
Célestin Hippeau, Paris, Aubry, 2 vol., vol. 1,
le Chevalier au
cygne, 1884, p. 212-214. Pages saisies sur Archive.org en
version image
avant d'être transformées en format html.
Traduction de G. Laflèche.
Édition originale
Manuscrit de la BNF, FF 795, comprend les
trois
premières laisses. Bibliothèque municipale de Lyon,
Ms 744.
Manuscrit de la bibliothèque nationale, Bruxelles,
no 10391.
Éditions critiques
1846-1859, le Chevalier au cygne et Godefroid de Bouillon,
édition de
Reiffenberg, Bruxelles (dans les « Monuments pour servir
à
l'histoire des provinces de Namur, de Hainault et de Luxembourg,
etc. »,
no 4-6), 3 vol.
1884, La Chanson du chevalier au cygne et de Godefroid de
Bouillon,
édition de Célestin Hippeau, Paris, Aubry,
2 vol., vol. 1,
le Chevalier au cygne, p. 212-214. — Slatkine
Reprints,
Genève, 1969, reproduit l'ouvrage dans sa collection des
« Poètes français du Moyen
Âge »
(no 8), avec la note suivante :
« Réimpression des
éditions de Caen et de Paris, 1852-1877 »; or,
l'introduction
s'ouvre sur une désignation de l'ouvrage d'Henry Gibbs paru
en 1858; ce
premier volume sera donc, plus vraisemblablement, de 1884.
1971, Le Chevalier au cygne, édition critique de
Gisela C. Pukatzki,
University Alabama (la thèse de doctorat est peut-être
inédite).
1985 et 1989, les éditions de Jean A. Nelson et de Edmond A.
Emplaincourt
(dans la collection « The Old French Crusade
Cycle », no 2
et 9), University of Alabama Press, sont des versions en prose
Situation matérielle
Le songe occupe la seconde partie du 37e
chant, l'oeuvre en
comptant 44. Il se situe donc près de la fin de la chanson
qui ne compte
qu'un seul songe.
Situation narrative
Béatrice, épouse du roi Oriant,
accouche de sept
fils qui sont magiquement métamorphosés en cygnes par
sa belle-
mère, sauf un, Élias. Grâce aux colliers d'or
que ses
frères avaient à leur naissance, Élias
réussit à
leur redonner leur forme humaine, sauf pour l'un de ses
frères, car son
collier a été fondu. C'est le début des
aventures
d'Élias et de son frère le cygne. L'important pour
notre
épisode, c'est qu'Élias va délivrer les terres
de la duchesse
de Bouillon, dont l'empereur lui donnera pour épouse la
fille,
Béatrice (du même nom que sa mère). Naissance
de leur fille
Ydre. Mais maintenant que le domaine est délivré des
Saxons, alors
qu'Élias et son épouse viennent passer la nuit dans
leur
château de Bullion, voilà qu'un songe terrible annonce
au chevalier
au cygne, selon l'interprétation de la duchesse, le retour
des Saxons.
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