Mon prochain livre est sous presse. Il s'agit
d'une
étude littéraire de l'oeuvre de Lahontan. Je dois
ensuite en achever
et en corriger un autre, sur l'invention d'esclaves aux
Amérindiens de la
Nouvelle-France qui n'en ont jamais faits, ni jamais eus. C'est un
petit travail
urgent, car je ne peux laisser diffamer une civilisation
remarquable sur ce point,
alors que je suis spécialiste en ce domaine et que j'ai
déjà
étudié la question. Voilà pourquoi je suis
bien
éloigné, depuis quelques années et pour
quelque temps encore,
de mon travail d'édition passionnant de l'oeuvre
complète d'Isidore
Ducasse, intitulée el Bozo, la moustache de
Lautréamont. Mais
entre la publication de mes deux nouveaux livres, j'y reviens
« momentanément », pour évaluer
« quelle chose » est la plus difficile à
comprendre au
sujet d'« autrui ». Il s'agit de moucher
l'auteur d'un
prétendu compte rendu critique d'el Bozo qu'on m'a
signalé il
y a quelques mois, un compte rendu qui se situe au coeur d'un
torchon insipide se
présentant comme une analyse des travaux sur l'hispanisme
dans les Chants
de Maldoror. J'en profiterai pour répondre ensuite
à une section
du dernier livre de Jacques-André Duprey sur la biographie
d'Isidore
Ducasse. La section sur l'hispanisme dans les
oeuvres de
Ducasse où mon travail sur el Bozo me paraît
mal
évalué, ce qui me désole, parce que j'ai
beaucoup d'admiration
pour ce spécialiste des rapports entre les Français
et Montevideo et
l'Uruguay. Mais cela n'a rien à voir avec la catastrophe
qui va m'occuper
d'abord, soit la saloperie, l'exposé imbécile, le
torchon et le
gribouffonnage, et plus stupide encore (comme on le lira au fin mot
de cette réplique), de Thierry Trouscaillon
Davo, professeur
de l'Université de Reims.
Cela s'intitule « L'idiolecte
lectoral :
lectures bilingues des Chants de Maldoror », par
Thierry Davo.
Et cela est publié dans un recueil des Éditions et
des Presses
universitaires de Reims, la Langue du lecteur, sous la
direction de
Christine Chollier, Marie-Madeleine Gladieu, Jean-Michel Pottier et
Alain
Trouvé (2017, 256 p., p. 101-114). On trouve le
recueil et donc
l'article sur l'internet à
< books.openedition.org/epure/1881 >
(1881 ou 1830). Je le renomme donc Thierry Trouscaillon Davo. Un
ou deux lecteurs
ne connaissent pas Trouscaillon ou ne le remettent pas ?
Papossib !
C'est le grand rôle du petit flic dans Zazi, dans le
métro, de
Queneau. Pour finir, Marceline, oh !, celui-là !
m'inspirera tout
doucement le dernier mot de ma réplique, le seul qui
convienne. Mais faut
pas sauter les étapes et passer de l'église de
Saint-Vincent-de-Paul
au Panthéon et de la Sainte-Chapelle jusqu'Aux Nyctalopes,
car il
y aura massacre,
tranquillement, du début à la fin. Ce sera terrible
et je pense,
malheureusement, que le professeur T. Davo aura de la
difficulté à
s'en remettre et j'en serais désolé si tout
n'était de sa
faute. Il n'a jamais rien écrit sur l'hispanisme où
que ce soit et
surtout pas sur l'hispanisme dans les Chants de Maldoror;
pour lui, Isidore
Ducasse (qu'il nomme toujours
« Lautréamont », comme
dans l'ancien temps) est encore celui des surréalistes.
Alors, de quoi je
me mêle avec un pamphlet contre el Bozo ? Il
sera donc
massacré. Tant pis. Comme le dit Zazi à la veuve
Mouaque, il
n'avait qu'à s'occuper de ses fesses.
Mais si j'explique d'abord le fait que je ne
pouvais laisser
déprécier les collaborateurs d'el Bozo, je
trouve mon compte
à répliquer au torchon que j'aurais bien aimé
laisser sans
réplique, car c'est une occasion d'exposer la nature, les
objectifs, les
caractéristiques et même les qualités de mon
travail, alors que
l'édition critique des Chants de Maldoror est
maintenant
achevée, avant de reprendre la suite de l'édition,
avec celle des
Poésies. Après tout, si les analyses
critiques d'el
Bozo sont bienvenues et pourront, j'espère, être
aussi utiles
qu'appréciées, il faut empêcher que
d'incompétents
imbéciles puissent dénigrer le travail
injustement.
Je commence tout de suite : notre
Trouscaillon est un
salaud. En effet,
à la première lecture de son torchon, j'avais
décidé
que je n'y répliquerais pas. Je ne vais pas m'abaisser
à ramasser
des crottes du chien policier d'un flicard sur le trottoir des
publications de
l'Université de Reims. Mon cul ! Mais en
gambergeaillant, au cours
de ma correction d'épreuves, je me suis rappelé un
passage assez dur
à respirer qui disait, je cite, « bien
qu'entouré
d'hispanophones — argument qu'il utilise pour se
prévenir
[sic] contre les
critiques — », etc. Oui, il faut tout un salaud
pour
lancer une
accusation pareille, gratuite, sans l'ombre d'une justification.
Et un salaud de
la pire
espèce, puisqu'il publie et est publié sous la
caution d'une revue
universitaire et dans un numéro cautionné par quatre
professeurs de
l'Université de Reims, comme on vient de le lire. Sur les
principaux collaborateurs d'el Bozo, voyez l'historique de
ces rencontres passionnantes dans les remerciements que je leur ai
adressés, en appendice du calendrier du travail, où
l'on verra que ce sont eux tous qui ont d'abord pris contact avec
moi, et non l'inverse, et que d'aucune manière ils ne
cautionnent mon travail auquel ils ont généreusement
collaboré.
Mes trois premiers collaborateurs, aujourd'hui
décédés, ont été d'abord mon
collègue
d'études hispaniques de l'Université de
Montréal, Felix
Carrasco, et ensuite les deux traducteurs des oeuvres de Ducasse,
qui ont les
premiers pris contact avec moi et se sont offerts à
collaborer à
l'analyse des hispanismes dans les Chants, Manuel Serrat Crespo et
Ángel
Pariente. La première à s'impliquer dans ce travail,
m'obtenant
copie de la traduction de Gabriel Saad que je connaîtrais
plus tard, a
été une Uruguayenne installée depuis plusieurs
années
à Montréal, Norma Davies. Mon collègue Felix
Carrasco a revu
mot à mot la toute première version de l'index des
hispanismes. Je
lui dois des corrections, des précisions et d'importantes
reformulations,
dont je rends compte dans l'édition du Chant premier,
puisque c'était
au tout début de mon travail, alors que mon analyse
était encore peu
assurée. D'ailleurs, il a été le tout premier
à
m'encourager et, surtout, à me rassurer :
étudier les
hispanismes des Chants en confrontant leurs traductions en
espagnol, était
de bonne méthode.
J'ai moins échangé avec les
traducteurs Gabriel
Saad et Ana Alonso,
mais ils m'ont été très précieux sur
des questions
précises. Ces traducteurs d'Isidore Ducasse sont des
artistes, des
écrivains et des poètes, qui ont mis la pratique de
leur langue
maternelle, leur talent et leur temps au service d'un petit travail
qui ne serait
pas ce qu'il est devenu sans eux. C'est à Manuel Serrat
Crespo qu'est
dédié le travail d'édition sur el Bozo,
car
périodiquement mais souvent, au moment où je me
consacrais à
temps plein à ce travail, nous pouvions échanger
quotidiennement
durant plusieurs semaines. Qu'un salaud vienne déclarer que
mes
collaborateurs n'ont servi qu'à me prémunir contre
les critiques, on
comprendra que c'est inacceptable et que l'affreux Thierry
Trouscaillon Davo, ce
salaud, doit être mouché.
Je dois donc présenter cet article
à la noix de
coco d'une belle noix ! Il se divise en trois parties.
D'abord une longue
mise en place insipide où il est vaguement question du
bilinguisme d'Isidore
Ducasse, ensuite un dénigrement systématique d'el
Bozo et,
finalement, une enfilade d'anecdotes sans aucun autre
intérêt que de
cacher que notre Trouscaillon n'a rien à dire, n'ayant
jamais mené
aucune analyse sur les Chants de Maldoror et ses
hispanismes, infligeant ses
affligeantes intuitions sur... trois hispanismes qu'il
n'étudie d'aucune
manière.
Disons d'abord que l'auteur ne peut justifier
une étude
sur une question « de néant », qui ne se
pose pas, parce
qu'elle n'a pas de sens. C'est « la langue du
lecteur ». Je
ne dirai rien du recueil d'articles en question, m'étant
bien gardé
d'en lire aucun autre. Dans le cas qui nous occupe, la langue des
Chants de
Maldoror est le français, qu'elle soit
mâtinée
d'hispanismes (sans compter le caractère approximatif de ce
français), cela n'y change rien. La langue du lecteur n'a,
par
définition, rien à voir avec le texte qu'il lit,
langue qu'il doit
savoir lire et apprécier, c'est le bon sens qui le dit.
Autrement, il lira
le texte en traduction. Et sur ce point, il suffit de lire le
titre de l'article
de Thierry Davo pour comprendre avant toute lecture que son
thème n'a aucun
bon sens. L'« idiolecte lectoral », ce
syntagme défie
l'entendement, tandis que les « lectures
bilingues » d'un
texte, cela est surréaliste, voire dadaïste. Tout cela
est d'ordre
professionnel (« universitaire »),
destiné à
justifier la publication de l'article au recueil des Presses de
l'Université
de Reims; c'est tout ce que l'on peut comprendre. Pour
l'exposé de la
« thèse », il tient en vingt lignes,
deux au
début de l'article et une demi-page à la fin,
enrobant un article qui
mêle deux questions différentes, le bilinguisme de
l'individu Isidore
Ducasse et les hispanismes dans son oeuvre la plus importante,
les Chants de
Maldoror. Bref, oubliez l'« idiolecte
lectoral » et les
« lectures bilingues ». S'il s'agissait
d'opposer des
« lectures » de l'oeuvre de Ducasse, en ce qui
concerne
l'étude de son hispanisme, voilà qui est fort mal
venu :
« Laflèche pense que Lautréamont, bien que
bilingue, est
avant tout hispanophone et que les Chants de Maldoror ont
été
pensés en espagnol et "mal traduits" en
français ». Cette
idée vient de la présentation d'el Bozo
où j'explique
ma découverte de l'hispanisme dans les Chants après
plus d'un an de
leur étude grammaticale et stylistique quotidienne, ce que
T. Davo cite
à sa première note, après l'avoir
généralisée de manière ridicule.
J'écris :
« d'un seul coup, les premières pages du
deuxième chapitre
du "roman" que l'on trouve au dernier chant (6.4) m'ont apparu
comme la mauvaise
traduction française d'un roman espagnol. Les hispanismes
y sont si
nombreux et si évidents que je pouvais croire à une
parodie » (ce sont les lignes qui précèdent
l'exposé
de ma découverte). Cela dit,
même
ridiculisée, la conclusion d'el Bozo s'y
trouve : l'oeuvre
d'Isidore Ducasse est pensée en espagnol avant d'être
rédigée en français. La cause en est, ce que
n'a pas retenu
notre dénigreur, que Ducasse n'est pas
« bilingue »,
s'agissant d'un « parfait bilingue ». C'est le
cas particulier
des enfants qui, à l'âge de cinq ou sept ans, parlent
deux langues.
Montréalais, je connais bien cette situation
psycholinguistique, celle de
locuteurs qui devront faire des efforts considérables pour
maîtriser
l'une de leurs deux langues qu'ils choisissent d'adopter dans leur
art ou leur
profession.
Toute la première des trois parties de
la tartine de
T. Davo montre qu'il n'a pas profité de l'enseignement
d'el Bozo sur
ce point. Cette première partie de son article consiste
à
répéter le travail inaugural essentiel d'Emir
Rodríguez
Monegal et de Leyla Perrone-Moisés, en 1983 (en
français à
Paris, dans Poétique, et en espagnol à Mexico,
dans
Vuelta). Bizarrement, T. Davo attribue ce travail au seul
E. R. Monegal,
alors qu'il est un des deux auteurs, ignorant que le travail d'E.
R.
Monegal a
été rédigé, publié et
relancé par sa
collègue L. Perrone-Moisés en 1995 (avant
d'être repris et
vulgarisé une nouvelle fois, par elle seule, en 2001). La
disparition
élocutoire de l'héroïne d'el
Bozo est stupéfiante dans un exposé sur la
découverte du
bilinguisme d'Isidore Ducasse.
L'essentiel de cette première partie de
l'article est
une fricassée qui, pour l'essentiel, répète en
2017 ce qu'E.
R. Monegal et L. Perrone-Moisés avaient déjà
exposé en
1983 ! La situation a pourtant considérablement
changée en
près de quarante ans. Pour T. Davo, Isidore Ducasse est
toujours un auteur
dont « on sait peu de chose », et de patiner
sur cette
« absence d'information ». Il ne connaît
pas les
études biographiques de François Caradec (1970) et de
Jean-Jacques
Lefrère (1977 et 1998) ? Non, il en est encore
à la situation
où l'on se trouvait en 1983, voire à l'époque
des
surréalistes dont il nous ressort des anecdotes d'Aragon et
Breton imaginant
Ducasse en... versificateur ! (mais je ne sais d'où il
tire
l'anecdote). Et le comble de l'humour blanc, notre Tartampion
découpe des
alexandrins dans un extrait des Chants
(1.8, p. 20-21;
mais copiant à la suite deux supposés
« alexandrins » pris des p. 219 et 144,
comme s'ils
faisaient parties du même extrait). Or, on peut le faire cet
« exercice » dans n'importe quel article du
Monde, en
comptant les syllabes. Mais notre Trouscaillon ne sait pas que le
vers blanc de
la prose n'est pas une question de syllabes, mais de rythme et donc
d'accentuations; ce « vers » doit absolument
être
très clairement dénoté, avant d'être
simplement
connoté, ce que l'on ne trouvera pas en français
avant Flaubert. Et
on ne trouve rien de tel chez Ducasse. — Et T. Devo de
conclure de son petit
exercice, le plus sérieusement du monde, qu'Isidore Ducasse
pense (ses
alexandrins !) en français, car en espagnol, les
alexandrins n'ont pas
douze, mais quatorze pieds ! Et cela publié dans une
revue des
Éditions et des Presses universitaires de Reims.
Mais ce n'est pas tout : T. Davo nous
recopie exactement
les idées de l'article de 1983, avec les mêmes
exemples.
Depuis toujours, répète-t-il, on avait ignoré
que Ducasse,
d'origine Montévidéenne, était bilingue, de
sorte qu'à
cause de son espagnol, il faisait des fautes en français qui
étaient,
en réalité, des décalques de l'espagnol, sa
« langue
seconde ». Preuve : les critiques grammaticales de
Robert Faurisson
et de Michel Charles, comme on le pensait en 1983. On sait
aujourd'hui,
fréquentant el Bozo, que c'est faux. Jamais ces deux
critiques n'ont
fait d'analyse stylistique ou grammaticale de l'oeuvre de Ducasse,
aucun des deux,
ni personne d'autre, avant la mise en place d'el Bozo;
durant un
siècle, personne n'a été conscient du fait
pourtant
sidérant que Ducasse n'écrivait pas correctement en
français.
Et de nous relancer l'affaire de l'ex-libris
rédigé en espagnol par Ducasse en tête du
second volume de la
traduction de l'Illiade par José Gómez
Hermosilla, qui
comprend trois fautes d'orthographe (propriedad,
tambiem ou en tout
cas tambien sans son accent, et avril — pour
propiedad,
también et abril : cf. Antécédents). L'analyse de
l'ex-libris se
trouve dans les deux versions de l'article de 1983 et en tête
du livre de
1995. Le problème, c'est que T. Davo invente une
supposée analyse
« où Rodrígez tourne et retourne cet
autographe [...] qui
laisse croire que l'espagnol de Ducasse serait approximatif,
calqué sur le
français. Pas du tout, soutient Rodrígez Monegal,
qui analyse la
presse uruguayenne de l'époque et démontre que
l'espagnol
parlé et écrit à Montevideo dans ces
années-là
était un incroyable sabir, résultat du cosmopolitisme
d'une ville
[etc.]... Ducasse à ses yeux ne s'exprime pas dans un
mauvais espagnol,
il s'exprime en fait dans un dialecte, le dialecte
montévidéen de
ces années-là ». Si je souligne la
conclusion ridicule
de ce supposé « résumé »
, c'est tout
simplement parce
que c'est faux. Jamais E. R. Monegal et L. Perrone-Moisés
ne font cette
analyse, ni en 1983, ni en 1995. Ce n'est pas vrai. Cette analyse
est
copiée sur les résultats du travail de recherche de
Jacques-André
Duprey, illustrant de quelques exemples amusant les
hispanismes
dans le Patriote français de Montevideo (ce qu'on
trouve d'ailleurs
résumé dans le livre de 1995, Lautréamont
austral,
p. 71-74, analyse correctement attribuée à J.-A.
Duprey). Mais
cela ne concerne ni la rédaction en espagnol des
Montévidéens
et encore moins l'ex-libris de Ducasse. La conclusion d'E. R.
Monegal et L.
Perrone-Moisés, en 1983, comme en 1995, est claire,
même si les
auteurs n'insistent pas sur ce point, bien entendu : Isidore
Ducasse ne
connaît pas son orthographe en espagnol, même s'il le
parle couramment.
Il suit qu'il n'a jamais fréquenté l'école en
langue espagnole
au cours de son enfance en Uruguay, ce qui aurait d'ailleurs
été
surprenant. Question : pourquoi donc T. Davo nous
invente-t-il ce dialecte
espagnol d'une langue écrite
montévidéenne ? Oui, notre
Trouscaillon étale ses cartes, avant de lancer la seconde
partie de son
article, pour bien établir sa compétence flicarde.
Mais ce n'est pas tout. Le critique
littéraire nous
sert deux petites tartines sur l'hypothèse des
fréquentations sud-américaines
de Ducasse à Paris, à partir de l'hypothèse
fort bien explorée par Michel Pierssens, comme on la trouve
partout
présentée, et sur el Bozo d'ailleurs. Le
travail de recherche
est si bien mené qu'il conduit à un évident
non-lieu :
rien ne confirme de telles fréquentations de
Sud-Américains par
Ducasse à Paris, pas même l'essai de Maria Helena
Barrera-Agarwal sur
la poétesse Dolores Veintimilla (nommée par Ducasse
dans ses
Poésies), dont M. Pierssens a rendu compte dans
les Cahiers
Lautréamont l'année même de sa parution en
2015. Mais les
deux petites tartines nous intéressent parce que notre
critique
littéraire nous régurgite des informations connues de
tous ceux qui
s'intéressent à Ducasse depuis dix ou vingt ans, mais
sans
s'interroger sur l'affaire. On comprend que M. Pierssens soit
très
intéressé par son hypothèse, mais il me semble
qu'après
toutes ces années, T. Davo devrait se demander,
« et puis
après ? ». Quel intérêt peut
présenter
cette question d'histoire littéraire, déjà
bien posée
et résolue ? Il ne fait aucun doute que Ducasse parle
espagnol. On
n'a donc pas besoin d'ajouter sur ce point son éventuelle
fréquentation des Sud-Américains de Paris. Mais,
attention, les deux
petites tartines à ce sujet conduisent T. Davo à nous
présenter un Michel Pierssens champion des études
hispanistes
d'Isidore Ducasse. « Je lis Lautréamont, je n'y
vois pas les
mêmes hispanismes, ni les mêmes non-hispanismes [sic]
que
Pierssens, Rodríguez monegal [sic] ou Guy
Laflèche » ! Michel Pierssens n'a jamais
étudié ni le bilinguisme de Ducasse comme E. R.
Monegal et L.
Perrone-Moisés, ni non plus comme moi les hispanismes des
Chants de Maldoror.
D'ailleurs, et c'est le comble, Alain Trouvé,
dans son
« Avant-propos » scolaire du recueil, nous
présente
l'article de T. Davo en trois phrases, la première fausse
(et les deux
autres insipides, insignifiantes et incompréhensibles), et
la voici :
« Thierry Davo, revenant à la suite de
Pierssens,
Rodríguez et Laflèche sur la langue des Chants de
Maldoror,
met en évidence la pratique, de la part d'Isidore Ducasse,
d'un
français imprégné des structures de
l'espagnol parlé
en Uruguay » !
Voilà. Tout est prêt pour
l'entrée en
scène de Thierry Trouscaillon Davo, dont le seul objectif
est de
dénigrer le travail publié sur el Bozo. Et
cela commence mal,
car notre Trouscaillon prouve vite qu'il ignore tout de la nature
de ce travail.
N'est-il pas évident qu'il s'agit d'une édition
critique de l'oeuvre
complète d'Isidore Ducasse, édition critique
achevée en ce qui
concerne les Chants de Maldoror ? Et que c'est cette
édition qui
sert de cadre à l'étude de l'hispanisme et des
hispanismes de
l'oeuvre ? L'édition critique comprend quatre sciences
des
études
littéraires, (1) l'étude bibliographique; (2)
l'analyse stylistique
et textuelle (d'où l'étude des hispanismes pour les
Chants), dont
l'étude des variantes, pour l'établissement du texte;
(3) la
recherche et l'analyse des sources (avec l'étude des
citations, allusions,
etc.); (4) la genèse de l'oeuvre (planification,
rédaction et
rééditions). Á cela s'ajoute l'étude
de
la
réception, de la fortune de l'oeuvre et de ses lectures.
Comme j'ai
réalisé neuf éditions critiques de textes de
la Nouvelle-France
sur une quarantaine d'années, je sais un peu de quoi je
parle, et on
peut être assuré que ma dizième édition,
qui porte elle
sur un texte moderne, les Chants de Maldoror, sera une
réalisation
bien informée dans ce domaine (voir le sommaire de mon
expérience
à ce sujet : « L'édition
critique / les
éditions critiques : le protocole immuable de
réalisations
chaque fois incomparables », Port Acadie,
numéro sur
l'édition critique, Université de Moncton, nos 20-21,
2010-2011,
p. 29-42, présentation des éditions critiques
sur el
Bozo, p. 36-37).
On aura donc droit à deux petits
exposés
inadéquats impliquant l'édition critique,
l'établissement du
texte et l'étude de ses sources. « Les
critères
d'établissement du texte laissent songeur :
Laflèche
établit une liste des "coquilles" qu'il corrige ».
Suivent trois
exemples d'évidentes fautes qu'il n'analyse pas, affirmant
péremptoirement que ces « coquilles » ne
sont pas
avérées. Et il invente « une longue liste
d'imparfaits de
narration [qui sont] remplacés par les passés
simples »
(sans donner aucun exemple, alors que je précise au
contraire que je ne
remplace l'imparfait par le passé simple, ou inversement,
que
« lorsque l'emploi d'un temps pour l'autre est
pratiquement impossible
en français », s'agissant d'évidentes
fautes ou maladresses
morpho-lexicales). Pour savoir de quoi il s'agit, il faut se
reporter aux Règles d'établissement. On y
trouve d'abord les
règles d'uniformisation et de modernisation typographiques,
de même
que la liste des fautes d'accord de type morphologique. Toutes ces
fautes sont par
définition insignifiantes et doivent donc être
corrigées dans
une édition critique au service du texte, de son auteur et
de ses lecteurs.
Á plus forte raison pour les Coquilles et fautes de
composition typographiques évidentes. Suivent pour
finir environ deux
cents Corrections justifiées.
C'est de ces 200
analyses grammaticales que T. Davo tire trois
« coquilles » qu'il affirme ne pas être
« avérées ». Qu'on en
juge : 2.10,
p. 102:12; 3.1, p. 141:16; et 3.1, p. 147:22. Cette dernière liste
correspond donc,
on le voit, à deux cents commentaires grammaticaux, au fil
de
l'édition critique. S'il affirme que tout cela le
« laisse
songeur », on doit savoir qu'un tel jugement, sur trois
exemples non
avérés, n'a pas sa place dans un compte rendu
universitaire. Et, sur
ces trois exemples non analysés, trois coups de sifflet du
grand petit flic
Trouscaillon, d'affirmer que « le français, pour
Laflèche,
c'est exclusivement son français. Attitude quelque peu
contestable en
général, et surtout lorsque l'on parle le
français du
Québec... ». On croirait lire un
« Maudit
Français » au Québec dans les années
soixante, ces
snobs qui jugeaient de haut notre parlure, en pétant plus
haut que le trou,
comme on le dit dans mon français. La suite de la
dernière phrase
ajoute : « ...et que l'on travaille sur
l'espagnol
d'Uruguay », ce qui est encore une sottise qui sera
retenue et mise
en relief par Alain Trouvé, tel qu'on l'a lu plus haut. En
effet, de quel
« espagnol d'Uruguay » s'agit-il ? Jamais
les hispanismes
d'Isidore Ducasse ne dénotent aucun trait du castillan
parlé en
Uruguay, ni même dans tout le Cône sud. Et T. Davo ne
saurait en
donner aucun exemple, puisqu'il n'y en a pas : il s'agit pour
le Maudit
Français de couvrir sa remarque intempestive et raciste, me
prêtant
ingénument son attitude flicarde à partir, je le
répète, de trois coups de sifflet.
Avec cet exposé inadéquat qui
ignore, c'est le
cas de le dire, les règles de l'établissement
scientifique du
texte de l'édition critique, un second développement,
sur les sources
du texte à l'étude, va nous amuser. L'exposé
s'ouvre avec la
phrase suivante : « "la Moustache de
Lautréamont" se
veut la première édition critique scientifique
des Chants et
comprend plusieurs sections : le texte [sic], tout d'abord,
puis les
annotations, une série d'articles de Laflèche sur les
sources de
Lautréamont que lui seul aurait vues — Dante,
Milton, Goethe,
mais aussi Martín Fierro et el Matadero, deux
classiques de
la littérature argentine du XIXe siècle ».
Modeste
précision d'abord : el Bozo ne présente
pas la
première édition critique de l'oeuvre d'Isidore
Ducasse, mais la
seconde, après celle de Pierre-Olivier Walzer dans la
« Bibliothèque de La Pléiade » en
1970 et mise
à jour en 1988. Comme on le voit, T. Davo ne sait pas trop
ce qu'est une
édition critique, de sorte qu'il n'a pas retenu ce que j'ai
dit plusieurs
fois au cours de mon édition critique des Chants. Modestes
prétentions ensuite. Premièrement, à cause
même de mon
étude systématique au fil de l'édition sur
el Bozo,
j'ai été le premier à pouvoir présenter
rigoureusement
les « sources d'inspiration » des Chants de
Maldoror,
Dante, Milton et Byron (et non Goethe), tous lus par Ducasse pour
lancer ses Chants
en traductions françaises, traductions que j'ai
précisément
identifiées, en plus d'en tirer les conclusions essentielles
à
l'étude littéraire de l'oeuvre. Mais voir aussi la
liste
complète des sources des Chants, Liste des sources
textuelles avérées.
En ce qui concerne Martín Fierro
de José
Hernandez et el Matadero d'Esteban Echeverría ma
critique sera encore
plus acerbe. D'abord, modeste précision et
prétention. C'est moi
qui ai trouvé que la petite nouvelle d'E. Echeverría,
l'Abattoir, était la source de l'épisode de
« l'abattoir » de la strophe 6.9, personne
d'autre. Que notre
tartampion fasse des gorges chaudes à ce sujet
(« articles de
Laflèche sur les sources de Lautréamont que lui
seul aurait
vues »), il en est pour ses frais avec sa
malveillance. Par
ailleurs, le petit roman pamphlétaire, qui a
été
rédigé en 1839, ne sera publié qu'un an
après les
Chants, soit en 1871. Cette découverte est
extrêmement importante,
aussi bien en ce qui concerne les sources des Chants (car ce petit
roman est sa
seule et unique source de langue espagnole), comme aussi pour la
biographie des
Ducasse, père et fils (puisque la découverte
spectaculaire prouve que
le père avait une copie manuscrite de l'inédit dans
sa
bibliothèque et qu'il en a amusé son fil dans sa
petite enfance).
J'ai étudié cela dans la note (4) de
la strophe 6.9.
Dans le cas du Martín Fierro,
notre critique
serait déjà mort si le ridicule tuait !
Premièrement,
l'essentiel, le chef-d'oeuvre ne peut être une source des
Chants, puisqu'il
n'a été publié qu'en 1872, trois ans
après les
Chants de Maldoror où l'on ne trouve donc aucune
évocation du
roman versifié de José Hernandez. En revanche, il
est clair que le
jeune Ducasse et le grand romancier poétique partagent une
culture
folklorique et une même imagination qui est celle, mythique,
de la vie
gauchesque de la pampa. On en trouvera l'analyse à la fin
de mon
étude des sources d'inspiration des Chants, Martín Fierro et
l'Abattoir.
Ah ! vous attendiez le
« deuxièmement » ?
essentiel aussi, mais pour évaluer la culture
littéraire du
professeur d'études hispaniques de l'Université de
Reims. Je
répète la fin de l'extrait cité plus haut,
« Martín Fierro et el Matadero, deux
classiques de
la littérature argentine du XIXe
siècle » ! Comment
peut-on ainsi mettre sans raison sur le même pied un
chef-d'oeuvre universel
et une amusante petite bluette ? Le moins que l'on puisse
dire est que T.
Davo n'a pas une connaissance correcte des sources des Chants, ni
de la
littérature d'Argentine. En tout cas, il ne sait pas
l'essentiel, à
savoir que les Chants de Maldoror n'ont aucune source de
langue espagnole,
sauf ce souvenir d'enfance de la lecture, avec son père,
d'un percutant
petit pamphlet politique. Aucune oeuvre de langue et de culture
espagnoles ne se
trouve évoquée dans les Chants.
Comme on l'a vu, Thierry Trouscaillon Davo est
déjà entré en scène avec ses trois
coups de sifflet
déclarant que trois petites fautes corrigées, avec
justification
à l'appui, n'étaient pas des fautes, etc. Alors
voici encore trois
coups de sifflet de notre flicmane, exeuprès pour
décourager les
fanatiques de « Lautréamont » de
fréquenter el
Bozo qu'il n'a pas lui-même beaucoup
fréquenté. Il
commence.
Autrui, « rapaces amateurs de la viande
d'autrui »
Coup de sifflet. « Un exemple, ils
sont nombreux,
de la dérive dont est victime Laflèche, en voyant
de l'espagnol
partout, est de considérer comme un hispanisme
l'utilisation du mot
"autrui", du fait qu'en espagnol il existe un mot "ajeno", dont la
fréquence
d'emploi est beaucoup plus grande qu'en
français ». Qu'est-ce
qu'il ne va pas chercher ! Jamais sur el Bozo il n'est
question de la
fréquence de l'adjectif « ajeno », ce
n'est pas vrai.
Autrui ou plus précisément d'autrui est
une fois et une
seule fois un hispanisme dans l'expression « la viande
d'autrui ». C'est le 23e hispanisme lexical de leur liste alphabétique, qui
précise que le
vocable est employé une fois dans un sens espagnol et deux
fois dans son
sens français. Le glossaire des hispanismes présente
la seule
occurrence de sens hispanique restée dans les Chants (une
autre ayant
été soustraite à la seconde édition du
Chant premier),
s'agissant d'une désignation, dans la strophe 4.5, « d'oiseaux rapaces,
amateurs de la
viande d'autrui ». Je ne l'ai pas
étudiée de
près, car l'hispanisme est évident, même s'il
« est
d'interprétation difficile », comme je
l'écris. Cinq fois
dans les Chants, Ducasse écrit correctement « des
autres », équivalent de l'espagnol « de
lo
demás », mais ici il emploie incorrectement
d'autrui. En
français, le pronom indéfini, autrui, doit
nécessairement s'opposer nommément à une
« personne » et plus généralement
à un
pronom personnel. En emploi absolu, on dira « le bien
d'autrui », ce qui indiquera qu'il n'est pas le bien de
tout autre (le
mien, le nôtre, le tien, etc.). En emploi syntagmatique, on
dira, par
exemple, que vous ne devez pas faire à autrui
ce que
vous ne voulez pas qu'on vous fasse. Cela signifie
que si les
rapaces sont amateurs de la chair d'autrui, cela implique
qu'il ne sont pas
amateurs de « leur » chair, ce qui est
absurde. On est
donc devant une faute de
français et cela
n'est pas surprenant. La strophe 4.5 où Maldoror
décrit son reflet
sur le mur de sa chambre est improvisée et, comme je
l'explique en
tête de mes Commentaires
linguistiques, cette
improvisation est explicitement dénotée par le
lexique et la syntaxe,
avec des phrases alambiquées où le sens finit par se
perdre.
Les fautes de toutes sortes sont donc
nombreuses tout au long
de la strophe, comme on les trouve identifiées dans mes
Commentaires
linguistiques. Et c'est le cas de ces rapaces amateurs de la
chair
d'autrui. Or, il se trouve que cette faute est
entraînée par le
bilinguisme d'Isidore Ducasse, s'agissant d'un hispanisme,
même s'il est, je
le répète, d'interprétation difficile en
français. La
preuve s'en trouve dans les traductions espagnoles, car tous les
traducteurs,
à deux exceptions près, donnent ces rapaces comme
« aficionadas a la carne ajena »
(Gómez,
Pellegrini, Álvarez Ortega, Serrat Crespo et Alfonso; les
deux autres
traducteurs donnent des équivalents parfaitement recevables
en
castillan : « carne de lo demás »,
Pariente, et
« carne del prójimo », Méndez,
qui tente comme
toujours de rester proche du texte français, ce qui est ici
une demi-réussite, « amateur de la chair de son
prochain » !
— on trouve les références
à ces traductions en bibliographie). C'est la
formulation de l'ensemble des traducteurs que Ducasse avait en
tête, rendant
incorrectement, dans ce contexte, l'adjectif ajeno, par son
sens espagnol,
« d'autrui » (« que pertenece o
corresponde a otro,
"no debes desear les bienes ajenos" », — Clave). L'expression est correcte en
espagnol, mais pas
en français, comme je l'ai déjà
expliqué. Et
l'hispanisme, qui n'a qu'une seule occurrence dans les chants, est
d'autant plus
exceptionnel que Ducasse utilise partout ailleurs aussi bien le
pronom
indéfini autrui que la locution des autres,
dans leurs sens
français. Voilà ce que dit succinctement mais
précisément l'entrée autrui du
glossaire qu'on ferait bien de relire avant de revenir au coup de
sifflet
flicardiaque.
Car dès qu'il a repris sa respiration,
Trouscaillon
souffle dans son sifflet à s'en époumoner avec ces
quelques mots de
sa finale : « ... considérer comme un
hispanisme
l'utilisation du mot "autrui", du fait qu'en espagnol il existe un
mot "ajeno",
dont la fréquence d'emploi est beaucoup plus grande qu'en
français ». On sait déjà que c'est
faux, je l'ai
dit. Suit la fameuse rallonge du coup de sifflet :
« Á
cette aune, André Chénier, Jules Romains, Stendhal,
Proust et
Clémenceau pensaient en espagnol ». Et d'ajouter
en note
(no 22) : « Auteurs ayant utilisé le mot
"autrui" selon les
toutes premières lignes du Trésor de la langue
française » ! La première fois
qu'on
lit cette phrase
et sa note, on n'en croit pas ses yeux, papossib !
yémalad ?
< TLFi > est la version électronique du
dictionnaire
réalisé sous la direction de Paul Imbs
(édité de 1971
à 1994). Le dictionnaire classe 17 exemples de l'emploi du
vocable (avant
les données spécialisées); notre critique ne
choisit pas les
« toutes premières lignes » de
l'entrée, mais les
exemples nos 1, 7, 3, 9 et 8. Incidemment, la première
ligne de
l'entrée pose ce que j'ai expliqué plus haut :
« autrui, pron. indéf., A. — un
autre, les
autres, l'ensemble
des hommes par opposition au moi du locuteur et en exclusion de
ce
moi », ce qui dit bien que la « chair
d'autrui »
s'oppose à ma, sa chair, ce qui implique
négativement
le rapace en « amateur de sa chair »,
expression
absurde, on le sait.
Mais le comique de l'affaire ne se trouve pas
au TLF, mais
dans le fait de sortir n'importe quel dictionnaire pour y trouver
le vocable...
« autrui ». En effet, toute personne qui a un
peu
fréquenté el Bozo connaît la nature et
la
définition de l'hispanisme lexical. C'est simple. Il
s'agit d'un vocable
français employé dans un sens espagnol. Un vocable
français ! Il suit que les 294 hispanismes lexicaux
identifiés
à ce jour dans les Chants, comme
« autrui », vont se
trouver dans n'importe quel dictionnaire du français.
« Á
cet aune », s'essouffle Trouscaillon, tous les auteurs
qui utilisent ces
mots pensent « en espagnol » ?!
Voilà peut-être
une belle déconnance d'humour blanc, mais Queneau ne perd
pas de
vue le sifflet et de préciser que Trouscaillon
« était en
train de secouer le dit objet pour l'assécher de toute la
salive qu'il y
avait déversée », car on attend
impatiemment les deux
autres grands sifflements.
Quelle chose était le/la plus facile à
reconnaître...
« Laflèche voit
également une preuve
selon lui [sic] de la maladresse de Lautréamont à
chaque
périphrase [sic] qui aurait pu être remplacée
par une
formulation plus condensée ». Écrire
« quelle
chose » au lieu de « ce qui », n'est
pas une
périphrase. « Une phrase comme "souvent,
je me suis
demandé quelle chose était la plus facile
à
reconnaître : la profondeur de l'océan ou la
profondeur du coeur
humain !" est considérée par Laflèche
comme une preuve
que Lautréamont est avant tout hispanophone, en raison de sa
maladresse
[sic] (lui aurait dit autrement). On touche là aux limites
de la
démarche de Laflèche, puisque, justement, la langue
espagnole est
extrêmement réticente à utiliser le mot
cosa,
"chose" ». Ouvrez n'importe quel dictionnaire de
l'espagnol et vous
verrez qu'il sera aussi prolixe que le français sur le
vocable
cosa/chose; alors sur quoi repose l'affirmation qu'on vient
de lire ?
La parenthèse, « lui aurait dit
autrement », est
incongrue, aucun francophone n'écrira jamais une expression
d'une telle
lourdeur, surtout pas dans une strophe comme celle de
l'Éloge à
l'océan, un éloge ostensiblement dithyrambique.
Justement, l'évaluation de cet
hispanisme doit
commencer par sa mise en situation. L'édition de la strophe
1.9 sur le Vieil Océan identifie quatorze
hispanismes. Quelle chose, dans la phrase
« souvent je me
suis demandé quelle chose était LA plus facile
à
reconnaître... », est enregistré comme un
hispanisme morpho-syntaxique
(que T. Davo ramène incorrectement au vocable
« chose »). Je mets LA en relief, parce que le
pronom souligne la faute de français (il suffit de le lire
ou de l'entendre, pour comprendre que cela n'est pas
français, évidemment). L'analyse constate d'abord
l'incorrection
grammaticale en français. Et l'on peut remarquer que
Gómez ne craint
pas de la traduire littéralement en espagnol :
« con
frecuencia me he preguntado cual era la cosa más
fácil de
reconocer : ¡ si la profundidad del océano o
la profundidad
del corazón humano ! »; on va vite
comprendre pourquoi. En
effet, nous sommes dans une phrase interrogative ou
semi-interrogative. Les
traducteurs en espagnol choisissent parfois le pronom interrogatif
« si » (Pellegrini, Serrat Crespo et Pariente,
mais
également Saad, qui élimine la complétive,
pour ne garder que
la principale), comme on le ferait en français
(« je me suis
souvent demandé s'il était plus facile
de... »);
mais trois autres (Álverez Ortega, Alonso et Méndez)
traduisent
plutôt la phrase avec le typique pronom-adjectif interrogatif
castillan,
qué (soit le pronom relatif passe-partout que,
avec son accent
orthographique en tête de l'interrogative), ce qui donne la
phrase que
Ducasse a bien entendu à l'esprit et que Gómez
retraduit
littéralement en espagnol, soit : « me he
preguntado
qué era más fácil... ».
D'où la
transposition de l'hispanisme morpho-syntaxique en français,
« quelle chose était le plus
facile... » au lieu
d'écrire correctement en français, « ce
qui ». Á remarquer en passant que c'est un
problème
que rencontrent les hispanophones avec notre expression très
fréquente, « qu'est-ce qui ? »
(rare en espagnol),
alors qu'ils ont « qué ? » à
l'esprit.
On remarquera que Ducasse
réécrit correctement
la phrase quelques lignes plus bas : « oui, quel
est le plus
profond, le plus impénétrable des deux :
l'océan ou le
coeur humain ? ». Si un élève de sept
ou huit ans
écrit « souvent je me suis demandé
quelle chose
était LA plus facile à
(re)connaître... », il est
évident que son professeur le corrigera. Mais cela ne
risque pas de se
produire : jamais un francophone ne fera une telle faute de
français,
s'agissant d'un hispanisme que seul un hispanophone pourrait avoir
à
l'esprit. Voilà les points mis sur les i. Et voilà
pour le second
coup de sifflet de Trouscaillon. Un simple hispanisme aussi facile
à
expliquer (revoir le glossaire !) qu'à comprendre. Il
n'y avait pas
de quoi grimper dans les rideaux. Mais, avec cette anodine
incompréhension,
voilà qu'« on touche là aux limites de la
démarche
de Laflèche... ». On aura vu limites plus
catégoriques,
s'agissant d'une faute d'analyse et d'une crise de nefs de T.
Davo.
Momentanément
« De quel droit... ».
C'est un coup de
sifflet de Trouscaillon dans son grand rôle de petit flic.
De quel
droit ! Remarquons que l'analyse linguistique et grammaticale
qui
s'énonce par un « de quel droit » porte
à rire.
Et ici, on peut regretter que notre sifflard n'ait pas ouvert
à nouveau son
fameux TLF. Il y aurait lu, tout bonnement,
« momentanément, adv. d'une manière
momentanée, pour un petit espace de temps ». Il
s'agit du sens
de l'adverbe, comme de l'adjectif, en français moderne, du
XVIIe
siècle à nos jours. Je vais le répéter
deux ou trois
fois, car il faut couper un très fort et très long
coup de
sifflet.
« De quel droit affirme-t-il [c'est
de G.
Laflèche dans el Bozo qu'il est question] que, dans
l'incipit
des Chants, Lautréamont a écrit
"momentanément", mais que ce
n'était pas "momentanément" qu'il voulait dire ?
Et d'où
lui vient cette idée saugrenue qu'en espagnol
"momentáneamente"
signifie "soudain" ? ». —
« Momentáneamente :
1. inmediatamente, sin
detención alguna; [ce sens ancien n'existe plus en
français depuis
le XVIIe siècle; son emploi en ce sens par Ducasse, en
plein XIXe
siècle, est un hispanisme]; 2. por muy breve
tiempo », Academia. Quand le Trésor de
la langue
française et le Dictionnaire de l'Académie
royale
espagnole disent exactement la même chose, il est
saugrenu de se demander
« de quel droit !? » je ne pourrais pas
les
répéter. D'ailleurs, tous les dictionnaires
espagnols et
français enregistrent exactement ce que l'on vient de lire,
les deux sens
de l'adverbe espagnol et le sens unique de l'adverbe
français.
Il faut le situer l'adverbe en cause dans son
contexte,
s'agissant de la première phrase des Chants de
Maldoror. C'est la
strophe 1.1. « Plût au
ciel que le
lecteur, enhardi et devenu momentanément
féroce comme ce qu'il lit, trouve, sans se
désorienter, son chemin
abrupt et sauvage, à travers les marécages
désolés de
ces pages sombres et pleine de poison... ». Le texte est
parfaitement
clair et de toute beauté, en dépit de son premier
hispanisme,
surprenant en français, puisque l'adverbe est employé
fautivement,
comme on le lit au glossaire des hispanismes.
Dans le glossaire, je n'ai pas cru
nécessaire
d'analyser la question, car l'hispanisme est évident et
la faute tout
autant, s'agissant d'un « hispanisme » au sens
premier, la
faute que commet spontanément un hispanophone en
français. Mais
l'analyse n'en est pas moins intéressante. L'adjectif et
l'adverbe avaient
en français les deux sens qui sont restés dans leur
équivalent
espagnol, soit « subitement » et
« momentanément, pour un instant ».
C'est seulement ce
second sens qui est resté en français moderne,
à partir de la
Renaissance. Au Moyen Âge, momentain signifiait
d'abord et surtout
« soudain », avant de prendre le nouveau sens
de
« passager », « pour un
moment ».
Il n'est pas difficile de comprendre que ce
n'est pas ce sens
français de l'adverbe, mais bien son sens hispanique qui
correspond à
l'adverbe à l'ouverture des Chants. Que lit-on ? Le
narrateur
espère que son lecteur devienne ou sera devenu d'un seul
coup
(momentanément = « soudain »)
féroce comme
ce qu'il va lire; il ne le sera donc pas
« momentanément » !
« pour un
instant », puisque ce sera au moins pour la durée
de sa lecture,
si ce n'est pour toujours.
Il est intéressant de constater que sur
sa faute
d'analyse, d'un coup de sifflet (« de quel
droit » !?),
notre Trouscaillon prend le ton mielleux du grand rôle pour
se livrer
à toute une série d'insultes et d'amalgames.
J'aurais une
connaissance de l'espagnol « extrêmement
ingénue », « livresque »
(fondée sur
mes « dictionnaires, dont nous savons tous qu'ils sont
imparfaits » !), « péremptoire
("tel mot n'a pas
d'équivalent en espagnol") » « et
curieusement jacobine
[sic] pour un Québécois... ». Il faut
vraiment bien jouer
le rôle de Trouscaillon s'adressant circonspectueusement
à Zazi pour
réussir à accumuler autant d'accusations et
d'insultes à
partir de l'adverbe « momentanément »
mal analysé
en contexte. Or, ce n'est pas tout, je privilégierais le
dictionnaire
Robert (où ça ?) en lieu et place du
Littré (qui figure
dans ma bibliographie), qui serait
plus
approprié pour un auteur du XIXe siècle. Aucun
exemple d'analyse,
évidemment : « bien des bizarreries des
Chants de
Maldoror se voient dissipées si, au lieu du Robert, on
utilise
Littré... ». Est-il, non pas honnête, mais
simplement
intelligent de faire une telle affirmation sans donner aucun
exemple de ces
nombreuses « bizarreries » ?
« Il n'utilise pas
non plus de dictionnaires d'américanismes : c'est,
pour lui, Madrid
qui, après lui [sic], décrète ce qui est
Espagnol [sic, pour
la majuscule] ou ne l'est pas ». Le Robert, le
Littré, les
dictionnaires d'américanismes, désignés sans
aucun exemple,
cela n'a aucun sens. Ce ne sont que forfanteries et insultes
gratuites.
Voilà donc trois hispanismes
avérés et
bien analysées, « autrui » pour
ajeno,
« quelle chose ? » pour
quién ? et
« momentanément » pour
momentáneamente.
J'insiste sur le fait qu'on vient de lire trois analyses. S'il
dénie et
dénigre ces trois hispanismes de trois coups de sifflet,
notre Trouscaillon
n'en propose aucune analyse. Ce ne sont qu'affirmations,
intuitions et
dénigrements. Il faut reprendre sur ce point toutes les
affirmations
insolentes de T. Davo : « un exemple, ils sont
nombreux, de
la dérive dont est victime Laflèche, en voyant de
l'espagnol
partout... »; la démarche à identifier
les hispanismes
est intéressante (!), « seuls ses excès la
dénaturent et
l'anéantissent » !,
« prisonnier de son défi, qui consiste à
trouver le plus
d'hispanismes possible... ». Et de finir en
comparant mon travail
sur les hispanismes des Chants de Maldoror avec la recherche
des anagrammes
de Saussure, citant longuement Starobinski. Cette comparaison qui
se veut
malveillante est tout simplement stupide : les anagrammes que
le fondateur
de la linguistique moderne croyait voir dans la poésie
latine n'existaient
pas. Les hispanismes des Chants de Maldoror sont
avérés et
incontestables. Il s'agit d'une sotte comparaison que rien ne
justifie.
L'exposé
statistique
identifie actuellement plus de 400 hispanismes lexicaux et
syntaxiques, tandis que
les hispanismes morphologiques sont innombrables, puisqu'on en
trouve à
toutes les pages. Mais Thierry Trouscaillon Davo ramène
tout ce travail
à trois coups de sifflets. Trois. Et l'on vient de voir
que ces trois
hispanismes sont bel et bien avérés. Alors ?
Cela signifie que
notre critique n'a pas encore compris la nature des dix
opérations menées sur el Bozo depuis
trente ans. Je
dirai, pour qu'on voit bien la différences entre les
affirmations
intempestives de notre critique et mon travail, que la toute
première de ces
opérations, comme on le voit, aura été
l'analyse grammaticale
de chacune des soixante strophes des Chants. C'est le point de
départ de
la recherche des hispanismes et de l'étude de chacun d'entre
eux. Si l'on
n'est pas capable de comprendre que l'interrogative
« quelle chose
est la plus facile à comprendre... » n'est
pas
français, on ne trouvera jamais les hispanismes des Chants
et on ne
comprendra pas qu'il s'agit bien là d'hispanismes. Or, il
se trouve que je
suis linguiste et grammairien du français de par ma
formation
(Université de Montréal et de Strasbourg, puis
École Pratique
des hautes études de Paris, avec de nombreuses recherches et
publications
dans ce domaine : Mallarmé : grammaire
générative des « Contes
indiens », Presses de l'université de
Montréal, 1975; « Étude de
psycho-systématique
sur les valeurs aspectives des temps du passé en
français », Revue des langues romanes, 60:
2, 1973, 365-389; etc. ! cf ma bibliographie). Évidemment,
l'étude grammaticale,
puis
stylistique, comme je viens de les mener, cela ne s'improvise pas
à coups
de sifflet. Je ne suis pas un génie, cela ne fait aucun
doute, mais que
l'on ne trouve aucune qualité au travail mené sur
el Bozo et
qu'on se livre à son dénigrement systématique,
sans qu'aucune
de ces critiques ne puisse être retenue, voilà qui est
pour le moins
suspect. Bref, T. Davo carbure au mépris, avec un texte
insipide, dont il
n'y a rien à retenir, pas une seule critique à
évaluer, ni
même à discuter, ce qui est rare dans un texte paru
dans une revue
universitaire. Mais il y a encore pire. Et c'est le
dénigrement gratuit
visant à discréditer la personne d'un chercheur, ce
qui sera la
conclusion de cette réplique, que résumera son
dernier mot.
Mais il faut encore exécuter la
troisième et
dernière partie de l'article de T. Davo. C'est à
peine deux pages,
mais elles sont vraiment indigestes. Il commence par nous
répéter
qu'il ne trouve pas les mêmes hispanismes que Pierssens (qui
n'en a jamais
évoqué un seul), Rodríguez Monegal (sic, on le
sait !)
ou Guy Laflèche dans
« Lautréamont ».
« Et j'y trouve d'autres hispanismes [remarquer le
pluriel !] qui
me semblent flagrants, mais peuvent aussi bien ne pas en
être, tel que "moi
qui ne suis encore rien dans ce siècle, tandis que vous,
vous y êtes
le Tout" de la lettre de Ducasse à Victor Hugo. Je
vois, là,
dans cette utilisation du pronom personnel, obligatoire en espagnol
lorsque "tout"
est complément d'objet direct, une trace d'hispanité,
lorsque ma
collègue Yveline Riottot y voit une manière
parfaitement
française de dire à Hugo qu'il est un
dieu ». D'abord, il
n'y a là aucun pronom personnel, mais un simple article
défini;
à remarquer aussi que « le Tout » n'est
pas
complément, mais attribut; ensuite, l'article défini
n'est pas moins
de rigueur en français qu'en espagnol lorsque le vocable est
employé
comme substantif; enfin, le vocable qui s'écrit
« touts » au pluriel a tendance à
prendre la majuscule
au singulier s'il vise à proclamer la grandeur d'une chose
ou d'une
personne. Bref, interrogée abruptement dans une rencontre
de corridor de
l'Université de Reims, Yveline Riottot manifeste une
parfaite maîtrise
du français. Question : mais pourquoi donc T. Davo
nous sort-il un
tel exemple... de la correspondance de Ducasse ? Il n'en
trouve pas dans les
Chants qui ne seraient pas encore consignés sur el
Bozo ?
Réponse : il veut faire son fin finaud, tout
simplement.
Et de poursuivre, « dans le
même ordre
d'idée » ! Il nous présente le
vocable
alpargata, à l'origine abarca,
« sandale », aujourd'hui
« espadrille »,
d'origine pré-romaine, vocable hispano-arabe, ce dont T.
Davo ne nous dit
rien. Non, il nous présente la grosse bourde d'un
dictionnaire
d'équatorianismes qui présentait le vocable comme
tel, avec une
définition qui lui paraît bizarre
(« chausure de toile
à semelle de corde », ce qui définit bien
l'espadrille).
Et de se demander « en tant que co-auteur du
Diccionario de
hispanoamericanismos no recogidos por la Real
Academia » combien de
telles bévues doivent s'y trouver. L'anecdote est risible,
sans aucun
rapport avec l'hispanisme dans les Chants, tandis qu'elle permet de
glisser une
belle petite note autobiographique. Or, elle est fausse : T.
Davo n'est pas
du tout le « co-auteur » du dictionnaire
édité
par Renaud Richard (Madrid, Catedra, 1998, 2006 : voir le
compte rendu
critique de Mauricio Fuenzalida, Onomazeim, no 4, 1999,
p. 497-517).
Il compte parmi sept collaborateurs qui ont dirigé des
étudiants
français pour réaliser l'ouvrage.
Et de conclure (!) par un exposé
autobiographique
(« traducteur depuis vingt-neuf ans... »),
évoquant les
innombrables idiolectes de l'espagnol et du français, pour
tenter de
justifier le titre de son article, pour finir sur une
évidente
sottise : « on lit un texte dans la langue qu'on
veut » ! Voilà qui est vide de sens.
Voilà
l'affirmation d'un professeur qui ne sait pas lire, c'est bien le
cas de le
dire !
Bref, on le voit, la première et la
troisième
parties de son article n'ont pas de rapport avec son sujet,
constitué de la
partie centrale et qui consiste à dénigrer sans
raison le travail
réalisé sur el Bozo. Or, ce
dénigrement ne se fait pas
tout à fait sans raison, puisqu'il s'agit de diffamer un
chercheur.
Pourquoi donc ? Seul T. Davo peut répondre à la
question,
probablement avec l'aide d'un psychologue, voire d'un
psychanalyste. En effet, son
texte n'est pas seulement une saloperie insultant gratuitement les
collaborateurs
d'el Bozo et un torchon qui critique sans s'appuyer sur
aucun fait
linguistique ou grammatical probant ce travail de recherche sur
l'hispanisme et les
hispanismes dans les Chants de Maldoror, car il est
animé par une
évidente malveillance. Un petit exemple très simple
pour commencer
la démonstration. T. Davo dit en passant que les analyses
d'el Bozo
se répartissent en dix glossaires. Personne d'autre que lui
ne pouvait
présenter le travail sans énumérer ces
glossaires, bien
entendu; aucune analyse compétente ne peut s'en tenir au
nombre de
glossaires, c'est évident. Mais alors, pourquoi passer sous
silence
l'armature même du travail ? La raison en est
très simple.
L'énumération des glossaires
montre
l'ampleur, et j'ajouterais, à mon avantage,
l'évidente ampleur
colossale du travail de recherche et d'analyse, mené sur une
trentaine
d'années. Bref, le moins que l'on puisse dire en ce qui
concerne
l'évaluation d'el Bozo, c'est que le professeur ne
sait pas lire.
« C'est sur un site internet, "la
Moustache de
Lautréamont" que l'Universitaire canadien Guy
Laflèche expose les
fruits de ses recherches. C'est, avoue-t-il, qu'aucune
revue n'a accepté de les publier ». Tout
dans ce petit
extrait transpire le fiel. Un site internet, ce n'est pas une
publication
importante ? Cela doit être
précisé ? Comment donc
une revue aurait-elle accepté de publier un travail en cours
depuis trente
ans ? De quoi s'agit-il, exactement ? T. Davo saute sur
un os qu'il
applique à el Bozo, voire à tous mes travaux.
Il s'agit d'un
des six annexes qui accompagnent l'édition critique des
Chants, les Sources d'inspiration des Chants de
Maldoror.
Le chapeau de l'article s'intitule « Un article partout
refusé ». L'article m'a été
demandé par
Ricard Ripoll en 2003 pour un numéro de la revue
Barcarola de
Barcelone qu'il préparait sur
« Lautréamont ».
C'est un collègue à qui j'avais proposé de
lire mon article,
qui a forcé R. Ripoll à refuser l'article et, par la
même
occasion, ma participation au colloque qu'il préparait
à Barcelone
pour l'Association des ducassologues. Il faut bien protéger
sa
carrière universitaire, lorsqu'on est à la merci des
membres d'une
association qui finance votre colloque. La cause de l'intervention
malveillante
du collègue, c'est tout simplement que mon article
dévoilait qu'el
Matadero d'Esteban Echeverría était la source de
la strophe 6.9
des Chants. Lui, ne l'avait jamais vu, ce qui, semble-t-il, l'a
piqué au
vif. J'étais fier de mon article et j'aurais voulu,
à cette
époque, le voir paraître pour faire la promotion de
mon travail. Mais
il a été refusé par trois revues. Je suis
finalement heureux
qu'il se trouve sur el Bozo, où les lecteurs sont
bien placés
pour en juger la pertinence et l'importance qui ne font aucun
doute. Il suffit de
relire l'affirmation intempestive de T. Davo
pour voir
qu'elle n'a aucun sens. Manifestement, le professeur ne sait pas
lire.
Toujours à mon propos,
abruptement :
« la petite maison d'édition qu'il a
fondée, et où
il publie ses ouvrages, s'appelle "Éditions du
Singulier" ». Est-ce
que vous comprenez le dénigrement ? Oui,
l'affirmation est abrupte
et hors propos. Sans compter qu'elle ne précise pas que
j'ai
également publié cinq de mes livres dans trois autres
maisons
d'édition. Mais la précision incomplète n'a
aucun rapport
avec el Bozo ou l'étude des hispanismes. Il s'agit
toujours de
discréditer sans raison un chercheur, sans rien dire (et
probablement sans
rien savoir) de la maison d'édition en question, sauf
qu'elle est
« petite ». Oui, elle ne compte que seize
livres. T. Davo
aurait voulu que je fonde une grande et une grosse
maison
d'édition ? Il ne sait ni ne devine pourquoi cette
maison
d'édition a été fondée. Et je rappelle
que par deux
fois, le professeur précise que je parle le français
du
Québec, ce qui ne paraît pas non plus très
positif. Mais
l'important ici est que ces deux
« précisions » prouvent
que le professeur ne sait pas lire, ne lit pas, car autrement il se
serait un peu
renseigné à ce sujet, sur le Singulier et sur le
français
parlé au Québec. Ah ! c'est vrai, ce sont ses
derniers
mots : « on lit un texte dans la langue qu'on
veut » ! Comme les informations sur le Singulier et
le
français du Québec se trouvent globalement en
français, T.
Davo a dû choisir de les lire dans quelques mauvaises langues
(de je ne sais quels lecteurs), « puisqu'on lit un texte
dans la langue qu'on veut », pour répéter
sa sottise.
Oh ! j'oubliais le sommet de la turpitude.
« Précisons que Laflèche est le seul
universitaire de
l'Université de Montréal, où il a
enseigné de
1973 à 2011, à s'être vu refuser au moment
de sa retraite
le statut de professeur émérite ».
C'est totalement
faux et cette phrase accumule de nombreuses accusations gratuites.
D'abord, on ne
m'a pas refusé l'éméritat, parce que je ne
l'ai pas
demandé; il s'agit d'un grade honorifique accordé
à certains
professeurs au moment de leur retraite. Ensuite, déclarer
que je suis le
seul professeur retraité de l'Université de
Montréal (!) à qui on a
« refusé » ce
grade honorifique est totalement stupide et n'a même aucun
sens.
L'affirmation est si grosse qu'elle est grossière !
Nous sommes
actuellement dix-neuf professeurs retraités du
département des
Littératures de langue française de
l'Université de
Montréal. Huit d'entre eux ont reçu le grade
honorifique de
professeur émérite. On est donc onze à ne pas
l'avoir
reçu, de sorte que je suis loin, bien loin d'être le
seul, comme le
dit fautivement et avec une évidente malveillance T. Davo.
Mais le
malveillant professeur d'Université ne dit pas d'où
il sort cette
information. Elle vient du dernier des vingt-quatre chapitres de
mes Polémiques, intitulé Vulgarités (il s'agit d'un
clin-d'oeil qui
implique la littérature et la culture
québécoises). Ce petit
texte polémique proteste contre le mécanisme
d'attribution dans mon
département de l'éméritat. En plus du mien,
pourtant bien
modeste, je donne l'exemple de quatre grands professeurs de mon
département
(Réginald Hamel, Georges-André Vachon, Bernard
Dupriez et Jean
Larose) qui n'ont pas, comme onze des retraités actuels,
obtenu le grade
honorifique. Bien entendu, mon enseignement et mes travaux
témoignent de
facto que j'aurai été émérite,
comme ces quatre
grands professeurs. Mais la question n'est pas là. Ce que
je
dénonce, c'est le processus présidant à
l'octroi de la
distinction qui dépend exclusivement du directeur du
département,
sans aucun mécanisme de consultation et d'évaluation.
C'est, bien
entendu, du pur népotisme, car on peut malheureusement se
douter que les
huit professeurs émérites actuels de mon
département
étaient sans aucun doute des amis du directeur au
moment de leur
retraite. Il est clair que tel n'était pas mon cas. Comme
on le voit, T.
Davo n'a rien compris de cela. Manifestement, le professeur ne
sait pas lire.
Cela dit, si le professeur ne sait pas lire,
il accumule ainsi
des affirmations totalement fausses destinées à
dénigrer non
seulement un travail d'analyse et de recherche, mais d'abord et
avant tout l'auteur
de ce travail, le chercheur, moi. La direction de mon
département m'aurait
refusé le grade de professeur émérite et
à moi seul;
plusieurs de mes livres sont parus à ma petite, toute petite
maison
d'édition, le Singulier; beaucoup de mes travaux et, en
particulier, el
Bozo ont paru sur l'internet et non couchés sur papier;
et, ces
travaux, aucune revue n'aurait accepté de les publier !
Il n'est pas
besoin d'être très intelligent pour comprendre que ces
accusations,
totalement fausses, ne visent qu'à me discréditer
personnellement et
que, même si elles étaient vraies !, elles n'ont
rien à
voir avec l'évaluation d'aucun travail de recherche de ce
professeur,
notamment celui d'el Bozo. Il n'y a qu'une explication,
toute simple,
à ce comportement caractériel maladif. T. Davo ne
joue pas seulement
les salauds et le parfait crétin produisant une saloperie et
un vulgaire
torchon. Il joue magistralement et avec brio le rôle des
trous du cul.
Résultat ? Une merde.
__gl>-
Guy Laflèche
2 août 2024
Une critique anodine au sujet d'el Bozo,
par l'important chercheur montévidéen
Jacques-André
Duprey,
partiellement connue par un résumé de Kevin
Saliou
dans les Cahiers Lautréamont (2019).
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