El bozo
TdM Règles d'établissement Strophe 3.5 Glossaires Index TGdM
Édition interactive des Chants de Maldoror du comte de Lautréamont par Isidore Ducasse
sous la direction de Guy Laflèche, Université de Montréal
<< Chant 1, strophe 12 >>
Variantes Commentaires Notes Faurissonneries
 

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      Celui qui ne sait pas pleurer (1) (car, il a toujours
refoulé (a) la souffrance en dedans) remarqua qu'il se
trouvait en Norvège. Aux îles Féroé, il assista à la
recherche des nids d'oiseaux de mer, dans les crevasses
à pic, et s'étonna que la corde de trois cents
mètres, qui retient l'explorateur au-dessus du précipice,
fût choisie d'une telle solidité. Il voyait là, quoi
qu'on dise, un exemple frappant de la bonté humaine,
et il ne pouvait en croire ses yeux. Si c'était lui qui
eût dû préparer la corde, il aurait fait des entailles
en plusieurs endroits, afin qu'elle se coupât,
et précipitât le chasseur (b) dans la mer ! (2). Un soir, il se
dirigea vers un cimetière (3), et les adolescents, (c) qui
trouvent du plaisir (d) à violer les cadavres de belles
femmes mortes depuis peu (4), purent, s'ils le voulurent,
entendre la conversation suivante, perdue (e) dans le
tableau d'une action qui va se dérouler en même
temps (5).
      — N'est-ce pas, fossoyeur (6), que tu voudras causer
avec moi ? Un cachalot s'élève peu à peu du fond de
la mer, et montre sa tête au-dessus des eaux, pour
voir le navire qui passe dans ces parages solitaires (f).
La curiosité naquit avec l'univers.
      — Ami, il m'est impossible d'échanger des idées
avec toi. Il y a longtemps que les doux rayons de
la lune font briller le marbre des tombeaux. C'est
l'heure silencieuse où plus d'un être humain rêve
qu'il voit apparaître (g) des femmes enchaînées, traînant
leurs linceuls, couverts de taches de sang,
comme un ciel noir, d'étoiles. Celui (h) qui dort pousse
des gémissements, pareils à ceux d'un condamné
à mort, jusqu'à ce qu'il se réveille, et s'aperçoive
que la réalité est trois fois pire que le rêve. Je
dois finir de creuser cette fosse, avec ma bêche (i) infatigable,
afin qu'elle soit prête demain matin. Pour
faire un travail sérieux (j), il ne faut pas faire deux
choses à la fois.
      — Il croit que creuser une fosse est un travail sérieux !
Tu crois que creuser une fosse est un travail
sérieux !
      — Lorsque le sauvage pélican (7) se résout à donner
sa poitrine à dévorer à ses petits, n'ayant pour
témoin que celui qui sut créer un pareil amour, afin
de faire honte aux hommes, quoique le sacrifice soit
grand, cet acte (k) se comprend. Lorsqu'un jeune
homme voit, dans les bras de son ami, une femme
qu'il idolâtrait, il se met alors à fumer un cigare; il
ne sort pas de la maison, et se noue d'une amitié
indissoluble avec la douleur; cet acte se comprend.
Quand un élève interne, dans un lycée, est gouverné,
pendant des années, qui sont des siècles, du
matin jusqu'au soir et du soir jusqu'au lendemain*h,
par un paria de la civilisation, qui a constamment
les yeux sur lui, il sent, les flots tumultueux d'une
haine vivace, monter, comme une épaisse fumée, à
son cerveau, qui lui paraît près d'éclater. Depuis le
moment où on l'a jeté dans la (l) prison, jusqu'à celui,
qui s'approche (m), où il en sortira, une fièvre intense
lui jaunit la face, rapproche ses sourcils, et lui
creuse les yeux. La nuit, il réfléchit, parce qu'il ne
veut pas dormir (n). Le jour, sa pensée s'élance au-dessus
des murailles de la demeure de l'abrutissement,
jusqu'au moment où il s'échappe, ou qu'on le
rejette, comme un pestiféré, de ce cloître éternel (o);
cet acte se comprend. Creuser une fosse (p) dépasse souvent
les forces de la nature. Comment veux-tu,
étranger, que la pioche remue cette terre, qui
d'abord nous nourrit, et puis nous donne un lit commode,
préservé du vent de l'hiver soufflant avec furie
dans ces froides contrées, lorsque celui qui tient la
pioche (q), de ses tremblantes mains, après avoir toute
la journée palpé convulsivement les joues des anciens
vivants qui rentrent dans son royaume, voit, le soir,
devant lui, écrit en lettres de flammes (r), sur chaque
croix de bois, l'énoncé du problème effrayant que
l'humanité*v n'a pas encore résolu : la mortalité ou
l'immortalité de l'âme (8). Le créateur de l'univers (s), je
lui ai toujours conservé mon amour; mais, si, après
la mort, nous ne devons plus exister, pourquoi vois-
je, la plupart des nuits*s, chaque tombe s'ouvrir, et
leurs habitants soulever doucement les couvercles*v
de plomb, pour aller respirer l'air frais ? (t).
      — Arrête-toi dans ton travail. L'émotion t'enlève
tes forces; tu me parais faible comme le roseau; ce
serait une grande folie de continuer. Je suis fort; je
vais prendre ta place. Toi, mets-toi à l'écart; tu me
donneras des conseils, si je ne fais pas bien.
      — Que ses bras sont musculeux*i, et qu'il y a du
plaisir à le regarder bêcher la terre avec tant de
facilité ! (u).
      — Il ne faut pas qu'un doute inutile tourmente ta
pensée : toutes ces tombes, qui sont éparses dans un (v)
cimetière, comme les fleurs dans une prairie (9), comparaison
qui manque de vérité, sont dignes d'être
mesurées avec le compas serein du philosophe (w). Les
hallucinations dangereuses peuvent venir le jour;
mais, elles viennent surtout la nuit. Par conséquent,
ne t'étonne pas des visions fantastiques que tes yeux
semblent apercevoir. Pendant le jour, lorsque l'esprit
est en repos, interroge ta conscience; elle te
dira, avec sûreté, que le Dieu qui a créé l'homme avec
une parcelle de sa propre intelligence possède une
bonté sans limites, et recevra, après la mort terrestre,
ce chef-d'oeuvre dans son sein. Fossoyeur,
pourquoi pleures-tu ? Pourquoi ces larmes, pareilles
à celles d'une femme ? Rappelle-toi-le (x) bien; nous
sommes sur ce vaisseau démâté pour souffrir. C'est
un mérite, pour l'homme, que Dieu l'ait jugé capable
de vaincre ses souffrances les plus graves. Parle, et,
puisque, d'après tes voeux les plus chers, l'on ne
souffrirait pas, dis en quoi consisterait alors la vertu,
idéal que chacun s'efforce d'atteindre (10), si ta langue
est faite comme celle des autres hommes.
      — Où suis-je ? N'ai-je pas changé de caractère ? (y) Je
sens un souffle puissant de consolation effleurer mon
front rasséréné, comme la brise du printemps ranime
l'espérance des vieillards. Quel est cet homme
dont le langage sublime a dit des choses que le premier
venu n'aurait pas prononcées ? Quelle beauté
de musique dans la mélodie incomparable de sa
voix ! Je préfère l'entendre parler, que chanter d'autres.
Cependant, plus je l'observe, plus sa figure
n'est pas franche. L'expression générale de ses traits
contraste singulièrement avec ces paroles que
l'amour de Dieu seul a pu inspirer. Son front, ridé
de quelques plis, est marqué d'un stigmate indélébile.
Ce stigmate, qui l'a vieilli avant l'âge, est-il
honorable ou est-il infâme ? Ses rides doivent-elles
être regardées avec vénération ? (11). Je l'ignore, et je
crains de le savoir (z) (12). Quoiqu'il dise ce qu'il ne pense
pas, je crois néanmoins qu'il a des raisons pour agir
comme il l'a fait (aa), excité par les restes en lambeaux
d'une charité (ab) détruite en lui. Il est absorbé dans
des méditations qui me sont inconnues, et il redouble
d'activité dans un travail ardu qu'il n'a pas l'habitude
d'entreprendre (ac). La sueur mouille sa peau; il ne
s'en aperçoit pas. Il est plus triste que les sentiments
qu'inspire la vue d'un enfant au berceau (ad). Oh ! comme
il est sombre !... D'où sors-tu ?... Étranger, permets
que je te touche, et que mes mains, qui étreignent
rarement celles des vivants, s'imposent (ae) sur la
noblesse de ton corps. Quoi qu'il en arrive, je saurais
à quoi m'en tenir. Ces cheveux sont les plus beaux
que j'aie touchés dans ma vie. Qui serait assez audacieux
pour contester (af) que je ne connais pas la qualité
des cheveux ?
      — Que me veux-tu, quand je creuse une tombe ? Le
lion ne souhaite pas qu'on l'agace, quand il se repaît.
Si tu ne le sais pas, je te l'apprends. Allons, dépêche-
toi; accomplis ce que tu désires.
      — Ce qui frissonne à mon contact, en me faisant
frissonner moi-même, est de la chair, à n'en pas douter.
Il est vrai... je ne rêve pas ! Qui es-tu donc, toi,
qui te penches là pour creuser une tombe, tandis que,
comme un paresseux qui mange le pain des autres (ag),
je ne fais rien ? C'est l'heure de dormir, ou de sacrifier
son repos à la science. En tout cas, nul n'est absent
de sa maison, et se garde de laisser la porte ouverte,
pour ne pas laisser entrer les voleurs (ah). Il
s'enferme dans sa chambre, le mieux qu'il peut,
tandis que les cendres de la vieille cheminée savent
encore réchauffer la salle d'un reste de chaleur. Toi,
tu ne fais pas comme les autres; tes habits indiquent
un habitant de quelque pays lointain.
      — Quoique je ne sois pas fatigué, il est inutile de
creuser la fosse davantage. Maintenant, déshabille-
moi; puis, tu me mettras dedans (13).
      — La conversation, que nous avons tous les
deux, depuis quelques instants, est si étrange,
que je ne sais que te répondre... Je crois qu'il veut
rire.
      — Oui, oui, c'est vrai, je voulais rire (ai) (14); ne fais plus
attention à ce que j'ai dit.
      Il s'est affaissé, et le fossoyeur s'est empressé de le
soutenir !
      — Qu'as-tu ?
      — Oui, oui, c'est vrai, j'avais menti... j'étais fatigué
quand j'ai abandonné la pioche... c'est la première
fois que j'entreprenais (ac) ce (aj) travail... ne fais plus
attention à ce que j'ai dit.
      — Mon opinion*h prend de plus en plus de la consistance (ak) :
c'est quelqu'un qui a des chagrins épouvantables.
Que le ciel m'ôte la pensée de l'interroger.
Je préfère rester dans l'incertitude (z), tant il m'inspire
de la pitié (ak). Puis, il ne voudrait pas me répondre,
cela est certain : c'est souffrir deux fois que de communiquer
son coeur en cet état anormal.
      — Laisse-moi sortir de ce cimetière; je continuerai
ma route.
      — Tes jambes ne te soutiennent point; tu t'égarerais,
pendant que tu cheminerais. Mon devoir est de
t'offrir un lit grossier; je n'en ai pas d'autre. Aie
confiance en moi; car, l'hospitalité ne demandera
point la violation de tes secrets.
      — O pou vénérable, toi dont le corps est dépourvu
d'élytres (15), un jour, tu me reprochas avec aigreur de
ne pas aimer suffisamment ta sublime intelligence,
qui ne se laisse pas lire; peut-être avais-tu raison,
puisque je ne sens même pas de la reconnaissance (al)
pour celui-ci. Fanal de Maldoror (am), où guides-tu ses
pas ?
      — Chez moi. Que tu sois un criminel, qui n'a pas
eu la précaution de laver sa main droite, avec du
savon, après avoir commis son forfait, et facile à reconnaître,
par l'inspection de cette main; ou un frère
qui a perdu sa soeur; ou quelque monarque dépossédé,
fuyant de ses royaumes, mon palais, vraiment
grandiose, est digne de te recevoir. Il n'a pas été
construit avec du diamant et des pierres précieuses,
car ce n'est qu'une pauvre chaumière, mal bâtie (an);
mais, cette chaumière célèbre a un passé historique
que le présent renouvelle et continue sans cesse (ao). Si
elle pouvait parler, elle t'étonnerait, toi, qui me parais
ne t'étonner de rien. Que de fois, en même temps
qu'elle, j'ai vu défiler, devant moi, les bières funéraires,
contenant des os bientôt plus vermoulus que
le revers de ma porte, contre laquelle je m'appuyai (ap).
Mes innombrables sujets augmentent chaque jour.
Je n'ai pas besoin de faire, à des périodes fixes, aucun (aq)
recensement pour m'en apercevoir. Ici, c'est
comme chez les vivants; chacun paie un impôt, proportionnel
à la richesse de la demeure qu'il s'est
choisie; et, si quelque avare refusait de délivrer sa
quote-part, j'ai ordre, en parlant à sa personne, de
faire comme les huissiers (ar) : il ne manque pas de chacals
et de vautours qui désireraient faire un bon
repas. J'ai vu se ranger, sous les drapeaux de la
mort, celui qui fut beau; celui qui, après sa vie, n'a
pas enlaidi; l'homme, la femme, le mendiant, les fils
de rois; les illusions de la jeunesse, les squelettes des
vieillards; le génie, la folie; la paresse, son contraire;
celui qui fut faux, celui qui fut vrai; le masque
de l'orgueilleux, la modestie de l'humble; le vice couronné
de fleurs et l'innocence trahie.
      — Non certes, je ne refuse pas ta couche, qui est
digne de moi, jusqu'à ce que l'aurore vienne, qui ne
tardera point. Je te remercie de ta bienveillance...
Fossoyeur, il est beau de contempler les ruines des
cités; mais, il est plus beau de contempler les ruines
des humains !


1. Variantes

Coquilles et anomalies typographiques

a) 45: 1  B 1869 comme un ciel noir d'étoiles..

b) 45: 5  P 1869 infatigab!e


Variantes

1) 43: 25 — 44: 17   Addition : Celui qui ne sait pas pleurer (car, il a toujours refoulé la souffrance en dedans) remarqua qu'il se trouvait en Norvège. Aux îles Féroé, il assista à la recherche des nids d'oiseaux de mer, dans les crevasses à pic, et s'étonna que la corde de trois cents mètres, qui retient l'explorateur au-dessus du précipice, fût choisie d'une telle solidité. Il voyait là, quoi qu'on dise, un exemple frappant de la bonté humaine, et il ne pouvait en croire ses yeux. Si c'était lui qui eût dû préparer la corde, il aurait fait des entailles en plusieurs endroits, afin qu'elle se coupât, et précipitât le chasseur dans la mer ! Un soir, il se dirigea vers un cimetière, et les adolescents, qui trouvent du plaisir à violer les cadavres de belles femmes mortes depuis peu, purent, s'ils le voulurent, entendre la conversation suivante, perdue dans le tableau d'une action qui va se dérouler en même temps.

      Ce premier alinéa, ajouté à l'édition définitive, consiste à mettre en scène le dialogue. Dans l'édition originale, comme à la strophe précédente, il s'agissait d'une scène dialoguée. Elle s'ouvrait ainsi :

(La scène se passe, pendant l'hiver, dans une région du nord.)

MALDOROR — N'est-ce pas, fossoyeur, que tu voudras causer avec moi ? [...].

LE FOSSOYEUR — Ami, il m'est impossible d'échanger des idées avec toi. [...].

      Il suit que cette première didascalie et les noms des interprètes sont des soustractions de l'édition définitive. Ou, plus précisément, ces éléments sont réécrits, la didascalie inspirant ce premier alinéa, tandis que l'identification de Maldoror, implicite, devient à elle seule une figure narrative significative. Cf. n. (1).

      Le temps et l'espace : l'hiver disparaît; mais la région du nord se concrétise par la Norvège.

2) 44: 20  P 1868, B 1869   Un cachalot s'élève peu à peu du fond de la mer, et montre sa tête au-dessus des eaux pour voir le navire qui passe > Un cachalot s'élève peu à peu du fond de la mer, et montre sa tête au-dessus des eaux, pour voir le navire qui passe
3) 44: 21  P 1868, B 1869 pour voir le navire qui passe dans ces parages solitaires; la curiosité naquit avec l'univers.  > pour voir le navire qui passe dans ces parages solitaires. La curiosité naquit avec l'univers.
4) 44: 28  P 1868, B 1869 traînant leurs linceuls couverts de taches de sang > traînant leurs linceuls, couverts de taches de sang
5) 45: 1  P 1868, B 1869 comme un ciel noir d'étoiles. > comme un ciel noir, d'étoiles.
6) 45: 2  P 1868, B 1869 Celui qui dort pousse des gémissements pareils à ceux d'un condamné à mort > Celui qui dort pousse des gémissements, pareils à ceux d'un condamné à mort
7) 45: 3  P 1868, B 1869 jusqu'à ce qu'il se réveille et s'aperçoive que la réalité est trois fois pire que le rêve. > jusqu'à ce qu'il se réveille, et s'aperçoive que la réalité est trois fois pire que le rêve.
8) 45: 5  P 1868, B 1869 Je dois finir de creuser cette fosse avec ma bêche infatigable > Je dois finir de creuser cette fosse, avec ma bêche infatigable
9) 45: 17  P 1868, B 1869 Lorsqu'un jeune homme voit dans les bras de son ami une femme qu'il idolâtrait > Lorsqu'un jeune homme voit, dans les bras de son ami, une femme qu'il idolâtrait
10) 45: 21  P 1868, B 1869 Quand un élève interne dans un lycée est gouverné [...] par un paria de la civilisation > Quand un élève interne, dans un lycée, est gouverné [...] par un paria de la civilisation
11) 45: 22  P 1868, B 1869 est gouverné pendant des années, qui sont des siècles > est gouverné, pendant des années, qui sont des siècles
12) 45: 24  P 1868, B 1869 un paria de la civilisation qui a constamment les yeux sur lui > un paria de la civilisation, qui a constamment les yeux sur lui

13) 45: 26  T :   P 1868, B 1869 il sent les flots tumultueux d'une haine vivace monter, comme une épaisse fumée, à son cerveau > il sent les flots tumultueux d'une haine vivace, monter, comme une épaisse fumée, à son cerveau

      Il s'agit d'une anomalie : la virgule ne peut séparer ainsi deux parties d'un syntagme verbal, le verbe qui tient lieu de semi-auxiliaire (il sent) et son complément (monter). En toute rigueur, il faut plutôt encadrer le complément (les flots tumultueux d'une haine vivace) : j'ajoute donc la virgule qui manque entre « il sent » et « les flots ». Ducasse fait lui-même cette correction plus loin, variante (50).

14) 45: 28  P 1868, B 1869 Depuis le moment où on l'a jeté dans la prison jusqu'à celui > Depuis le moment où on l'a jeté dans la prison, jusqu'à celui
15) 45: 28  P 1868, B 1869 Depuis le moment où on l'a jeté dans la prison jusqu'à celui, qui s'approche, où il en sortira > Depuis le moment où on l'a jeté dans la prison, jusqu'à celui, qui s'approche, où il en sortira
16) 46: 2  P 1868, B 1869 une fièvre intense lui jaunit la face, rapproche ses sourcils et lui creuse les yeux. > une fièvre intense lui jaunit la face, rapproche ses sourcils, et lui creuse les yeux.
17) 46: 3  P 1868, B 1869 La nuit il réfléchit > La nuit, il réfléchit
18) 46: 4  P 1868, B 1869 Le jour sa pensée s'élance > Le jour, sa pensée s'élance
19) 46: 6  P 1868, B 1869 jusqu'au moment où il s'échappe ou qu'on le rejette > jusqu'au moment où il s'échappe, ou qu'on le rejette
20) 46: 7  P 1868, B 1869 qu'on le rejette comme un pestiféré de ce cloître éternel > qu'on le rejette, comme un pestiféré, de ce cloître éternel

21) 46: 10  P 1868 (et P 1869)  la pioche remue cette terre, qui d'abord nous nourrit, et puis nous donne un lit commode >  B 1869  la pioche remue cette terre qui, d'abord nous nourrit, et puis nous donne un lit commode

      La correction instinctive du typographe, qui ajuste la première virgule devant le premier adverbe, ne se retrouve pas dans l'édition définitive faite sur un exemplaire de l'édition princeps. Elle n'est pas de Ducasse, ni dans la logique de la ponctuation des Chants, même si elle est correcte; on ne peut donc pas la retenir.

22) 46: 12  P 1868, B 1869 un lit commode préservé du vent de l'hiver > un lit commode, préservé du vent de l'hiver

23) 46: 13  P 1868, B 1869 Comment veux-tu, étranger, que la pioche remue cette terre [...], quand celui qui tient la pioche > Comment veux-tu, étranger, que la pioche remue cette terre [...], lorsque celui qui tient la pioche

      Cette première variante lexicale est particulièrement insignifiante, car les deux conjonctions temporelles marquent également la causalité et l'opposition (= alors que). Comment expliquer la variante ? Les deux vocables ont quatre occurrences dans cette strophe, dans l'édition définitive. On peut donc croire qu'il s'agit d'une hypercorrection, lorsque n'ayant pas de correspondant en castillan. Cuando est au contraire la forme courante des deux vocables français. Il suit, évidemment, que lorsque est une francisation.

24) 46: 13  P 1868 (et P 1869) quand/lorsque celui qui tient la pioche > B 1869 quand celui-ci qui tient la pioche

      Coquille inexplicable, après la judicieuse correction de la variante (21).

Suite des variantes
et de l'apparat critique de la strophe 1.12

Variantes Commentaires Notes Faurissonneries
Tables du début de la présente strophe