La très grande majorité des toponymes
de la Mappa
del rio Missisipi correspondent à des mots
amérindiens,
généralement des noms de tribus (nations, peuples ou
clans), qu'ils
nomment des lacs ou des rivières, ou encore de villages ou
des groupes de
villages. Ces toponymes ne désignent jamais des
territoires, contrairement
à la Carte générale de Canada sur
laquelle la carte du
Mississippi s'appuie, ce qui est déjà une importante
caractéristique : la carte énumère les
Amérindiens de la vallée du Mississippi sans les
organiser en
système, comme on le fait depuis longtemps en
Nouvelle-France, jusqu'aux
Illinois.
Si la carte du Mississippi prend appui sur la
carte du Canada
(que Lahontan publiera en 1702, mais qu'il utilise tout au long de
sa
correspondance depuis au moins la Lettre VII des NV en novembre
1684), c'est
d'abord parce qu'elle est une reconfiguration du haut Mississippi,
qu'on y trouvait
déjà sommairement représenté, mais
c'est surtout parce
qu'elle prolonge le cours du fleuve en dressant la carte du bas
Mississippi
jusqu'au golfe du Mexique sur la base de la relation de Jean
Cavelier de La Salle.
C'est une seconde caractérisation relative des deux cartes.
Autant la carte
du Canada était une source d'inspiration pour la
rédaction de
l'oeuvre (notamment dans le cas du chapitre inaugural des
Mémoires), autant
celle du Mississippi n'est qu'une illustration du journal de Jean
Cavelier, qui
l'inspire entièrement.
Qui l'inspire entièrement ? C'est
justement la
question qui se pose, celle des sources et donc de la genèse
de la carte du
Mississippi, car si le journal de Cavelier en est la source
principale, on va voir
qu'elle n'est pas unique. D'où la question de savoir
quelles sont les
autres cartes ou les autres documents utilisés par Lahontan.
Poser la
question, on va le voir, ce n'est malheureusement pas y
répondre. Pour la
formuler correctement, on peut procéder en deux
étapes.
Il s'agit d'abord de dresser la liste de
toutes les additions,
mais également des reformulations, que l'on trouve sur le
haut Mississippi
en regard de la carte du Canada. Ensuite, il faudra identifier
tous les toponymes
du bas du fleuve qui ne se trouvent pas dans le journal de
Cavalier. De
façon plus générale, on en profitera pour
radiographier tout
ce qui s'ajoute à la Carte générale de
Canada :
autant celle-ci, comme on l'a vu, présente des connaissances
géographiques depuis longtemps connues (et souvent
même anachroniques)
au moment de sa publication, autant la Mappa del rio
Missisipi se voudrait
tout à fait « originale », s'agissant
d'impressionner
le duc de Jovenazo pour vendre ses services à la couronne
d'Espagne.
Disons tout de suite que si le duc aurait bien
pu être
impressionné (si du moins il n'avait rien connu aux
très populaires
ouvrages de Hennepin, dont un sommaire des Nouvelles
découvertes
paraît en espagnol cette année 1699
(Relación de un pais que
nuevamente se ha descubierto en la America septentrionale...,
Bruxelles,
Lamberto Marchant, 86 p.), les fonctionnaires de
Séville ont dû
être très surpris de voir figurer un lac des Apaches
au nord du 71e
parallèle, eux qui connaissent leurs Apaches depuis bien
plus longtemps et
bien mieux que les Canadiens ne connaissent alors leurs
Sioux ! En tout cas,
ils pouvaient se douter qu'il s'agissait d'une ruse d'Apaches de la
part du baron
de Lahontan. Voyons cela.
Toutes les tribus algiques (ou algonquiennes)
de l'ouest du
bassin des Grands Lacs sont connues des Français au cours de
la seconde
moitié du XVIIe siècle (1750-1775, environ).
Lahontan les
connaît comme tout le monde et on les trouvait
déjà
situées sur sa carte générale du Canada. Il
reporte donc sur
sa Mappa del rio Missisipi les Sakis, les Pouteouatamis
(Ceux de la place
du feu), les Malominis (les Folles Avoines ou Riz sauvages), les
Kikapous et les
Outagamis (les Renards). Toutes ces tribus de la baie et de la
rivière des
Puants sont enregistrées au DBC. Ces alliés de la
Nouvelle-France
(particulièrement les Sakis) sont en contact régulier
avec les
Mascoutens, à l'ouest du Michigan, jusqu'à l'Ohio,
tous adversaires
des Oumamis ou Miamis, alliés, eux, des Iroquois. Figurent
également
dans l'alliance française les Illinois, rencontrés
pour la
première fois par Jolliet et Marquette en 1673. Tous ces
toponymes se
trouvent donc ici sans surprise.
Même remarque en ce qui concerne le
Wisconsin,
l'Illinois et la Ouabach (qui devient toutefois l'Ohio) : nous
sommes en
Nouvelle-France, c'est-à-dire en territoire connu depuis
longtemps.
Reste à trouver où Lahontan a
pris les toponymes
des affluents du haut Mississippi qui ne figurent pas sur sa carte
générale du Canada. Sans qu'on puisse identifier sa
source, on voit
que ces désignations et ces informations
géographiques sont bien en-deçà
de ce que l'on trouvait déjà sur
la
première carte de Louis Hennepin, accompagnant sa
Description de la
Louisiane en 1683, où elles se trouvaient à peu
près
toutes. En 1699, on n'en est plus là. Àl'exception,
bien entendu,
de la Masotanta et de son fabuleux lac des Apaches !
(1) La rivière Issati,
village des Issatis
(7.1). Les Issatis sont les vedettes de la Description de la
Louisiane
puisque c'est dans l'un de leurs villages que Hennepin a
passé l'hiver 1680-1681.
Ce séjour fait la matière autobiographique de
son premier
livre (tout le reste étant un simple plagiat de la relation
inédite
que Bernou avait magistralement tirée des documents relatifs
aux
explorations de La Salle, avant sa descente du Mississippi en
1684). C'est de ces
Issatis que Hennepin a tiré ses connaissances de
première main sur
les Sioux de l'est du haut Mississippi (informations
confirmées par Daniel
Greysolon Dulhut qui explore alors la région — si,
bien entendu, elles
ne viennent pas de Dulhut lui-même, en France en 1681-1682,
informations
synthétisées par Bernou, puis recopiées et
précisées par Hennepin). Voir la Description de
la louisianne
(DL, passim), notamment : « sur la main
droite »
du Mississippi, « on trouve la Riviere des Issati ou
Nadoussion, estroite
à son entrée, & qu'on remonte en allant au Nord
environ soixante &
dix lieuës jusques au Lac Buade [le lac des Mille-Lacs] ou des
Issati,
d'où elle prend sa source; nous avons donné à
cette Riviere
le nom de Saint François » (p. 201).
Comparer les
énumérations des Sioux de l'est dans la
rédaction de Bernou
(La Salle/Bernou dans Margry, 1: 481) et celle beaucoup plus
précise de
Hennepin, qui traduit leurs noms (DL, p. 204). Sur la carte
de Hennepin, en
1683, les Issati occupent tout le territoire compris dans la
fourche qui termine
la représentation du Mississippi. Sur la première
carte de Guillaume
Delisle en 1700 (1700a), le haut Mississippi est
désigné
verticalement comme le Pays des Nadouessis, sans aucune autre
indication sur les
Sioux; la même année, sur la seconde version de sa
carte (Delisle,
1700b), tout le haut Mississippi est encore désigné
comme le Pays des
Nadouessis, mais la dernière branche du fleuve, conduisant
à ses
sources sous la forme d'un trident, divise les Sioux de l'Ouest des
Sioux de l'Est;
toutefois, aucune tribu de la confédération n'est
encore
nommée, si ce n'était l'énigmatique lac des
Tintons.
(2) Quatre villages de Titaos
(7.1).
Il s'agit des
Tintons, les Tinthonha que désigne Hennepin :
« Tinthonha qui
veut dire hommes de Prairie » (ND, p. 204). Il les
situe toutefois
à l'est du Mississippi, au lac Buade, ce que tout contredit,
à
commencer par leur nom. Corrigeant sa première carte de
1700 (1700a),
Delisle ajoutera inopinément un lac des Tintons (1700b),
à l'ouest
du Mississippi, au niveau du lac des Pleurs, sur le 45e
parallèle, endroit
qui deviendra bientôt très célèbre, avec
l'invention de
la rivière Longue.
Les Sioux. Ces deux premières
additions à la
carte générale du Canada sont déjà
très
significatives. D'abord du point de vue de la genèse. La
carte du Canada
ignore les Sioux (désignés de manière
générique
plus bas, en 7.2). On peut donc être assuré que leur
figuration dans
le texte original de la Lettre XVI (l'épisode la
l'île aux
Rencontres, NV, p. 168-170) est du même ordre que la
désignation
des Akansas, par exemple, soit la mise en scène
d'informations qui tiennent
alors aux préparatifs des explorations La Salle (les
Akansas,
« nation si connuë de Mr de la Salle »,
p. 174). En
effet, si les Issati apparaissent ici sur la carte du Mississippi,
cette addition
est la source (!) de leur désignation sur celle de la
rivière Longue,
la « R. Dasscious », l'affluent de l'ouest le
plus au nord du
Mississippi. Ensuite, toujours question de sources, les Issati et
les Titaos ne
paraissent pas venir directement des cartes de Hennepin (et encore
moins de ses
livres) précisément à cause de leur
représentation
rudimentaire par Lahontan comparativement à la carte de
1683.
Dans la représentation de Hennepin, sur
sa carte de
1683, les Nadouessans surplombent les Issati, à l'est, et
les Tinthonha
à l'ouest, soit les deux angles du triangle isocèle
qui pointe vers
le saut de St Antoine de Padoü. Les Sioux de l'est sont
déjà
fort bien représentés sur sa carte :
Chongaskabé ou
Nation des Forts, les Hanctons et les Oüa de Battons ou gens
de
Rivière, à l'est du lac Buade où conduit la
rivière de
St-François. Or, pour en revenir à la carte de
Lahontan, il est tout
de même extraordinaire de voir situés les Tintons
très à
l'ouest du Mississippi et les Issati sur le fleuve et à
l'est. Notre baron
ne peut tout de même pas savoir ce qu'on mettra plusieurs
années
à porter sur les cartes, et que les Sioux eux-mêmes
mettront plus d'un
demi-siècle à
« réaliser », c'est-à-dire
leur regroupement à l'ouest et à l'est
du... Missouri,
en trois grandes confédérations, nos Tetons à
l'ouest et nos
Issati (les Santee) à l'est, les Yankton du centre
n'étant pas
évoqués ici (voir le Handbook, 13: 152a, sur
les Santee, qui
regroupent les quatre tribus de l'est).
(3) La rivière des
Français et trois
villages de Nadouessis (7.2), affluent de l'est, puis l'affluent
anonyme de l'ouest
venant du lac encadré de deux villages de ces Nadouessis
(7.3).
Contrairement aux Issati et Titaos désignés plus
haut, ce
« Rio de los Franceses » vient certainement de
Louis
Hennepin : il a toutes les chances d'être une mauvaise
lecture de la
« rivière de St. François » que
l'on trouve pour
la première fois sur la carte de Hennepin en 1683
(« nous avons
donné à cette Riviere le nom de Saint
François »,
DL, p. 201). La déformation est-elle de Lahontan ou
vient-elle de sa
source ?
Àremarquer que le saut Saint-Antoine de
Pade (La
Salle/Bernou dans Margry, 1: 480; DL, p. 200, et la carte de
Hennepin de 1683)
n'est pas porté sur les cartes de Lahontan. C'est pourtant
le point central
de la géographie du haut Mississippi et il le restera
longtemps. Comme il
s'agit du guichet d'entrée chez les Sioux de l'Est, cette
lacune est
significative du retard des cartes de Lahontan sur l'état
des explorations
et même des établissements du haut Mississippi qui ont
beaucoup
progressés depuis quinze ans que Louis Hennepin a
nommé ce saut en
1680.
(4) La rivière du
Tombeau,
avec encore des
villages de Nadouessis (7.4). La désignation originale de
la rivière
ne peut faire aucun doute, s'agissant d'un fragment narratif haut
en couleur de la
Description de la Louisiane (p. 199, 203-204) :
« Cette
premiere Riviere est appellée la Riviere du Tombeau, parce
que les Issati
y laisserent le corps de l'un de leurs guerriers, mort de la piqure
d'un Serpent-sonette,
sur lequel je mis une couverture selon leur
coûtume... »
(DL, p. 199). C'est « une rivière pleine de
rapides, par
laquelle on peut aller au lac Supérieur, faisant route au
nord-est
jusqu'auprès de la source Nemitsakouat, qui tombe dans ce
lac. Cette
rivière a été appelé la rivière
du Tombeau,
à cause de celuy d'un capitaine sauvage qu'on y
trouva » (La
Salle/Bernou dans Margry, 1: 480); Hennepin n'a pas eu de peine
à corriger
cette rédaction de Claude Bernou, si la rédaction
correcte
n'était pas dans le manuscrit dont il a obtenu copie :
« une
rivière pleine de rapides, par laquelle en tendant au nord
oüest on peu
aller au lac de Condé jusqu'à la rivière
Numissakouat qui
tombe dans ce lac » (DL, p. 199). Il s'agit de la
rivière
qui a conduit Duluth au Mississippi dès 1679 (Delanglez,
Mid-America,
vol. 28 (1946), p. 164).
Il faut rappeler que la rivière du
Tombeau
désigne, sur la carte générale, une
rivière qui se
décharge dans le lac Supérieur et qu'on rejoindrait
par un portage
depuis la rivière aux boeufs, ce qui sera reproduit sans
sourciller sur la
carte de la rivière Longue. Lahontan ajoutera simplement,
les ayant
découverts depuis, « deux villages de
Nadouessis »
à l'embouchure de... la rivière aux boeufs. La
rivière des
Boeufs (La Salle/Bernou dans Margry, 1: 480, DL, p. 198)
n'apparaît pas
ici sur la carte du Mississippi.
(5) La rivière du
Charbon
(7.5).
Hapax (a).
Le carbón désigne
incontestablement le
« charbon ». Cette rivière n'a aucun
correspondant ni
dans la relation, ni sur la carte de Hennepin, ni non plus dans la
relation de
Bernou écrite sur les lettres et mémoires de La Salle
(doublés
du témoignage ou d'un mémoire de Hennepin). Aucun
affluent du
Mississippi n'est ainsi désigné nulle part. En
revanche, sa position
correspond à la rivière des Boeufs des cartes
contemporaines, absente
de la carte de Lahontan, comme on vient de le voir.
(6) La rivière Noire
(7.6).
« A
vingt-quatre lieuës au dessus [du Wisconsin] on trouve la
Riviere noire
appellée par les Nadouessious ou Islati, Chabadeba ou
Chabaoudeba, elle
paroist peu considerable » (La Salle/Bernou dans Margry,
1: 480,
recopié dans DL, p. 197).
Suit le Wisconsin, qui permet de rejoindre le
Michigan, par
la rivière des Renards et le baie des Puants, comme on l'a
vu, s'agissant
de la porte d'entrée principale de la Nouvelle-France
à la
vallée du Mississippi, du moins avant que l'Illinois ne
prenne cette
fonction pour ceux qui veulent descendre le fleuve.
(7) La rivière Masotanta
(7.8), avec ses
villages de Panassas et de Massotantas, conduisant au lac des
Apaches, constitue
bien entendu la configuration la plus spectaculaire des affluents
du haut
Mississippi. Rappelons qu'elle correspond à la
rivière des Otenta
de la carte générale et qu'on la retrouvera telle
quelle
(marquée inexplorée) sur celle de la rivière
Longue. Aucun
affluent de l'ouest du fleuve ne se trouvait sur la carte de
Hennepin en 1683,
entre le Wisconsin et l'Illinois : c'est d'ailleurs à
l'Illinois, la
Seignelai, que s'arrêtait sa représentation du
Mississippi.
Le dessin de la rivière correspond
à celui de
la rivière des Otenta sur les versions de la carte de
Hennepin à
partir de 1697. Si la rivière de Hennepin allait se perdre
dans un lac au
pied d'une chaîne de montagnes, celle de Lahontan conduit au
même
endroit où se dessine le grand lac des Apaches devant les
mêmes
montagnes. — Le « dessin » en question
préfigure
le cours de la rivière Longue, qui sera reporté au
nord, au 46e
parallèle.
Nous sommes ici dans la logique cartographique
des
années 1680. La rivière des Otentas ou des
Masotantas (c'est la
même) correspond, dans la réalité, à
l'Iowa. Ce point
d'entrée de la « rivière »
correspond, lui, au
village illinois des Pewarea (Péoria) visité par
Jolliet et Marquette
en 1673. Dans l'imaginaire de Lahontan et de ses informateurs,
c'est la logique
géographique des Algonquins, les « nations
éloignées
dans les terres » que les Pewarea ont situées plus
ou moins loin
à l'ouest de leur village, ces Amérindiens se
trouvent sur
leur rivière. Et ce cours d'eau imaginaire va vite
prendre le nom
d'une des quatre nations les plus éloignées, celui
des Otontania
(d'où, par exemple, l'apparition du lac des Tetons sur la
carte de Delisle,
1700b), c'est-à-dire les Sioux de l'ouest. Cela correspond,
bien au
contraire, dans la logique des Illinois et des Sioux de l'ouest
(comme pour Jolliet
et Marquette, selon la carte de Marquette, soit dit en passant),
aux Moingouena sur
leur rivière (la Desmoines), et aux Sioux de l'ouest sur
leur rivière
également, le Missouri. Dans la logique des Algonquiens et
des Iroquoiens,
et c'est bien entendu la logique des Canadiens, on se
déplace en canots,
sauf lors des circuits de chasse d'hiver. Les Sioux, et plus
généralement les Amérindiens des plaines, eux,
se
déplacent à pied en toutes saisons (avant d'adopter
le cheval dans
quelques décennies) à l'intérieur des terres,
puisque les
buffles qu'on chasse ne suivent pas les cours d'eau, mais les
traversent.
Or, c'est dans cette région fort
éloignée, au bout de cette rivière imaginaire,
celle des
« Otenta », région dont il ne
connaît rien, que
Lahontan fabule, pour se rendre intéressant auprès
des Espagnols, un
formidable lac des Apaches. C'était la meilleure
manière de se
discréditer, étant donné la connaissance aussi
ancienne que
précise que l'on a de ces puissants ennemis de la
Nouvelle-Espagne et du
Nouveau-Mexique en Espagne. Mais l'affabulation est
également significative
de l'expansion que l'on prête aux Espagnols les imaginant
alors beaucoup trop
près du sud-ouest de la Nouvelle-France, à cause des
objets de traite
qui y parviennent de bien plus loin que les Français ne
l'imaginent.
Après l'Illinois, on en vient au
« village » des Akansa. Rappelons que ces
Kaskasia ou Akamsea
(un village de 74 cabanes) constituait le terme du périple
de Jolliet et de
Marquette sur le Mississippi en 1673 (JR, 59: 152-160). On
reviendra chez les
Akansa à la « fin » du parcours de Jean
Cavelier
(30).
(8) La rivière des
Missourites (7.10). C'est
le Missouri, que Lahontan reprend de sa carte
générale du Canada,
où la rivière se trouvait croisée avec celle
des Osages, ce
qu'il reportera sur sa carte de la rivière Longue. Jolliet
et Marquette ont
déjà décrit son embouchure en 1673 sous le nom
de
Peki(s)tanouï (JR, 59: 140), porté sur la carte de
Marquette. Pour
Tonty, c'est la rivière Emissourita (Margry,
p. 595).
(9) La rivière et deux
villages des Tamaroas
(7.10). Les tamaroas ni aucune rivière de ce nom ne se
trouve dans la
relations de Jean Cavelier, mais la rivière se trouvait
déjà
portée sur la carte générale du Canada et se
trouvera encore
sur celle de la rivière Longue. Notons qu'elle se trouve
sur la carte de
Louis Hennepin à partir de 1697.
Nicolas La Salle (Margry, 1: 550), Tonty
(Margry, 1: 596 et
611) et Minet (p. 21 et 52) donnent la même orthographe;
la Prise de
possession écrit « Maroa » (Margry,
2: 187), tandis
que Claude Bernou et Hennepin donnaient les deux versions.
Hennepin, qui recopie
de texte de Bernou (Margry, 1: 479), dit en effet qu'il a
trouvé les
Tamaroas en campement de pêche dès son entrée
sur le
Mississippi : « Le septiéme de Mars [1680]
nous
trouvâmes à environ deux lieuës de son embouchure
[l'Illinois],
une Nation appellée Tamaroa ou Maroa composée de deux
cens familles.
Ils voulurent nous mener à leur Village scitué
à l'Oüest
du Fleuve Colbert [le Mississippi], à six ou sept
lieuës au dessous de
l'embouchure de la Riviere Seignelay » (DL,
p. 190-191). Toutefois,
la carte de 1683 ne porte rien à l'ouest du Mississippi.
Patricia Galloway
et W. C. Foster situent leur village principal un peu au-dessous de
la ville
actuelle de St. Louis, de l'autre côté, à
l'ouest du
fleuve (Minet, p. 43, n. 32; Nicolas,
p. 138).
C'est le premier village rencontré par
l'expédition de La Salle en 1682. Il est désert, car
ses habitants
sont alors à la chasse. On y compte 180 cabanes.
Toutefois, le village,
situé à sept lieues sous le Missouri, se trouve non
à l'ouest,
mais à l'est du fleuve (toutes les versions citées
plus haut
concordent sur ce point).
On vient de le voir, sur la Carte
générale du
Canada, comme ce sera encore le cas sur celle de la rivière
Longue, on
trouve d'abord la rivière des Tamaroa un peu après
l'embouchure de
l'Illinois, puis, bien loin au sud, celles des Missouris et des
Osages. Elles sont
toutes amalgamées ici, du moins celle des Missouris et des
Tamaroa, avec...
les Akansa ! Il s'agit d'un fabuleux imbroglio ethnique et
géographique. En effet, les Tamaroas sont de la famille des
Illinois (voir
l'index de Thwaites, notamment, JR, 64: 160, 268), tandis que les
Osages,
assimilés apparemment aux Tamaroa, de la famille siouse
(Handbook, 13: 476-496),
comme les Missouri (Otoe et Misouria, Handbook, 13: 447-461)
et les Akansa
(Quapaw, Handbook, 13: 497-514). Il suit que la carte
générale et
celle de la rivière Longue séparent correctement les
deux tribus,
leurs villages et leur « rivière »,
tandis que la
Mappa del rio Missisipi les regroupe sur l'Arkansas. On
peut y voir le
premier impact de la relation de Cavelier sur le dessin de
Lahontan, puisque le
village Cappa des Arkansas représente l'objectif de
l'expédition de
survie, l'arrivée au Mississippi, l'entrée en
Nouvelle-France. Cf.
n. (30).
(10) Il faut rappeler que la
rivière
Ouabach des autres cartes de Lahontan prend ici le nom de
rivière Ohio
(7.11). Pourquoi ? Pour Jolliet et Marquette, qui l'ont
découverte,
c'était la Ouaboukigou (JR, 59: 142 et 144, portée
sur la carte de
Marquette). La question ne porte pas, évidemment, sur la
réalité géographique que l'on mettra plusieurs
décennies à représenter correctement, mais sur
la
désignation de l'embouchure du réseau hydrographique.
Sur ses
versions de sa carte de 1697, Hennepin situe sa mission des
récollets
à l'embouchure de la rivière
« Ooyo ».
(1) Kinesta (8.2). Les Bahamos
et les
Quinets
(PEF, 2: 331) sont des nomades en guérilla contre les
Français au
fort Saint-Louis. Il n'est question ni des Kinesta (b), ni de Quinets dans le journal de Cavelier.
(2) Erigona (8.2). Erigogoanna
(PEF,
2: 331). Au
moment du second départ vers les Illinois, les
Français rencontrent
une troupe de Bahamos (nomades, « ennemis » des
Français), qui vont en guerre contre les Erigogoanna). Ces
Erigogoanna ou
Erigona ne sont jamais nommés dans le journal de
Cavelier (f).
(3) Rivière de las Catias
(8.3). Hapax (c).
Catia n'est pas un mot espagnol. On
s'attendrait
à pourvoir lire le correspondant espagnol de la
rivière aux Cannes
(PEF, 2: 232; Joutel, p. 159, éd. Margry, 3: 261-262)
— en
espagnol, ce serait le « Rio de las
Ca&ntild;ias ». —,
la première rivière traversée lors des deux
expéditions
vers les Illinois. Àremarquer que PEF désigne deux
rivières
aux Cannes (ibid.) et que l'une d'entre elles aurait
été
renommée par La Salle, selon Joutel, la Princesse ou la
Mignonne lors du
second voyage. Selon Pierre Berthiaume, il s'agirait des rios
Lavaca et Navidad
(Cavelier, p. 180). On traverse la rivière
renommée la
Princesse à cinq lieues de son embouchure dans la baie de
Saint-Louis. Cela
dit, il n'y a aucune rivière aux Cannes dans le journal de
Cavelier.
(4) Acatessos (8.3).
S'agirait-il des
Bracamos du
journal de Cavelier ? (BNM, p. 1167). Jean Cavelier
désigne ainsi les
habitants du village le plus proche du fort des Français,
ceux que le
pseudo-Douay nomme, lui, les Quoaquis, tandis qu'il désigne
les Bahamos
comme une tribu nomade ennemie des Français (PEF, 2: 329).
Bref, le nom des
Bracamos se rapproche plus des Bahamos que des Acatessos. Il faut
donc ranger
l'appellation de Lahontan dans les indices des sources à
trouver :
où a-t-il pris ce nom ?
(5) Kouaras (8.4). Les Quaras
sont
situés au
nord de la (première) rivière aux Cannes dans la
relation du PEF (2:
332).
(6) Karacorresa (8.4).
Étant
donné la
lecture difficile de la carte ici, il serait aventureux d'y voir le
correspondant
des Anachorema (PEF, 2: 332), d'autant qu'on ne trouve nulle trace
des
« deux » villages dans les éditions du
récit de
Joutel.
(7) Kanoatinoa (8.5). Sur la
rivière Maligne,
le pseudo-Douay situe pas moins de quarante villages de Quanoatinno
(PEF, 2: 334).
Pierre Berthiaume l'identifie au Colorado (Cavelier,
p. 180).
(8) Ticapanas (8.6). Sur la
rivière Hiens, le
pseudo-Douay situe trois nations, les Taraha (les Taracas
ci-dessous), les
Tyakappan, dont il est question ici, et les Palonna (PEF, 2: 335),
certainement les
Palomas (10). On trouve des chevaux dans ces trois villages,
alliés des
Palaquesson (12), une tribu de dix villages, qui serait en contact
avec les
Espagnols.
(9) Taracas (8.7). Le toponyme
ne se
trouve pas dans
le journal de Jean Cavelier (g)
Voir en (8).
(10) Palomas (8.8). Voir en
(8)
ci-dessus.
(11) Rivière Quinipissa
(8.8). Le toponyme
ne se trouve pas dans la relation de Cavelier (h).
La carte de 1697 de Louis Hennepin situe leur territoire au nord de
la
Sablonnière ou à son embouchure.
« Le village principal des
Quinipissa se trouvait
un peu plus haut qu'à mi-chemin entre l'embouchure de la Red
River et celle
du Mississippi (d'après Iberbille en 1698-1702), apparemment
près de
la ville actuelle d'Edgard en Louisiane », soit à
la hauteur de
New Orleans, mais à l'ouest et au sud du fleuve,
orienté ouest-est
à cet endroit (Yves Goddard, Handbook, 14: 185b, ma
traduction). En
réalité, la situation du village est difficile
à
établir à cause des contradictions entre les
distances et les
durées divergentes des différentes versions du voyage
de 1682, voire
dans chacune de ces versions). Mais les cartes de 1684 par
Franquelin et par
Coronelli situent leur village principal au même endroit,
entre Bayou
Lafourche et le Mississippi (voir la confrontation des deux cartes
sur cet endroit
dans le Handbook, 14: 182). Cela dit, à l'ouest de
New Orleans, bien
entendu, aucun affluent important du Mississippi ne vient franc
ouest, d'autant que
le fleuve, on vient de le lire, est orienté à cet
endroit dans cette
direction. Il n'est d'ailleurs jamais question d'aucune
« rivière » des Quinipissa dans les
relations de
l'expédition de 1682.
Les Quinipissa, Kinipi(s)sa ou Tenipisa sont
les seuls
Amérindiens à refuser de recevoir les Français
qui cherchent
à se rendre à l'embouchure du Mississippi en 1682.
Au retour, La
Salle tente de forcer la rencontre, car il a besoin d'aide, surtout
de vivres. Non
seulement les explorateurs sont mal reçus, mais,
campés sur l'autre
rive du fleuve, ils sont attaqués au cours de la nuit
suivante dans leur
retranchement et, dans l'obscurité, ils tirent à
l'aveugle en
direction des bruits qu'ils entendent autour d'eux, pour trouver au
matin, quelques
cadavres (probablement deux), en plus des traces de nombreux
blessés qu'ils
ont manifestement faits. Évaluant leurs munitions
insuffisantes (Tonty) ou
voulant les ménager (Membré), les Français
renoncent à
l'attaque du village. Plus loin, ils seront très mal
reçus des
Moroa, alliés de ces Kinipissa, qui auront appris ces
événements (Tonty dans Margry, 1: 604, 605-608;
Membré dans
PEF, 2: 235, 240-244; et Minet, 36-37, 42-45).
Quatre ans plus tard, Henry de Tonty prendra
sa revanche, au
moment où il tente (en vain) de retrouver
l'établissement de La Salle
dans le golfe : en descendant, sa troupe passe superbement
devant les
villages d'où personne n'ose faire le moindre cri, tandis
qu'au retour,
Tonty accepte le calumet de paix que les chefs des Quinipissa sont
bien
forcés d'offrir à ces gens qui ont des fusils (Tonty
dans Margry, 3:
553-554 et 554-558).
Si les Quinipissa n'ont laissé aucune
trace en
archéologie et en ethnologie, (Galloway, Minet,
p. 53,
n. 55), tel n'est pas le cas en histoire et en cartographie
(cf. Handbook, 14:
185). Il est d'ailleurs significatif qu'une si importante et
extravagante
« rivière » Quinipissa, sans aucun
correspondant dans
le journal de Jean Cavelier, soit ajoutée par Lahontan sur
sa carte pour y
ajuster des villages de son itinéraire.
(12) Palaquas, Palakea,
Palakias
(8.9), Alakea de
Shea selon Delanglez (n. 88, Early Voyages,
p. 39). Pierre
Berthiaume les situe à l'est du Rio Brazo, qui
correspondrait à la
rivière aux Canots de Jean Cavelier (Cavelier,
p. 181 et 214).
Il s'agit des Palaquessons, d'après le pseudo-Douay,
comptant dix villages
alliés des Espagnols (PEF, 2: 335).
(13) Akas (8.10).
Orphelin (m) : sans correspondant dans les relations
contemporaines, bien que
selon Jean Delanglez les Akas seraient les Alasky de la version de
Shea (Early
Voyages, p. 39, selon Delanglez, Cavelier,
p. 148,
n. 89). Dans son lexique des tribus amérindiennes,
Pierre Berthiaume
(Cavelier, p. 207) les situe sur la rivière
Brazo (comme les
Palaquas) et en fait l'équivalent des Aquis d'Henri Joutel
(mais je n'en
trouve pas d'autre occurrence que dans son
énumération des ennemis
des Cénis dans Margry, 3: 409, qui provient d'une note de
Joutel pour
Delisle). Comme ces Haquis sont les premiers ennemis des
Cénis à
l'est (selon le pseudo-Douay, PEF, 2: 349), il suit que les Aquis
ou les Haquis ont
peu de chance de correspondre aux Akas.
(14) Penoy (8.11).
Orphelin (n).
(15) Sasori (8.12).
Orphelin (o). Dans son analyse de l'itinéraire, Pierre
Berthiaume
situe leur principal village au sud de l'actuel Nacogdoches ou sur
un bras de la
rivière Angelina (Cavelier, p. 215).
(16) Tipoy (8.13).
Orphelin (p). Pierre Berthiaume les situe au sud-ouest du Rio
Brazo au Texas
(Cavelier, p. 216).
Les Amérindiens que l'on décrit
comme ayant la
tête plate sont généralement les Natchez que
l'on situe
effectivement, avec les Koroa, au sud des Taensa leurs ennemis. On
croit toutefois
que les Nachez étaient en 1682 la tribu dominante et que les
Koroa
étaient en fait un petit village de réfugiés
venus
temporairement du nord, où les situaient Jolliet et
Marquette en 1673 (cf.
Handbook, 14: 180). Ces confusions se trouvent dans toutes les
relations de
l'expédition de 1682, alors justement que les Natchez sont
désignés très approximativement (voir le
dernier alinéa
du paragraphe suivant), voire incorrectement (les Nahy ou Nachy de
Tonty dans
Margry, 1: 603 et 609, qui les nomme bien Nachés en 1686
dans Margry, 3:
556). Mais l'important est que l'appellation Typoy est orpheline,
ne se trouvant
dans aucune autre relation contemporaine.
(17) La rivière Taensa
(8.14). Ni les
Taensa, ni une rivière de ce nom ne figure dans le journal
de Jean
Cavelier (i). Jusqu'à mieux
informé,
Lahontan a pris leur nom d'une des versions de la carte de 1697 de
Hennepin.
Même remarque pour les Coroa (au paragraphe suivant).
Lors de sa descente du Mississippi
jusqu'à son
embouchure en 1682, La Salle est conduit chez les Taensa ou Tahensa
par des Akansa,
leurs alliés. Ils ont huit villages, un peu à
l'écart du
fleuve, sur un lac où l'on se rend par un court portage,
à l'ouest
du fleuve, puisqu'on navigue depuis les Akansa sur la droite
(Tonty, p. 600).
Le glossaire de Pierre Berthiaume, comme W. C. Foster
(Nicolas, p. 30),
les situe sur les rives de Lake St. Joseph, à mi-chemin de
Rio Yazoo et de
Saint Catherine Creek (Cavelier, p. 216).
Tonty, tout comme Minet au retour, avec les
Français
qui se sont rendus à leur village principal (La Salle
étant alors
indisposé s'y rendra au retour), ont été
très
impressionnés par leurs
« manières » (Minet,
p. 51), leur civilisation (culte du chef, respect du feu,
temple du soleil,
des morts ou de la guerre, tout comme par leurs vêtements et
l'architecture
de leur village principal, sans compter les perles et... le
sel ! qu'on trouve
chez eux. La Salle renouvellera l'alliance avec eux au retour.
Après les
Akensa, ce sont les seconds alliés des Français sur
le fleuve (Tonty
dans Margry, 1: 600-602 et 609-610; Minet, p. 31-32, 48-51; et
Membré
dans PEF, 2: 226-230 et 246).
La hauteur prise avec l'astrolabe situe le
village principal
à 31o; on se croit alors sur l'Escondito (Tonty dans
Margry, 1: 602).
— C'est la seule évaluation de latitude donnée
avant
l'embouchure du Mississippi, à 27o. Pour Jean Delanglez,
c'est un
degré plus bas que la position réelle du village,
soit 30o
(« The cartography of the Mississippi, II, La Salle and
the
Mississippi », Mid-America, vol. 31 (1949),
p. 42).
Patricia Galloway note que ces Taensa sont une
énigme
aussi bien en archéologie qu'en histoire, mais elle les
croit très
proches des Natchez (Galloway, Minet, p. 50,
n. 46-47); le
Handbook of north american Indians fera même des noms
Taense et de
Natchez deux synonymes (Handbook, 14: 614), ce qui est
contradictoire avec les
relations qu'on vient d'évoquer, les Natchez étant
des alliés
des Coroa, comme on va le voir au paragraphe suivant.
(18) Coroa (8.15). Le toponyme
ne
se trouve pas
dans le journal de Jean Cavelier (j). Lahontan l'a
lu sur la carte de Louis Hennepin où la rivière Hiens
sépare
un village de Taensa et Les Koroa, respectivement au nord et au sud
de son
embouchure. La rivière, on le sait, prend le nom de rio
Taensa sur la
Mappa.
Dans les relations de l'expédition de
1682, les Coroa
(Koroa, Corroa, Corroua) sont présentés avec les
Natchez, qu'on donne
comme le nom d'un de leur village, le plus au nord, tous
étant ennemis des
Taensa; les Français, bien accueillis en descendant le
fleuve, mais
très mal reçus au retour, comprendront que ce sont
des alliés
des Kinipissa (Tonty dans Margry, 1: 604, 608-609; Membray dans
PEF, 2: 231-235 et
244-246; et Minet, p. 32-35 et 46-48).
Le village principal des Coroa, dominant le
fleuve d'une haute
falaise, a été identifié par Jeffrey P. Brain
au village
actuel de Tiou, à l'embouchure de la St. Catherine Creek, 20
km au sud de
Nachez (« The archaeology of the Tunica : Trial on
the
Yazoo », rapports de la National Geographic Society
Research, cité
par Galloway, Minet, p. 49, n. 44. et 52,
n. 50; voir
également W. C. Foster, Nicolas, p. 31,
n. 66).
(19) Anamis (8.16).
Orphelin (q) : sans correspondant dans les relations
contemporaines. Pierre
Berthiaume les situe à l'ouest du Rio Brazo
(Cavelier, p. 208),
la « rivière aux Canots ».
(20) Senis (8.17), les Cenis
(Joutel, p. 150,
207 et suiv, avec une petite monographie sur eux, p. 216-230,
qu'on ne
retrouve pas dans l'édition de Margry), les Coenis (PEF, 2:
320-325, 344-349,
360). Àsa première tentative de rejoindre
l'Illinois, les
Cénis ont constitué, à proprement parler, la
fin de
l'expédition de La Salle en 1686, même si c'est
à la nation
suivante des Nasonis, que l'explorateur restera cloué deux
mois par la
maladie, avant de revenir au golfe du Mexique. Àsa seconde
tentative, c'est
tout juste avant d'arriver à ces villages qu'il sera
assassiné, le
19 mars 1687 (tous les récits concordent sur ces
points : PEF, Joutel,
etc., bien que le journal de Cavelier situe l'assassinat à
la sortie du
village des Cénis, où les Français retournent
ensuite). La
clé de ces épisodes, c'est que les Cénis ont
des chevaux et
qu'ils les vendent à bon marché. D'où le
retour inopiné
de La Salle au fort Saint-Louis sur le golfe, d'où le
nouveau départ
de Jean Cavelier vers les Illinois après l'assassinat de son
frère,
toujours grâce à ces chevaux.
En principe, les Cénis sont les Asinais
(en anglais les
Hasinais), soit les Kitsai, de la famille des Caddos (Handbook, 13:
567-571). Mais
la première « désignation » qu'en
produit
l'auteur de l'article du Handbook of north american Indians,
Doublas R.
Parks (p. 567a, soit l'énumération de Joutel
dans Margry, 3:
409-410), ne paraît pas pertinente en regard des très
nombreuses
informations des relations françaises contemporaines sur les
Cénis.
En revanche, il ne fait pas de doute que leur situation
géographique
corresponde bien à celle de ces Hasinais ou Kitsai, à
l'est de la
rivière Brazos et au sud de la Red River à la
frontière nord
de l'État du Texas (la ville de Dallas serait le centre de
leur
territoire : cf. la carte du Handbook, 13: 567).
(21) Nasoni, Nassonis (8.18).
C'est
dans leur
village que se sont habitués quatre déserteurs de
l'expédition
lors du premier séjours de La Salle et qu'on retrouve lors
de la seconde
expédition, selon le pseudo-Douay (PEF, 2: 345). Comme le
remarque Pierre
Berthiaume, il est difficile de situer ces Amérindiens de la
famille des
Caddos en regard des Naansis, que Jean Cavelier confond
peut-être dans la
description de leurs moeurs (Cavelier, p. 212-213).
(22) Katinoy (8.19).
Hapax (d). Non seulement le nom du village ne vient pas du
journal de
Cavelier, mais il ne se trouve dans aucune relation
contemporaine.
(23) Naansis (8.20). Ce sont
les
habitants des deux
premiers villages que la troupe rejoint et où elle
séjourne
après avoir quitté les Cenis et les Nasonis. Le
pseudo-Douay (PEF,
2: 349) les situe toutefois dans une suite de trois nations ennemis
des Cenis, les
Haquis, les Naviri et eux. Joutel les désigne sous le nom
d'Assonis et les
décrit longuement (Joutel, p. 264-268, éd.
Margry, 3: 387-401).
(24) Kadotako, Kadataco (8.21).
Les
Cadodaquio
(Joutel, p. 281) ou Cadodaquis (Joutel, éd. Margry, 3:
395, 401); les
Cadodacchos (PEF, 2: 349). C'est dans un de ces villages, que le
sieur de Marle
se noie un soir d'innocente baignade (PEF, 2: 341; Joutel,
p. 276, éd.
Margry, 3: 407).
(25) La rivière Souma
(8.21).
Le nom de la
rivière où de Marle se noie ne figure pas dans le
journal de
Cavelier, ni non plus dans les relations de Joutel ou du
pseudo-Douay (k).
Les Ouma ne sont pas rencontrés par les
explorateurs,
en 1682, qui apprennent seulement que leur village se trouve
à l'est (Tonty)
dans les terres (Membré, Margry, 2: 210; Prise de
possession, Margry,
2: 189; Tonty, Margry, 1: 604; et Minet, p. 35).
Les Houma ou Ouma
(d'où Souma) habitent 15 ou 20 lieues au nord de
l'embouchure de la Red
River (P. Berthiaume, Cavelier, p. 154, 158 et 214),
à la
frontière des états du Mississippi et de la Louisiane
(Foster,
Nicolas, p. 111, n. 54), soit environ 50 km au sud
de la ville
actuelle de Natchez (en face de Vicksburg, de l'autre
côté du fleuve,
à mi-chemin de Monroe et de Jackson, de la même
hauteur).
L'expédition de 1682 a donc passé devant leur village
sans s'y
arrêter, entre les Taensa (8.14) et des Quinipissa (8.8). Il
faut noter,
bien entendu, que les noms de ces deux dernières
rivières sont
également des additions de Lahontan à
l'itinéraire
décrit dans le journal de Cavelier. Elles viennent
vraisemblablement toutes
trois d'une des versions de la carte de 1697 de Louis Hennepin.
(26) Ouidachos (8.22). Sur la
rivière
anonyme des Kadotako, aussi bien le pseudo-Douay que Joutel
énumèrent
quelques tribus ou villages, mais seul le premier y situe des
Ouidiches (PEF, 2:
352), avec les Natchoos et les Natchites (cf. 28 et 29
ci-dessous).
(27) Nacoas (8.22).
Hapax (e). On ne trouve rien d'approchant dans les
énumérations de Douay et de Joutel.
(28) Natchetos (8.22). Dans
l'énumération des villages de la
rivière des Kadotako,
Joutel désigne bien les Nachitos (p. 278, ou
Natschitos, éd.
Margry, 6: 408), tandis que le pseudo-Douay prétend que les
Français
ont visité sur la rivière « trois Nations
fameuses, les
Natchoos, les Natchites, les Ouidiches » (PEF, 2: 352).
Il n'y a pas un
mot dans le journal de Cavelier sur ces Natchetos (l), tout comme sur les Nacoas du paragraphe
précédent.
(29) Cahinio (8.23).
« Aux Ouidiches nous
rencontrâmes trois guerriers de deux nations appellées
les Cahinnio
& les Mentous [situées] à 25 lieuës plus avant
tirant à
l'Est, Nordest » (PEF, 2: 353). Ce sont les deux Cahinio
qui seront
leurs guides jusqu'à l'Arkansas. Joutel ne fait pas mention
de ces
Cahinio.
(30) Akansa (8.24). En
réalité, les
Arkansas, de la famille siouse, ont quatre villages à la
jonction de
l'Arkansas et du Mississippi (et quelques autres plus haut sur le
fleuve et la
rivière) : Otsotchoue (Uzutiuhiu), Tonginga ou
Tonningua (Tonguigua)
et Cappa ou Kapa (Quapaw). Joutel désigne les quatre
village
(Joutel, p. 306), comme plusieurs voyageurs par la
suite. On trouvera
l'analyse géographique, cartographique et documentaire
situant ces villages
au coeur de l'analyse de l'expédition de Jolliet et de
Marquette par Jean
Delanglez (présentant en français un sommaire de ses
très
nombreux articles à Mid-America à ce sujet
dans
Jolliet, notamment p. 199 et 203); voir la
présentation
systématique du Handbook, « Quapaw »,
13: 497-514, et
la carte de leur territoire au XVIIe siècle, p. 498.
C'est ce dernier village, Kapa, le plus au
nord des quatre
villages principaux, et situé sur le Mississippi
(près de Deerfield
selon Foster, Nicolas, p. 28 et 140), qui constituait
le but du groupe
dirigé par Jean Cavelier, depuis leur départ des
Cénis,
après la mort de Robert Cavelier de La Salle. Et c'est
là en effet
que les Français trouveront Jean Couture, secondé de
Charles
Delaunay, auxquels Henri de Tonty a laissé la garde du
magasin et le
commandement du petit fortin qu'on y trouve maintenant. C'est ce
village des
Akansea, situé à peu près au même
endroit, qui avait
constitué le terme du voyage exploratoire de Jolliet et de
Marquette en 1673
(JR, 59: 152; un lapsus de Marquette lui fait porter le nom
illinois de Metchigamea
sur sa carte). Avec La Salle, il est devenu la clé du bas
Mississippi,
aussi bien commercialement que
« juridiquement », puisque c'est
sur la grande place du village que s'est déroulée la
cérémonie de prise de possession du Mississippi, avec
l'accord des
Arkansas (cf. le « Procès-verbal du 12-13 mars
1682 »,
Margry, 2: 181-185), et c'est bien ainsi que Cappa,
« Akansa »,
est perçu par les rescapés de
l'expédition : il leur
reste bien du chemin à faire et le voyage jusqu'aux Grands
Lacs ne sera pas
de tout repos, mais ils sont maintenant en Nouvelle-France, en pays
ami,
bientôt chez les Illinois. Ce qui se traduit
géographiquement sur la
carte de Lahontan — cf. n. (9) —, puisque le journal de
Cavelier n'a
plus rien a lui apprendre à partir d'ici, à
l'exception de la
rencontre des Chicacha.
(31) Chicacha (8.25). La Salle
a
capturé
deux Chicacha au sud de l'Ohio en 1682, croyant que leur tribu
aurait pu capturer
l'armurier de l'expédition, Pierre Prudhomme, qui s'est en
fait
égaré et qui rejoindra l'équipe plus tard sur
un radeau de
fortune (d'où le « fort » Prudhomme
où les
Français camperont dix jours).
Àremarquer que le mémoire
anonyme rapportant le
journal de Nicolas de La Salle a déjà situé
les
« Cicaca ou Chicacha » assez loin au sud de
l'embouchure de
l'Ohio (Margry, 1: 551; Foster, Nicolas, p. 97-98) dans
son journal,
le 21 février, avant d'en avoir rencontré aucun.
La Salle tente d'abord de rejoindre le village
des Chicacha
avec une partie de son équipe, mais après une
journée et demie
de marche, l'explorateur doit y renoncer en apprenant que le
village est
situé à encore trois autres jours de marche (Tonty
dans Margry, 1:
597; Membray dans Margry, 2: 207; Minet, p. 25 et 52). L'on
renvoie l'un des
Chicacha avec des présents et l'autre accompagnera
l'expédition
jusqu'au rendez-vous que l'on donne aux chefs du village sur la
rive du fleuve;
toutefois, au-delà des Akansas, on passera sans le voir le
lieu du rendez-vous
caché par une grande île (Tonty, p. 600).
Il ne sera pas
question d'eux au retour. On déduit de ces indications que
le village en
question se trouve dans les terres, à l'est du Mississippi
(on navigue
à droite et le rendez-vous était à gauche),
entre les Akansa
et les Taensa, donc au sud de l'Arkansas, avant les territoires
contrôlés par les Coroas (et les Natchez).
Ce sont les seuls Amérindiens que
rencontreraient les
rescapés du golfe du Mexique, en 1687, mais bien plus au
nord, entre les
Akansa et les Illinois (on remonte le Mississippi jusqu'à
l'Illinois
« sans rencontrer aucune nation que les
Chicacha », BNM,
p. 1179). Or, cette « rencontre »
correspond à un
nouvel épisode, mais cette fois d'ordre historiographique.
En effet, selon
le récit d'Anastase Douay inventé par Valentin
Leroux :
quittant l'Arkansas, aurait-il écrit, « nous
continuâmes
donc nostre route en remontant le Fleuve par les mêmes
endroits où le
sieur de la Salle avoit passé autrefois quand il fit sa
premiere
découverte dont je luy avois souvent oüy parler,
excepté que
nous allâmes aux Sicacha où il n'avoit pas
esté. Le Village
principal, est à 25. lieuës à l'Est des Akansa,
cette Nation est
fort nombreuse, ils sont au moins 4 000 guerriers ayant en
abondance de toutes
sortes de pelleteries, les chefs sont venus plusieurs fois apporter
le calumet,
voulant s'allier aux François & se mettre sous leur
protection, s'offrant
même de venir habiter la riviere Oüabache pour estre
plus proches de
nous » (PEF, 2: 360-361). Pour Jean Delanglez, ce
« détour » releverait de la pure
invention (Delanglez,
Cavelier, p. 155-156, n. 138). Cela fait peu de
doute, même
si l'on tient compte de la note de Joutel rapportant des propos de
leurs guides
amérindiens, en date du 9 août, qui paraissent
être la source
de l'épisode (« les Sauvages nous firent entendre
qu'il y avoit
une espèce de chemin conduisant à une nation, qu'ils
nous
nommèrent Chicacha... », Margry, 3: 468-469). En
revanche, la
situation du village selon Douay (au contraire de celle de Joutel
et de Cavelier)
correspond mieux à celle que suppose le rendez-vous
raté de La Salle
en 1682.
Si ces Chicacha sont bien les Chickasaws qui
joueront un
rôle très important contre les Français sur le
Mississippi tout
au long du XVIIIe siècle, ils seraient de la famille des
Moskégones
(DBC); originaires ou habitants de la région des villes
actuelles de Tupelo
et de Pontotoc, bien loin au sud des Arkansas, même s'ils se
rendent aussi
loin que l'Illinois (d'après Patricia Galloway,
Minet, p. 45,
n. 36). Et, en effet, les Chicacha dont il est question vers
1680 se trouvent
régulièrement beaucoup plus au nord, à l'est
du Mississippi,
au sud de l'Ohio. Dans son interprétation du journal de Jean
Cavelier, comme
on le voit sur sa carte, Lahontan les situe au nord de la
rivière, ce qui
n'est pas invraisemblable dans le cas d'un village temporaire de
chasse ou de
pêche, ce qu'on ne saurait déduire de la carte, bien
entendu.
L'objectif de cette catégorisation est
de faire la
liste des toponymes ajoutées par Lahontan au Journal de
Cavelier. On fera
aussi la courte liste des toponymes du journal, repris par
Lahontan, mais qu'on ne
trouve nulle part ailleurs.
Tous les toponymes relatifs au Mississippi qui
se trouvent
dans le journal de Jean Cavelier, à la curieuse exception de
la
rivière aux Vaches (8.1), sont reportés par Lahontan
sur sa carte.
Cinq d'entre eux, les orphelins, ne se trouvent dans aucun autre
document et ne
peuvent donc être situés que par l'analyse de
l'itinéraire
présenté par le journal, ce qu'a
réalisé Pierre
Berthiaume dans son glossaire (Cavelier, p. 207-216),
dont j'ai repris
les conclusions.
En revanche, Lahontan ajoute onze toponymes
sur ce trajet du
bas Mississippi (sans compter le rio del Carbon du haut
Mississippi). Or,
l'intérêt est que ces toponymes se divisent en deux
catégories
aussi intéressantes l'une que l'autre. D'une part, quatre
hapax, soit ceux
que je n'ai encore jamais trouvés ailleurs (et qui ne
peuvent pas tous
être des fautes de lecture de la carte); et d'autre part sept
qui sont connus
par d'autres sources. Car dans les deux cas la question se pose de
savoir
d'où Lahontan a tiré l'information et c'est
paradoxalement pour les
toponymes connus par d'autres documents que le problème est
intriguant,
puisqu'on a la preuve que Lahontan ne les a pas inventés,
alors qu'on ne
voit pas où il les a trouvés — problème
qui devrait
pourtant être facile à résoudre !
L'hypothèse que Lahontan se soit
aidé de la
carte de Louis Hennepin de 1697 est fort plausible. Il en aurait
tiré ses
rivières Quinepissa (h), Taensa (i) et Souma (k) et, si tel
était le
cas, le dessin de sa rivière Masotanta (la rivière
Otenta de Louis
Hennepin), « dessin » qu'il developpera en le
reportant bien
au nord pour dessiner sa rivière Longue, pure invention.
C'est d'ailleurs
l'hypothèse qui doit être retenue jusqu'à
preuve du contraire.
En effet, il est certain que Lahontan connaît la carte de
1697 de Louis
Hennepin, puisqu'il prend soin de la dénigrer dans sa lettre
à
Jovanezo présentant sa Mappa del Missisipi comme la
plus
« fidele » et la mieux
« particularizee en toute
l'Europe », disant qu'« il n'i a eu qu'un moine
recollet qui
s'est avisé d'en faire une tout à fait simple qu'il
a dediee au roi
d'Angleterr avec un livre rempli de niaiseries » (BNM,
p. 1114-1115).
C'est vrai. La représentation du Mississippi sur carte de
Hennepin est
simpliste et son livre rempli de niaiseries. Mais le petit moine
n'aurait pas
manqué de retourner les qualificatifs contre notre baron,
s'il avait su,
comme nous, qu'il utilisait sa carte pour compléter la
sienne.
Cela dit, trois (ou quatre, puisque celui de
Coroa (j) se
trouve également sur les deux cartes) toponymes repris ou
inspirés
de la carte de Louis Hennepin, avec son dessin de la rivière
des Otenta,
cela ne règle pas le problème de savoir où
Lahontan a
trouvé les autres toponymes qui ne figuraient pas au journal
de Jean
Cavelier et encore moins les quatre ou cinq hapax de sa carte. Il
est donc certain
que Lahontan a utilisé (aussi) une autre source.
Laquelle ? —
Pour répondre à la question, il ne faut pas oublier
que Lahontan
n'est pas un savant chercheur. C'est au contraire un dilettante
qui va
bientôt (1702) produire une oeuvre populaire géniale
qui aura des
répercussions dans tout le monde occidental durant plusieurs
siècles.
Par conséquent, la réponse à notre question ne
se trouve pas
dans les archives, mais dans des documents ou des cartes que tout
le monde pouvait
avoir sous les yeux avant 1700.
Toponymes ajoutés par Lahontan au
journal de Cavelier,
qui sont sans équivalent dans les documents
contemporains.
(a) Rio del carbon
(7.5)
(b) Kinesta
(8.2).
(c) Rio de las
catias (8.3).
(d) Katinoy
(8.19).
(e) Nacoas
(8.22).
Toponymes ajoutés, mais connus ou
reconnus dans les
documents contemporains.
(f) Erigons
(8.2). Il s'agit
des Erigoanna nommés par le pseudo-Douay (PEF, 2: 331). Ils
ne sont pas
situés, mais désigné comme des ennemis de
leurs voisins, les
Bahamos, probablement les Bracamos de Jean Cavelier (BNM,
p. 1167).
(g) Taracas
(8.7). Ce sont
les Taraha du pseudo-Douay (PEF, 2: 335).
(h) La
Rivière
Quinipissa (8.8). Les Quinipissa sont désignés dans
toutes les
relations de l'expédition de 1682. Or, Hennepin en fait
l'équivalent
de la Sablonnière sur sa carte de 1697, situant ces
Quinipissa au nord ou
à l'embouchure de la rivière.
(i) La
Rivière Taensa
(8.14). Comme les Quinipissa, les Taensa sont identifiés
dans toutes les
relations de l'expédition de 1682. Mais les Tansea
désignent un
village, non une rivière sur la carte de Hennepin dont il
vient d'être
question.
(j) Coroa
(8.15). Les Coroa
ou Koroa appellent la même observation qu'au paragraphe
précédent, sauf que cette fois-ci il s'agit dans les
deux cas d'un
village, aussi bien chez Hennepin que sur la carte de Lahontan.
(k) La
Rivière Souma
(8.21). Vraisemblablement une déformation de la
« rivière » des Ouma, de l'est du
Mississippi,
déployée à l'ouest par Hennepin sur sa carte
de 1697.
(l) Natchetos
(8.22). Henry
Joutel désigne des Nachitos ou Natschitos (p. 278,
éd. Margry,
6: 408) et le pseudo-Douay des Natchoos et des Natchites (PEF, 2:
352). Ils ne
correspondent apparemment pas aux Natchez.
Toponymes du journal de Jean Cavelier, repris
par Lahontan,
qu'on ne trouve pas dans les documents contemporains.
(m) Akas
(8.10).
(n) Penoy
(8.11).
(o) Sasori
(8.12).
(p) Tipoy
(8.13).
(q) Anamis
(8.16).
On trouvera la liste des cartes
étudiées ou
utilisées dans l'étude bibliographique à
venir. Pour les fins
de la présente section, je renvoie seulement aux cartes
suivantes, bien
connues, que je désigne en abrégé (avec
références, à titre indicatif, aux exemplaires
que j'ai
utilisées). Les cartes de Delisle et de Hennepin se
consultent très
efficacement par l'internet sur Gallica de la BNP.
Delisle, 1700a : Guillaume Delisle,
l'Amérique
septentrionale, 1700, première édition, BNP,
Cartes et plans,
Ge.D.11685.
——, 1700b : l'Amérique
septentrionale, 1700, seconde édition, BNP, Cartes et
plans,
Ge.C.7902.
Franquelin, 1684 : Jean-Baptiste Franquelin,
Carte de la
Louisiane ou des voyages du Sr de La Salle, Paris, 1684
(original perdu), copie
faite pour Francis Parkman, Library of Havard University,
reproduction en
frontispice de JR, vol. 63.
Hennepin, 1683 : Louis Hennepin, Carte de
la Nouvelle
France et de la Louisiane, BNP, Cartes et plans,
Ge.DD.2987.(8781).
——, 1697 : Carte d'un nouveau
Monde entre le
nouveau Mexique et la mer Glacialle. On peut confronter quatre
versions de la
carte datées de 1697 et 1698 dans le porte folio de Kerwin
Kaufman, the
Mapping of the Great Lakes in the seventeenth century, John
Carter Brown
Library, 1989. — Les toponymes cités ici se
retrouvent dans toutes
les versions.
Marquette, 1673 : Jacques Marquette, sans
titre
(itinéraire du voyage d'exploration de Louis Jolliet et de
Jacques
Marquette), Archives des jésuites de Montréal,
reproduction
photographique dans JR, 59: 108/109, redessinée dans les
Relations
inédites de la Nouvelle-France, éd. de
Félix Martin,
Paris, Douniol, 1961, réimp., Montréal,
Élysée, 1974,
2 vol., vol. 2, p. 372-373.
Berthiaume, Cavelier : Pierre
Berthiaume, Cavelier
de La Salle : une épopée aux Amériques
(récits de
trois expéditions, 1643-1687), Paris, Cosmopole, 2001,
224 p.
— Édition des récits de Bréhant de
Galiné,
d'Henry de Tonty et de Jean Cavelier, avec un sommaire critique des
« aventures » de Robert Cavelier de La Salle et
de son
frère. Lexique des tribus amérindiennes.
DBC : G. W. Brown, M. Trudel et A. Vachon,
Dictionnaire
biographique du Canada, Québec, PUL, vol. 1 et 2,
1966 et 1969.
Delanglez, Cavelier : Jean Delanglez,
the Journal
of Jean Cavelier : the account of a survivor of La Salle's
Texas expedition
(1684-1688), Chicago, Institute of Jesuit History, 1938,
179 p. —
édition du texte français et traduction
annotée,
précédée d'une étude critique du
document.
——, Jolliet : Louis
Jolliet : vie
et voyages (1645-1700), Montréal, Granger (coll.
« Les
études de l'Institut d'histoire de l'Amérique
française »), 1950, 435 p.
DL : cf. Hennepin.
Foster, Nicolas : William C. Foster,
the La Salle
expedition on the Mississippi River : a lost manuscript of
Nicolas de La
Salle, 1682, traduction de Johanna Warren, introduction et
commentaire critique
de W. C. Foster, Austin, Texas State Historical Association, 2003,
xvi-176 p.
— Le manuscrit inédit des Texas State Archives est une
seconde version
du texte anonyme consignant le journal de Nicolas de La Salle. La
version
éditée par Margry (1: 547-570) appartenait à
un collectionneur
privé, de sorte que le manuscrit ne peut pas être
confronté
à celui du Texas édité ici. Cela dit, non
seulement les
différences sont minimes, mais leur interprétation
porte à
controverse sur la chronologie de l'expédition (cf.
Berthiaume,
Cavelier, p. 154-155). En revanche, l'annotation, les
cartes et le
tableau synoptique du dernier appendice sont très
précieux pour
suivre l'itinéraire des explorateurs et la toponymie de
leurs
récits.
Galloway, Minet : « The Minet
Relation », traduction d'Ann Linda Bell et annotation de
Patricia
Galloway, La Salle, the Mississippi and the gulf, éd.
de Robert S.
Weddle, Texas A&M University Press, 1987, 329 p.,
p. 17-68.
Handbook : William C. Sturtevant,
responsable de
l'encyclopédie, Handbook of North American Indians,
Washington,
Smithsonian Institution, 20 vol., vol. 13, sous la direction
de Raymond J.
DeMallie, 2001; et vol. 14, sous la direction de Raymond D.
Fogelson, 2004.
— Sauf dans les cas de citations ou d'utilisation
systématique du
texte, je n'identifie pas les auteurs des articles qu'on trouvera
nommés
dans le titre courant, en bas des pages citées.
Hennepin : Louis Hennepin, Description de
la Louisiane,
Paris, Huré, 1683, 312 p.
——, Nouvelle Découverte
d'un très
grand pays situé dans l'Amérique..., Utrecht,
Broedelet, 1697,
506 p., et Nouveau Voyage d'un pais plus grand que
l'Europe...,
Utrecht, Schouten, 1698, 389 p. — Il s'agit du
développement
fabuleux en deux volumes de l'ouvrage précédent, dont
l'essentiel
était déjà un simple plagiat d'un
mémoire de Claude
Bernou (la « Relation officielle », Margry, 1:
435-544), sauf
les pages autobiographiques sur sa
« captivité » chez
les Sioux de l'Est en 1680-1681.
Joutel : Henry Joutel, Journal historique
du dernier voyage
que feu M. de La Salle fit dans le Golfe du Mexique...,
éd. de M. de
Michel, Paris, Estienne Robinot, 1713, 386 p. — On fera
attention que
cette édition populaire n'est pas à proprement parler
un
résumé du manuscrit de Joutel et qu'on ne saurait la
remplacer par
la version reconstituée par Pierre Margry (au vol. 3 de
sa
série), à partir la version manuscrite originale
malheureusement
tronquée. Il est préférable de confronter les
deux versions
souvent divergentes.
JR : Reuben Gold Thwaites, the Jesuit
Relations and allied
documents..., Cleveland, Burrows Brothers, 1896-1901,
réimp., New York,
Pageant Book, 1959, 73 vol.
Lahontan, BNM ou NV et MA : désignent
l'OEuvre
complète de la BNM en 1990 ou respectivement les Nouveaux
Voyages
(1702) et les Mémoires de l'Amérique
septentrionale (1702) de
Lom d'Arce de Lahontan, cités dans l'édition
originale, dont on
retrouve la pagination dans la BNM, OEuvres
complètes,
édition
de Réal Ouellet, avec la collaboration d'Alain Beaulieu,
Montréal,
PUM (coll. « Bibliothèque du nouveau
monde »), 1990,
2 vol. de pagination continue, 1474 p.
MA : cf. Lahontan.
Margry : Pierre Margry, Découvertes
et
établissements des Français dans l'ouest et dans le
sud de
l'Amérique septentrionale (1614-1698), Paris, D.
Jouaust, 1876,
réimp. New York, AMS Press, 1974, 6 vol.
Minet : Voyage fait du Canada par dedans
les terres allant
vers le sud dans l'année 1682, manuscrit inédit
des Archives
publiques du Canada, 61 p. — Voir Galloway.
NV : cf. Lahontan.
BNM : cf. Lahontan.
PEF : Valentin Leroux (paru sous le nom de
Chrestien
Leclercq), Premier Établissement de la foi dans la
Nouvelle-France,
Paris, 1691, réimp. sous le titre Histoire des colonies
françaises
et les fameuses découvertes depuis le fleuve S. Laurent, la
Loüisiane
et le fleuve Colbert jusqu'au golphe Mexique, Paris et Lyon,
Amaulry, 1692,
2 vol. — C'est au second volume que Valentin Leroux,
édite et
réécrit des textes qu'il attribue (faussement) aux
récollets
Zénobe Membré et Anastase Douay. D'une part on
connaît
aujourd'hui les auteurs de plusieurs des textes
réécrits, tandis que
d'autre part on reconnaît facilement la plume du
récollet
janséniste. — Si je précise que je cite le
« pseudo-Douay » (ce sont les chap. 24 et
25 de l'ouvrage), c'est qu'Anastase Douay n'est pour rien dans ces
textes, notamment dans le chap. 25 qui lui est explicitement
attribué, contrairement aux textes de Zénobe Membray,
du moins pour le chap. 22 qui est manifestement de sa main, le
chap. 23 étant une transcription sous son nom d'une
relation de Claude Bernou, dont une lettre de Membré est
l'une des deux sources principales.
|