1) 9: 19/20 P 1868, B
1869
semblables, mettre
l'or d'autrui dans la poche et pervertir
[à
remarquer la mis pour leur poche, ce qui trahit
l'hispanisme]
2) 9: 22 P 1868, B 1869 autres, mais > autres;
mais
3) 9: 23 P 1868, B 1869 mais cela >
mais, cela
4) 10: 3 P 1868, B 1869
volonté. > volonté!
5) 10: 6 P 1868, B 1869 Mais après >
Mais, après
6) 10: 18 P 1868, B 1869 faire tomber >
faire
retomber
7) 10: 20 P 1868, B 1869 ciel comme >
ciel, comme
8) 10: 23 P 1868, B 1869 les
yeux pleins d'un > les yeux chargés d'un
9) 10: 27 B 1869
miséricorde, tantôt #
miséricorde; tantôt
10) 11: 2 P 1868, B 1869 incroyables qui >
incroyables, qui
11) 11: 3 P 1868, B 1869 commun contre >
commun, contre
12) 11: 7 P 1868, B 1869 Alors les >
Alors, les
13) 11: 10 P 1868, B 1869 priantes; mais > priantes.
Mais
14) 11: 10 P 1868, B 1869 mais les >
Mais, les
15) 11: 13 P 1868, B 1869 ouragans, firmament > ourangans; firmament
16) 11: 14 P 1868, B 1869 bleuâtre dont
> bleuâtre, dont
17) 11: 15 P 1868, B 1869 beauté, mer > beauté;
18) 11: 15 P 1868, B 1869 coeur, terre > coeur;
terre
19) 11: 15 B 1869 terre au
#
terre, au
20) 11: 16 P 1868, B 1869
mystérieux, habitant > mystérieux; habitant
21) 11: 16 P 1868, B 1869 sphères, univers > sphères; univers
22) 11: 17 P 1868, B 1869 entier, Dieu > entier;
Dieu
23) 11: 17 P 1868, B 1869 Dieu qui >
Dieu, qui
24) 11: 19 P 1868, B 1869 Mais que >
Mais, que
25) 11: 19 P 1868,
naturelles, car > B 1869
naturelles. car > naturelle; car
26) 11: 21 P 1868, B 1869 on
meurt
à
moins. Qu'ai-je dit contre les hommes ?
Est-ce bien moi qui me permets de leur reprocher quelque
chose ?
Je suis plus cruel qu'eux :
Encore une fois, à l'exception de trois
coquilles (9), (19) et (25), la seconde édition reproduit
strictement
la première. En revanche, la troisième
édition
commence à se distinguer autrement que par la
ponctuation : elle comprend deux importantes soustractions (1) et (26) et une variation
lexicale (8). Avec cette cinquième
strophe,
on peut dire que Ducasse commence à se corriger.
Comme dans le cas de la
précédente, dans les deux
premières éditions, la strophe se terminait sur les
deux-points qui la liaient explicitement à la suivante.
L'enchaînement (alors explicite) est de l'ordre de
l'illustration; ce sera le redoublement de la cruauté.
(a) T : stupides et nombreux.
Manifestement, ce
ne sont pas les actes, mais les hommes qui sont nombreux. La
virgule
manque donc devant l'apposition. Je l'ajoute.
En effet, la structure syntaxique ne permet
pas de comprendre le
syntagme comme une mise en relief du complément
« de
nombreux actes stupides » (comme l'interprètent
explicitement les traducteurs Alvarez, Alonso, Pariente, Wernham et
Lykiard), car on attendrait dans ce cas au moins une
préposition (pour) devant l'infinitif qui suit.
(b) Pluriel inattendu (les motifs),
lorsqu'on lit
l'apposition au singulier (la gloire). Mais on comprend vite le
raccourci : tous les motifs se ramènent à la
gloire.
(c) Le contraire, cette fois-ci, du
raccourci
attendu : cette étrange imitation était
impossible. « Imitation » est pris comme nom
d'action. Comme « comparaison », plus bas.
Cf.
(e).
Tous les traducteurs donnent sans sourciller
la même
expression
en espagnol. Mais pour rendre en français extraña
imitación, il faudrait comprendre que l'imitation du rire
humain est une idée étrange, extravagante et,
finalement, impossible,
« étrangère » à la
personnalité du narrateur. En effet, l'espagnol ne
connaît pas le doublet étrange/étranger.
(d) Avec, mis pour en. Hispanisme
morphologique*s : correr con
abundancia.
(e)
« Comparaison », pris
comme
nom d'action. Cf. (c). C'est-à-dire
qu'on
attendrait ici non pas un syntagme nominal mais un syntagme
verbal : comparer, faire la comparaison.
(f) Les yeux enfoncés dans
l'orbite (= dans
les orbites, dans leur orbite). Comme l'article
en français est mis pour le possessif, le singulier convient
parfaitement, bien entendu (chaque oeil a son orbite). Le
singulier
comme complément du pluriel n'en a pas moins un impact
considérable, à cause du duel, chaque homme ayant
deux
yeux, deux orbites !
(g) T : ciel; lasser (P 1869, p. 10:
17). Je
remplace le point-virgule par le tiret. Voici pourquoi. Dans sa
troisième édition, la strophe se termine par une
accumulation de syntagmes mis en
équivalence (tempêtes, firmament, mer, terre,
habitants des sphères, univers, Dieu) séparés
du point-virgule. Or, tel n'est pas le cas ici où
l'infinitif
« surpasser » (avec ses neufs
compléments
articulés) n'est pas équivalent aux deux propositions
infinitives qui suivent.
On peut facilement le déduire de la
première phrase
du
passage des Poésies qui
ramène
cette phrase
à l'essentiel : « J'ai vu les hommes lasser
les
moralistes à découvrir leur coeur, faire
répandre sur eux la bénédiction d'en
haut » (P 1870 II, p. 6: 40-41), refaisant en deux
propositions (les deux qui suivent ici) la même structures
syntaxique. Soit, respectivement : « j'ai vu les
hommes, qui laissaient les moralistes, faire répandre
sur eux la bénédiction » et
« j'ai
vu les hommes qui surpassaient..., lasser les moralistes et
faire retomber sur eux la colère d'en haut ».
Bien sûr, il est également
possible de comprendre
« j'ai vu les hommes surpasser.., lasser.. et faire
retomber... ». C'est précisément pour
éviter au lecteur cette faute de lecture que je propose de
remplacer le point-virgule par le tiret.
(h) T : tous (P 1869, p. 10: 19).
À
première vue, tout peut être ici pronom ou adverbe.
L'analyse syntaxique montre sans peine qu'il s'agit d'un
adverbe : tout à la fois, c'est aussi bien et
en même temps n'oser... et attrister... que
prostituer... et déshonorer... Or, non seulement faire les
deux doubles actions tous ensemble (tous à la fois)
est incongru et injustifié, mais ce serait tuer le comique
de
réaliser les quatre actions en même temps (ce qui n'a
rien d'impossible ni d'absurde si tous ne le font pas
ensemble !), d'autant que le second
« tantôt » de l'alternative, à son
tour, est contredit par un toujours (de l'enfance à la
vieillesse) et tout le temps (« à chaque moment du
jour »). Bref, le narrateur a vue en même temps
(tout à la fois) tantôt ceci et tantôt
cela, cela d'ailleurs toujours et tout le temps !
(i) Le traducteur Gabriel Saad n'y va
pas ici de
main morte, écrivant clairement ce qui nous vient
immédiatement à l'esprit : les mers
soulèvent leurs eaux et les barques (barcos)
disparaissent dans leurs abîmes ! La plupart des autres
traducteurs sont plus discrets, mais n'en proposent pas moins la
même traduction avec le mot madero (madrier, mais au
figuré bateau, comme on dit en français une voile).
Serait-ce le mot et le sens que Ducasse avait ici à
l'esprit ?
Je ne le pense pas, même si c'est
possible. Planche se dit
tabla en espagnol, table se dit mesa et le correspondant plancha la
plaque et en particulier notre planche à repasser (avec un
très technique plancha de agua, radeau qui sert à
travailler autour d'un bateau). Tous ces éléments du
vocabulaire concret n'ont absolument aucune chance d'être
confondus par un bilingue comme Ducasse, précisément
parce qu'ils ne se correspondent pas d'une langue à l'autre
(comme c'est souvent le cas du vocabulaire concret et
quotidien).
En revanche la planche à la mer est
immédiatement
associée au naufrage, ce qui reste d'un bateau
fracassé
par la tempête, de sorte que l'image créée par
Ducasse est extrêmement puissante, ce que décuple son
caractère vraiment inattendu.
(j) On comprend que le poète
invoque les
tempêtes, le firmament, la mer, la terre, les habitants des
sphères, l'univers et finalement Dieu lui-même qui a
créé l'homme, les hommes (l'objet direct n'est pas
l'univers). On le déduit du référent
« un » homme qui suit, celui qui est finalement
désigné.
(1) Les mondes. Le pluriel
dénote la
cosmogonie de John Milton, dont on trouve plusieurs traces dans la
strophe (les mondes et le ciel, les esprits de l'enfer, les
habitants des
sphères et de
façon plus générale la création et la
damnation bibliques, la révolte de Satan). En effet, pour
compenser la chute des anges maudits, Dieu a créé un
« nouveau monde »,le « globe de la
terre », l'arrachant au chaos, et, dans l'univers
galiléen de Milton, rien n'interdit de croire qu'il n'y a
pas
ou qu'il n'y aura pas plusieurs autres mondes, après le ciel
et la terre.
(2) Isidore Ducasse a
« réécrit » cette strophe,
à
commencer par cette phrase, dans un alinéa du second
fascicule
de ses Poésies. En voici le texte (P 1870 II,
p. 6: 40 — 7: 7) :
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