Les rêves d'un homme qui dort
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Georges Perec,
Un homme qui dort,
roman,
1967
Parfois, l'obscurité dessine d'abord la
forme imprécise d'un as de pique : il y a devant toi un
point d'où fuient deux lignes qui s'écartent et
reviennent vers toi après un long virage.
Plus tard, c'est un océan, une mer
noire sur laquelle tu navigues, comme si ton nez était
l'arête, ou plutôt l'étrave d'un gigantesque
paquebot. Tout est noir. [...]
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Références et
Situation matérielle.
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[...] Le phénomène se reproduit plusieurs fois,
régulièrement : rien d'abord, puis des points
à peine lumineux, une tête de panthère qui
s'esquisse, puis se précise, grandit en rugissant,
découvrant deux crocs acérés, puis un point
scintillant, presque éclatant, qui s'enfle, losange,
étoile, puis boule de lumière qui vient sur toi,
t'évite de justesse, passant si près de toi que tu as
presque cru la toucher, la sentir, l'entendre, puis rien à
nouveau, longtemps, des points blancs, la tête de la
panthère, l'étoile qui grandit et te frôle.
Puis rien, longtemps, ou bien, plus tard,
parfois, quelque part, quelque chose comme un astre blanc qui
explose.
Références
Georges Perec, Un homme qui dort, Paris, Denoël (coll.
« Les lettres nouvelles »), 1976,
p. 99-104.
Édition originale
Georges Perec, Un homme qui dort, Paris, Denoël (coll.
« Les lettres nouvelles »), 1967.
Édition critique
Georges Perec, Un homme qui dort, Paris, Gallimard (coll.
« Folio Plus »), 1998, p. 77-80.
Situation matérielle
Les deux rêves font l'objet du chapitre
neuf (les chapitres ne sont pas numérotés toutefois);
le chapitre se divise en deux parties correspondant aux deux
séquences oniriques.
Situation narrative
Le chapitre neuf fait figure de césure
du point de vue narratif. Avant ce chapitre, le personnage
principal se coupe volontairement du monde, adoptant une attitude
d'indifférence totale et en même temps de
sérénité face à cette
indifférence. Le chapitre évoquant ces cauchemars
ouvre en quelque sorte la voie à une angoisse, à un
enfer d'insomnie et d'errance. À remarquer
que le chapitre 11 comprend également des images de sommeil
et de rêves, mais sans qu'on puisse y découper de
récits de rêve.
Bibliographie
Canovas : cité en bibliographie, le roman n'est jamais
évoqué dans la thèse.
Manet van Montfrans, Georges Perec : la contrainte du
réel, Amsterdam, Atlanta, éd. Rodopi, 1999,
p. 89-97, 114-119.
Sylvie Rosenski-Pellerin, Perecgrinations ludiques, Toronto,
éd. du Gref, 1995, p. 165-169.
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