TdM RRR / Le Recueil des Récits de Rêve - Édition de Guy Laflèche TGdM

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Le rêve de Frédéric Moreau
Situation Localisation Notes Variantes Références Bibliographie

Gustave Flaubert, l'Éducation sentimentale, roman, 1869

      Puis il se coucha, avec une douleur intolérable à l'occiput; et il but une carafe d'eau, pour calmer sa soif.

      Une autre soif lui était venue, celle des femmes, du luxe et de tout ce que comporte l'existence parisienne (1). Il se sentait quelque peu étourdi, comme un homme qui descend d'un vaisseau; et, dans l'hallucination du premier sommeil, il voyait passer et repasser continuellement les épaules de la Poissarde, les reins de la Débardeuse, les mollets de la Polonaise, la chevelure de la Sauvagesse (a) (2). Puis deux grands yeux noirs, qui n'étaient pas dans le bal, parurent; et légers comme des papillons, ardents comme des torches, ils allaient, venaient, vibraient, montaient dans la corniche, descendaient jusqu'à sa bouche. Frédéric s'acharnait à reconnaître ces yeux sans y parvenir. Mais déjà le rêve l'avait pris; il lui semblait qu'il était attelé près d'Arnoux (3), au timon d'un fiacre, et que la Maréchale (4), à califourchon sur lui, l'éventrait avec ses éperons d'or.


Notes

(1) L'édition critique de Garnier, afin d'éclaircir ce passage et cette époque en général, cite des notes que Flaubert a prises dans ses scénarios et ses manuscrits : « C'était le moment historique du siècle () on s'amusait le plus. Les vieilles moeurs libres des artistes n'étaient pas encore mortes. Les affaires d'argent, Californie, chemins de fer, commençaient, et la vague agitation d'une révolution imminente ».

(2) Juste avant ce rêve, Frédéric se rend à un bal costumé donné par Rosannette Bron dans sa demeure. Ces surnoms appartiennent à des femmes qui s'y trouvaient et que le jeune homme a vues.

(3) Jacques Arnoux est le mari du grand amour de Frédéric, Marie. C'est lui qui a entraîné le jeune homme au bal en lui promettant qu'il s'y amuserait beaucoup tout en y rencontrant des gens importants.

(4) La Maréchale est le surnom de Rosannette. Frédéric continuera de la désigner ainsi.


Variantes

(a) Dans l'édition originale de 1869, la phrase ne se terminait pas ici : « ... Sauvagesse; puis... » (précision de l'édition de Wetherill).


Références

Gustave Flaubert, l'Éducation sentimentale, Paris, Bibliothèque-Charpentier, 1891, p. 156-157.

Édition originale

Gustave Flaubert, l'Éducation sentimentale, Paris, Lévy, 1869.

Éditions critiques

Gustave Flaubert, l'Éducation sentimentale, éd. P. M. Wetherill, Paris, Garnier, 1984, p. 128-129.

——, l'Éducation sentimentale, éd. C. Gothot-Mersch, Paris, Garnier-Flammarion, 1985, p. 183-184.


Situation matérielle

      Deuxième partie (sur trois), fin du chapitre 1 (sur six), soit au premier tiers du roman.


Situation narrative

      Frédéric est de retour à Paris avec son héritage en poche. Il décide, après s'être acheté de nouveaux habits, de rendre une petite visite à monsieur et madame Arnoux. Il est un peu déçu en voyant cette dernière car il ne ressent pas les grandes émotions qu'il s'était imaginées. Arnoux lui propose ensuite d'aller à un bal et c'est à cet endroit qu'il rencontre la Maréchale, la maîtresse du logis. Cette fête est haute en couleurs : tout le monde danse, chante, boit et mange toute la nuit. Au petit matin, les deux hommes retournent chez eux et c'est après s'être couché que Frédéric fait ce rêve.


Bibliographie

Canovas : 30 et 48.

Nicole Cabassu, « Flaubert et le récit de rêve », le Récit de rêve dans la littérature française moderne (XIXe et XXe siècles) : étude thématique et stlystique, thèse de doctorat inédite, Paris, Université de Paris IV/ Sorbonne, 1991, 2 vol., 366 p., p. 160-171. — Étude du seul rêve de la correspondance (3 mars 1856).



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