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Le second songe de la mère de Guibert de
Nogent
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Guibert de Nogent,
Autobiographie (De vita sua, sive
monodiarum),
histoire/autobiographie,
1115
Chapitre 18
Ma mère, cependant, ravie de mes
heureux progrès
quant à la science, ne cessait d'être
tourmentée, redoutant
pour moi les égarements de l'âge des
voluptés : c'est
pourquoi elle me demandait sans cesse de suivre son exemple, elle
à qui Dieu
avait donné une si grande beauté et qui cependant
dédaignait
tout ce qui était loué en elle, comme si elle
n'eût pas
même su qu'elle fût belle, et honorait son veuvage
comme si elle
eût eu toujours horreur des devoirs conjugaux et n'eût
pu jamais
tolérer ses obligations envers la couche nuptiale. Tu sais
cependant,
Seigneur, quelle fidélité, quel amour elle conserva
toujours à
son époux défunt; par combien de sacrifices, de
prières, de
larmes et de grandes aumônes, elle travaillait tous les jours
et sans
relâche pour la délivrance de son âme, qu'elle
savait
embarrassée dans les liens du péché. À
cette occasion,
il arrivait, par une merveilleuse dispensation de Dieu, que les
douleurs que cette
âme avait à supporter dans son purgatoire,
étaient
représentées à ma mère dans de
très-
fréquentes visions et avec les détails les plus
minutieux. Il n'est
pas douteux que ces sortes de visions ne viennent de Dieu. En
effet, si l'on ne
cherche point à se donner une mauvaise
sécurité en prenant
à faux les apparences de cette belle lumière, mais si
plutôt
ces images de douleur et de châtiment ne font qu'exciter
à la
prière et aux aumônes, [433] si l'on s'acquitte
soigneusement des
offices réclamés par les morts, et même par les
anges qui
prennent soin des morts, cela seul prouve que de telles visions
viennent de Dieu,
car les démons ne demandent jamais rien qui puisse servir au
salut de
personne. Ainsi l'âme excellente de cette femme se calmait
par cette
apparition, et en voyant les tourments qu'endurait celui qui avait
été autrefois son époux, elle s'animait de
plus en plus pour
obtenir le succès de ses constantes intercessions.
Entre autres occasions, une certaine nuit de
dimanche,
après Matines, du temps de l'été, ma
mère ayant
reposé ses membres sur un banc excessivement étroit,
fut
bientôt accablée par le sommeil, et il lui sembla
qu'elle sentait son
âme sortir de son corps. Après donc que son âme
eut
été conduite comme à travers une certaine
galerie, elle en
sortit enfin et se trouva transportée vers le bord d'un
certain puits.
Lorsqu'elle s'en fut bien rapprochée, voilà qu'il
sort du fond de ce
puits des ombres d'hommes, dont la chevelure paraissait
rongée de teigne,
et qui veulent la saisir de leurs mains et l'entraîner dans
le gouffre. Mais
voici, une voix, se faisant entendre derrière cette femme
toute tremblante
et misérablement agitée par une telle attaque, et
s'adressant
à ces hommes (a), leur crie :
« Gardez-vous de toucher à cette
femme ».
Chassées par cette voix, les ombres se replongèrent
dans le puits.
J'avais oublié de dire que tandis que ma mère
s'avançait le
long de la galerie, sentant qu'elle avait dépouillé
le corps humain,
son âme ne demandait autre chose à Dieu, sinon qu'il
lui fût
permis de rentrer dans son corps. [434] Ainsi
délivrée de ceux qui
habitaient dans le puits, elle s'arrêta sur le bord, et tout
à coup
elle vit apparaître mon père devant elle, avec la
figure qu'il avait
dans la jeunesse : l'ayant regardé bien attentivement,
elle lui demanda
d'une voix suppliante s'il était en effet celui-là
même qui
s'appelait Everard (car c'est ainsi qu'il avait été
nommé
jadis), et celui-ci lui dit que non.
Il n'est pas étonnant que
l'esprit (1) ait nié d'être signalé par le
nom qu'il
portait jadis, quand il était homme; car un esprit ne doit
faire à
un esprit d'autre réponse que celle qui convient aux choses
spirituelles.
Or, il serait complètement absurde de croire que les esprits
puissent avoir
réciproquement connaissance de leurs noms, puisque, dans ce
cas, nous ne
devrions, dans la vie à venir, connaître que ceux qui
ont
été des nôtres. D'ailleurs il n'est nullement
nécessaire
que les esprits aient des noms, eux pour qui toute vision, toute
science même
de vision est intérieure. Comme donc celui qui apparaissait
à ma
mère eut nié qu'il s'appelât ainsi qu'elle
disait, et comme
cependant ma mère n'en avait pas moins le sentiment que
c'était
lui-même, elle lui demanda ensuite en quel lieu il
séjournait :
alors il lui indiqua une place non loin de celle où ils
étaient (2), comme étant le
lieu de sa
résidence. Elle lui demanda de plus comment il se trouvait.
Lui, alors,
découvrant son bras et son flanc, les lui montra l'un et
l'autre tellement
meurtris, tellement déchirés de nombreuses blessures,
que celle qui
le vit en éprouva une grande horreur et un violent
ébranlement dans
tout son corps.
[435] À cela vint s'ajouter
l'apparition d'un certain
petit enfant, qui poussait de tels cris que celle qui le vit en
ressentit aussi une
vive angoisse. Émue par ces accents, elle dit à
l'autre :
« Comment, Seigneur, peux-tu supporter les hurlements de
cet
enfant ? — Que je le veuille ou non, répondit-il,
je les
supporte ». Or, les pleurs de cet enfant et les blessures
au bras et dans
le flanc [exigent] cette explication :
Comme mon père, dans les années
de sa jeunesse,
avait renoncé, par les maléfices de quelques
personnes, à ses
légitimes communications avec ma mère (3),
quelques mauvais conseillers, s'emparant de son esprit encore
jeune,
essayèrent de l'engager, par leur maligne influence,
à se lier avec
d'autres femmes. Se livrant trop légèrement, mon
père forma
en effet une mauvaise liaison avec une certaine femme (je ne sais
qui elle
était) dont il eut un enfant, lequel mourut le jour
même de sa
naissance, et sans avoir reçu le baptême. Ainsi ces
blessures que mon
père avait dans le flanc désignaient le mépris
qu'il avait eu
pour la foi conjugale; et les cris perçants de cette voix
importune
indiquaient la perdition de cet enfant si misérablement mis
au monde. Tels
étaient, ô Dieu dont la bonté est
inépuisable, tels
étaient les actes de ta justice sur l'âme de ton
pécheur,
d'après le témoignage sincère d'une personne
vivante (b)... Mais revenons à notre récit de
la vision.
Lorsque ma mère lui eut demandé
si la
prière, les aumônes et le sacrifice lui donnaient
quelque soulagement
(car elle avait la conscience qu'elle en [436] faisait très
souvent pour
lui), et comme celui-ci lui eut répondu par un signe
affirmatif, il
ajouta : « Mais il y a une certaine
Léodegarde qui habite
parmi vous ». Alors ma mère comprit qu'il la lui
avait ainsi
nommée, dans l'intention que ma mère demandât
à cette
même femme quel souvenir elle avait conservé de
lui (c). Or, cette Léodegarde était une
femme très
pauvre d'esprit (4), et qui vivait
très simplement en
Dieu seul, sans s'occuper des affaires du siècle. Cependant
ma mère,
mettant fin à son entretien avec mon père, tourna ses
regards vers
le puits sur lequel était une planche : sur cette
planche elle vit un
certain Renaud, chevalier, qui n'avait pas peu de
considération parmi les
siens, et qui, ce jour-là même, qui était,
comme je l'ai
déjà dit, un dimanche, fut traîtreusement mis
à mort
à Beauvais, après son dîner, par les gens de la
ville (5). Cet homme, donc, était sur cette
planche : ayant
fléchi les deux genoux, et baissant la tête en face
d'un tas de bois,
il attisait un feu en soufflant de ses deux joues qui soufflaient
en même
temps. Ces choses se passaient le matin à la vue de ma
mère, et cet
homme, qui devait se rendre vers les feux qu'il avait
allumés par sa
conduite, mourut à midi. Sur la même planche ma
mère vit en
outre un certain frère à moi, qui aidait à cet
autre homme,
mais qui s'en alla longtemps après (d), et qui jurait,
par le terrible sacrement du corps et du sang du Seigneur (en quoi
l'on ne fait pas
mieux que si l'on se parjure, ou si l'on invoque le saint nom du
Seigneur et les
saints mystères pour une chose futile) que cet homme avait
bien
mérité d'être en un tel lieu et d'y recevoir un
tel
châtiment.
[437] Dans le cours de cette même vision
ma mère
vit encore cette vieille femme avec laquelle j'ai
déjà dit qu'elle
avait vécu au commencement de sa conversion (6) :
cette femme avait toujours, il est vrai, le corps tout couvert au
dehors d'un grand
nombre de croix (7), mais en même
temps, à ce
qu'on assurait, elle savait peu se défendre des
prétentions d'un vain
orgueil : ma mère, dis-je, la vit sous l'apparence
d'une ombre,
emportée par deux esprits très noirs. Tandis que
cette vieille femme
était en vie, et qu'elle et ma mère habitaient toutes
deux ensemble,
comme elles s'entretenaient souvent de la situation de leur
âme et de ce qui
leur arriverait après leur mort, elles s'étaient
promis un jour l'une
à l'autre que celle des deux qui mourrait la première
viendrait, avec
la grâce de Dieu, apparaître à celle qui aurait
survécu,
et lui révéler quelle serait alors sa condition, soit
bonne, soit
mauvaise. Elles confirmèrent en outre cette promesse par
leurs
prières, demandant à Dieu, par d'assidues instances,
qu'après
la mort de l'une d'elles il fût permis à l'autre de
dévoiler
en vision à sa compagne l'état de bonheur ou de
malheur dans lequel
elle se trouverait. Cette vieille femme, avant de mourir,
s'était vue aussi
en vision dépouillée de son corps, se rendant, avec
d'autres femmes
semblables à elle, vers un certain temple, et il lui avait
paru que, tandis
qu'elle marchait, on lui enlevait une croix de dessus les
épaules (e). Arrivée au temple avec l'escorte qui la
suivait, les
portes se fermèrent devant elle, et elle fut obligée
de demeurer en
dehors. Enfin, lorsqu'elle fut morte, elle apparut, infectée
d'une
extrême puanteur, à une autre femme, qu'elle remercia
très
vivement de ce [438] que ses prières l'avaient
délivrée de sa
puanteur et de ses douleurs. En outre, cette même femme,
pendant qu'elle
était mourante, vit se présenter devant elle, au pied
de son petit
lit, un démon d'une taille horrible et d'un aspect
effrayant. Cependant,
à force de le supplier, par tous les sacrements divins, de
se retirer loin
d'elle, en l'abandonnant à sa confusion, et de ne lui rien
demander de ce
qui lui appartenait, elle l'éloigna enfin par de terribles
exorcismes.
Ma mère donc, en conséquence de
cette vision,
comparant la vérité à la vérité,
et comprenant,
d'après la prédiction bientôt accomplie sur ce
chevalier qui
fut tué peu après, et qu'elle avait vu par avance
recevant son
châtiment dans l'enfer; comprenant, dis-je, ce que voulaient
dire les cris
de cet enfant, dont elle n'avait point ignoré l'existence,
et n'ayant aucun
doute sur aucun de ces points s'appliqua toute entière
à porter
quelque secours à mon père. Opposant donc le
semblable au semblable,
peu de mois après, elle choisit un tout petit enfant,
privé de ses
parents, qu'elle résolut de prendre et d'élever
auprès d'elle.
Mais le diable, détestant ses pieuses intentions, non moins
que cette
action, témoignage de sa fidélité, tandis que
l'enfant
demeurait fort calme durant toute la journée, et passait son
temps tour
à tour à jouer ou à dormir, tourmentait ma
mère et
toutes ses servantes pendant la nuit par les cris douloureux de cet
enfant encore
au berceau, tellement qu'à peine était-il possible
à qui que
ce fût de prendre un moment de sommeil dans la même
chambre. J'ai
entendu dire qu'il y avait eu des nourrices payées au poids
de l'or par ma
mère, qui, durant toute la [439] longueur de la nuit, ne
cessaient d'agiter
les jouets de cet enfant toujours agité non de
lui-même, mais par le
démon qui agissait en lui, sans que toutes leurs adresses
féminines
pussent réussir à détourner celui qui le
tourmentait ainsi.
Cette pieuse femme était donc en proie
de très
vives douleurs, ne pouvant parvenir par aucun moyen à faire
cesser ces cris,
et à calmer les angoisses de ces nuits agitées; sa
tête
fatiguée et presque épuisée ne pouvait trouver
un seul moment
de sommeil, tant que les fureurs qui agitaient l'enfant ne
pouvaient être
chassées au dehors, tant que son ennemi était
présent, jetant
le trouble tout autour de lui. Et, quoiqu'elle passât de la
sorte ses nuits
sans goûter le sommeil, jamais elle ne fut trouvée
négligente
pour les offices divins, qui sont célébrés
pendant la nuit.
Comme elle savait que ces tourments serviraient à faire
cesser les tourments
qu'endurait son époux, selon ce qu'elle avait vu dans sa
vision, elle les
supportait volontiers : en quoi il lui semblait, ce qui, en
effet,
était vrai, qu'en prenant ainsi compassion de celui qui
souffrait, elle
soulageait elle-même ses souffrances. Jamais non plus elle ne
chassa l'enfant
de sa maison, jamais elle ne se montra moins empressée
à le
soigner : au contraire, elle s'appliquait d'autant plus
à supporter
avec fermeté d'âme tout ce qui pouvait en ce point lui
donner du
désagrément, qu'elle reconnaissait que le diable
s'animait plus
affreusement contre elle pour la détourner de ce soin. En
effet, plus elle
se sentait vivement pressée de l'aiguillon du diable par
l'état
d'irritation de l'enfant, et plus elle croyait fermement
réussir à
calmer les [440] cris affreux (8) qui
retentissaient
auprès de l'âme de son époux.
Notes
(1) Comme dans ce qui précède,
« esprit » (spiritus) vaut pour
« âme » et inversement. Pour la
compréhension du
texte, il faut savoir qu'il s'agit, certes, d'entités
spirituelles,
surnaturelles, mais nullement
« incorporelles » : Evrard
a l'aspect de sa jeunesse, il va montrer son bras et son flanc
déchiquetés, etc.
(2) Pour l'interprétation du texte, il faut
garder à
l'esprit qu'il s'agit d'une « place » au sens
concret du terme,
une « place publique », « une grande
rue »
(platea) : plateam haud procul a loco positam,
« une
place située non loin de ce lieu ». Cela implique
un lieu
important de la ville où l'on se trouve. — Il suit
qu'on ne doit pas
concevoir le « purgatoire » comme un lieu (et
tenter de le
situer ici), mais bien comme un état.
(3) Guibert de Nogent a déjà
expliqué (E.-R.
Labande, p. 76 et 77) que le mariage de ses parents n'avait pas
été
consommé avant sept ans, par la faute d'abord d'une
« marâtre » qui aurait voulu imposer une
de ses
nièces comme épouse de son père, ce qui a
été
suivi des « maléfices de certaines
gens » (p. 77).
— La jeune vierge sera d'ailleurs avantageusement
courtisée. En vain.
— Sans héritier mâle, la famille finit par
réclamer la
répudiation et le divorce. Toujours en vain, bien entendu,
puisque
naîtra Guibert et au moins un autre fils.
(4) Beati pauperes spiritu (Matthieu, 5: 3),
« Heureux les pauvres en esprit ».
Référence de
E.-R. Labande, p. 152, n. 2.
(5) Note d'E.-R. Labande : « Cet
événement bien connu date de 1114. Voir à ce
sujet A.
Luchaire, Louis VI le Gros, annales de sa vie et de son
règne...,
Paris, 1890, no 174, p. 88; L.-H. Labande, Histoire
de Beauvais,
p. 59 » (p. 152-153).
(6) Guibert de Nogent a en effet raconté
comment sa
mère, toute jeune veuve, l'a abandonné à sa
famille, puis
s'est retirée auprès d'une vielle ascète qui
l'a convaincue
de vivre avec elle (p. 103 et suiv.).
(7) L.-H. Labande interprète :
« cette femme,
certes, était toujours extérieurement occupée
à
châtier son corps par de nombreuses croix »
(p. 153-155).
(8) Le texte latin est une citation explicite de
Psaumes, 101: 7
(ibid., p. 158, n. 1). Tanto auditiones
malas correspondant
à la Vulgate, Ab auditione mala non timebit,
« il ne
craint pas les funestes nouvelles/clameurs ».
Variantes
Il faut évidemment se reporter à
la traduction
d'Edmond-René Labande qui fait aujourd'hui autorité.
Les remarques
qui suivent sont destinées à réviser
sommairement la
traduction de François Guizot sur quelques points importants
qui pourraient
faire contresens.
(a) Ad illos, soit ces « ombres
d'hommes » désignées plus haut. La
citation qui suit
correspond à Psaumes, 104: 15, Nolite eam tangere,
« Ne
touchez pas à cette femme » (p. 148 et
149).
(b) « D'après le témoignage
sincère
d'une personne vivante » est une traduction approximative
qui porte
à contresens. Tales erant, inexhausta pietas Deus, tuae
retributiones in
peccatoris tui, sed ex fide viventis, animam [Romain, 1: 17,
Justus in fide
vivit, « Le juste vivra par sa foi »].
« Tels
étaient, Dieu d'une infinie sainteté, tes
châtiments pour ton
fils, pécheur certes, mais vivant aussi de par sa
foi »
(p. 152 et 153).
(c) « Quel souvenir elle avait
conservé de
lui » . ...quantinus ipsa ab ea peteret, quod sui
memoriam
heberet, « Afin qu'elle lui demandât de faire
mémoire
du défunt dans ses prières » (p. 152
et 153).
(d) « S'en alla longtemps
après » :
sed longe post obiit, « qui ne devait mourir que
longtemps
après » (p. 152 et 153).
(e) L.-H. Labande traduit, au contraire :
« il lui
semblait qu'elle portait une croix sur les
épaules » (p. 155).
La proposition latine n'est pas d'interprétation
facile : quae inter
eundum crucem a scapulis sibi ferre videbatur (p. 154),
peut-être,
« alors qu'on la voyait allant avec elles portant une
croix sur ses
épaules ».
Références
Guibert de Nogent, Histoire des croisades et Vie de Guibert de
Nogent par lui-même,
traduction de François Guizot, Paris, Brière, 1825,
xii-510 p., « Autobiographie »,
p. 339 et suiv.,
livre I, chap 18, p. 432-439. — BNP,
Gallica :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1026556
Je modernise l'orthographe de la traduction de Guizot : ame
> âme;
-ens > -ents (égaremens > égarements),
très-[adj. ou
adv.] > très [adj. ou adv.] (très-souvent >
très
souvent; très-pauvre > très pauvre).
On trouvera le texte original latin et la
traduction de
François Guizot établis par Marc Szwajcer dans
l'Antiquité
grecque et latine du Moyen Âge de Philippe Remacle et
autres
collaborateurs. Le site internet ne fait pas de différence
entre les
auteurs latins et les auteurs français de langue latine. On
trouve notre
texte dans la première liste, « Traductions
d'auteurs
latins » :
http://remacle.org/
Édition originale
Guibert de Nogent (environ 1055-1125), De vita sua, sive
monodiae/monodiarum, vers 1115. On ne possède qu'un
seul manuscrit,
moderne et très défectueux, de l'ouvrage, soit une
copie du XVIIe
siècle : il s'agit du manuscrit Baluze 42 de la
BNF. Il a
été édité pour la première fois
par Luc Dachery
dans sa publication de l'oeuvre complète de Nogent, en
1651.
Éditions critiques
1651, première édition, par Luc Dachery.
1907, première édition critique, par Georges Bourgin.
Il s'agit d'un
événement dans la connaissance de la Vita.
1981, Guibert de Nogent, Autobiographie, édition et
traduction
critiques d'Edmond-René Labande, Paris, Les Belles Lettres,
496 p.,
chap. XVIII, p. 148-159.
Situation matérielle
Le premier des trois livres de l'ouvrage (le
livre proprement
autobiographique, 42% de l'ouvrage, le troisième,
historique, en fera 45%)
comprend 26 chapitres. C'est au chapitre 18 qu'on trouve le
second et le plus
important songe de la mère de Guibert de Nogent.
Jean-Claude Schmitt en
propose le sommaire suivant : « Elle rêve que
son âme
quitte son corps, est conduite le long d'une galerie jusqu'à
un puits
où apparaissent successivement des fantômes, son mari
défunt
Evrard avec un bébé (son bâtard mort à
naissance), le
chevalier Renaud, un frère de Guibert et une vieille
compagne
déjà décédée » (op.
cit.,
p. 268).
Situation narrative
Selon le classement et les définitions
de J.-C.
Schmitt, l'ouvrage comprend 15 rêves (il faut
plutôt les
désigner comme des songes) et 10 visions à
l'état de
veille, 3 dans une apparentes torpeur, 4 à
l'agonie et
14 dans un état qui n'est pas précisé;
soit 15 songes
et 31 visions. Schmitt décrit ainsi la situation des
songes :
« les quinze récits de rêves attestés
avec certitude
sont inégalement répartis dans l'ouvrage : neuf
se trouvent
dans la première partie, proprement autobiographique, et,
à deux
exceptions près, ils concernent tous Guibert et son
entourage
immédiat (sa mère, son précepteur, l'intendant
de sa
mère) » (p. 267).
En fait, le « Second songe de la
mère de
Nogent » est le huitième et dernier des songes de
l'autobiographie. Les sept autres, qui suivent, appartiennent
à la vie
monastique de Guibert de Nogent.
Bibliographie
Labande, Edmond-René, « Introduction »,
Guibert de
Nogent, Autobiographie, Les Belles Lettres, 1981,
496 p., notamment
section IV, p. xxii-xxviii, pour les éditions et
l'établissement du texte.
Schmitt, Jean-Claude, « Les rêves de Guibert de
Nogent »,
le Corps, les rites, les rêves, le temps : essais
d'anthropologie
médiévale, Paris, Gallimard (coll.
« Bibliothèque des histoires »), 2001,
p. 263-
294.
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