Le dernier rêve de Jeanne (*)
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Julien Green,
Varouna,
roman,
1940
Je note aussi (1) le
rêve qui m'a visitée tout à l'heure, alors que
je sommeillais sur une chaise longue. Il m'a semblé que la
petite Hélène Lombard (2)
s'approchait de moi dans une lumière de crépuscule et
m'appelait à mi-voix : « Jeanne, disait-elle,
cette chaîne que vous portez au cou... ». J'avais,
en effet, une chaîne autour du cou, la chaîne magique,
la chaîne dont je crois parfois sentir les anneaux sous mes
doigts. « Ne vous étonnez pas, dit alors la femme
au voile de neige. Cette chaîne est bien à vous.
Souffrez seulement que j'y joigne ceci ».
Et de ses mains délicates, elle y
attache une croix.
Notes
(*) Varouna est un roman fantastique et
plus précisément un récit d'aventures
fantastique se présentant sous la forme du conte merveilleux
au début et du journal intime à la fin. Il comprend
une quinzaine de rêves. On trouve ici le dernier rêve
de Jeanne. On donne aussi comme échantillon le premier des
rêves de Hoël, qui ouvre le roman, au second
chapitre.
(1) Dans la bibliothèque de leur nouvelle
demeure londonnienne, Jeanne rédige en quelques mots sa
conviction que sa rencontre avec Louis tient du miracle, un peu
comme cette chaînette,
« redécouverte » dans une vitrine du
British Museum, qu'ils avaient tous les deux déjà vue
dans leurs rêves.
(2) L'héroïne de la seconde partie du
roman à laquelle Jeanne a déjà
rêvé.
Références
Julien Green, Varouna, Paris, Plon (coll. « La
Palatine »), 1940, p. 278-279.
Édition originale
Julien Green, Varouna, Paris, Plon (coll. « La
Palatine »), 1940, p. 278-279.
Éditions critiques
Julien Green, OEuvres complètes, éd. Jacques
Petit, vol. 2, Paris, Gallimard (coll.
« Bibliothèque de la pléiade »),
1972, « Varouna ».
Situation matérielle
Ce sont les dernières lignes du
roman.
Situation narrative
L'histoire de Hoël se déroule il
y a plusieurs siècles, s'opposant à celle
d'Hélène au Moyen Âge et à celle de
Jeanne au début du XXe siècle. Ces trois histoires
en impliquent plusieurs autres, toutes liées par une
chaînette que Hoël trouve sur la plage au début
du roman, chaîne qui vient du fond des âges et que
Jeanne retrouvera au British Museum à la fin. On trouve ici
les dernières lignes de son journal, datée de mai
1914.
Bibliographie
Canovas : les rêves de Varouna ne font pas partie
de son corpus.
FIELD, Trevor, « The litterary significance of dreams in
the novels of Julien Green », Modern Language
Review, Cambridge, 1980, no 75, p. 291-300, notamment
p. 294-295.
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